N'y a-t-il de rationalité que scientifique ?
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Introduction
On affirme volontiers que la rationalité est non seulement utile, mais nécessaire.
D'où l'intérêt d'en préciser la nature.
Dans
la mesure où la science passe pour un modèle de réussite rationnelle, il peut être particulièrement éclairant de se
demander si elle représente la seule rationalité possible, ou si dans cette dernière, on peut concevoir d'autres formes ou
d'autres champs d'application également exemplaires.
1.
Rappel historique
— Le rationnel est quêté, et défini (de différentes façons) par la philosophie avant même l'apparition de la science au sens
actuel (Platon, Aristote).
— Ceci suggère déjà qu'a existé une rationalité philosophique, indépendamment de la rationalité scientifique.
Problème: cette rationalité philosophique demeure-t-elle performante après la formation de la science? ou doit-on penser
que cette dernière la recouvre et la remplace? (On entrevoit déjà qu'à répondre affirmativement à la deuxième question,
on s'engage dans la voie d'un scientisme qui fait de la science le seul mode de connaissance possible, et le modèle définitif
de toute démarche rationnelle sérieuse).
— Les philosophes qui tiennent compte de la rationalité scientifique (Descartes, Leibniz) n'en restent pas moins
philosophes ! De tels cas suggèrent qu'à côté de la rationalité scientifique, demeure au moins une rationalité
philosophique.
— Avant de préciser les relations possibles entre les deux (au minimum) formes de rationalité, il convient de préciser en
quoi consiste la rationalité scientifique.
II.
Caractères et limites de la rationalité scientifique
— Elle obéit à la recherche de la raison d'être, ou cause, des phénomènes.
— On sait (cf.
Auguste Comte) que cette cause est conçue comme «proche », et non comme «première» ou « dernière »
(telle que la recherchaient au contraire les États théologique et métaphysique).
— De plus, la rationalité scientifique se déploie dans un certain nombre de méthodes (à définir précisément dans la copie):
analyse, déduction (pour les sciences formelles), induction (pour les sciences expérimentales), raisonnement expérimental.
— On peut globalement la caractériser par:
•
•
•
•
la rigueur des raisonnements;
un principe d'économie de la pensée;
le souci de travailler sur des objets strictement définis et avec des concepts univoques;
une «universalité» (potentielle) de ses performances.
- Problèmes:
• ces caractères étaient déjà présents dans la rationalité philosophique (pré-scientifique);
• la rationalité scientifique paraît elle-même incapable de se penser: c'est par exemple le Positivisme, c'est-à-dire une
philosophie, qui la situe par rapport à ce qui l'a précédée.
• elle s'intéresse aux faits qu'elle élabore, mais non aux valeurs (y compris celles qu'elle véhicule).
III.
Sciences, morale, philosophie
— Kant lui-même, tout en concevant la Raison comme une, distingue deux versants
dans ses capacités: il existe une raison pure et une raison pratique:
• la théorie de la connaissance (scientifique) élaborée dans la première Critique a
aussi pour objet de «sauver» la métaphysique en la rendant rigoureuse;
• la réflexion sur la morale (deuxième Critique) en cherche la rationalité nécessaire
(dans l'idée de loi);
• ainsi la réflexion kantienne nous avertit que, à côté de la rationalité scientifique, il
importe de maintenir et de rendre plus rationnels les domaines de la métaphysique et
de la morale.
— Une analyse historique de la rationalité scientifique montre qu'elle évolue (rappeler
Bachelard).
— La rationalité scientifique est universelle en droit, mais non en fait: il existe d'autres
mentalités que la nôtre, dont on a reconnu (trop tardivement) qu'elles sont également
porteuses de rationalité (s'appuyer sur Lévi-Strauss).
Conclusion
Admettre que la rationalité scientifique est la seule possible, ce serait:
• oublier qu'il existe une histoire de la raison scientifique elle-même;
• risquer d'en revenir à un européocentrisme, d'autant plus tentant que la science
n'en finit pas de prouver son efficacité, mais totalement injustifiable;
• faire de cette rationalité scientifique un modèle applicable en tous domaines, y
compris politique, c'est-à-dire favoriser une conception pour le moins technocratique de la société, et ustensilaire de l'être
humain.
On doit donc privilégier une conception relativiste de la rationalité, et ne maintenir, en fait de prétentions à
l'universalité, que celles qui peuvent oeuvrer au respect de l'humanité dans sa diversité même..
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