Nos pensées sont-elles bien les nôtres ?
Extrait du document
«
« j'appelle pensée tout ce que l'âme éprouve, soit par des impressions étrangères, soit par l'usage qu'elle fait
de la réflexion » Condillac
La pensée, phénomène psychique conscient, est la manifestation même de la subjectivité de l'homme en tant
qu'elle symbolise un espace continu privé et impénétrable pour autrui.
L'homme, de la naissance à la mort, ne
peut sortir de l'esprit projetant les pensées, tout se vit à travers elles (connaissance, sentiments , souvenirs,
imagination, création ...).
Nous existons avec elles.
Les pensées d'autrui me sont aussi impénétrables que les
miennes pour lui et ceci tend à supposer qu'elles sont nôtres.
Cependant, comme l'avait défini Aristote,
l'homme est « un animal social », donc sa vie spirituelle n'est pas un solipsisme inéluctable, il naît et vit dans
un monde commun avec des données partagées qui génèrent et stimulent ses pensées.
On peut alors se
demander si nos pensées ne naissent pas en réaction à ce monde pré-donné qui les détermine.
La pensée
serait alors l'intériorisation d'un monde environnant, sentiments et jugements n'étant que le résultat d'un
conditionnement de celui-ci .
Survient la question : nos pensées sont-elles bien les nôtres ? Sommes-nous
maîtres de notre vie psychique ou sont-ce des phénomènes extérieurs qui la déterminent et nous dépassent ?
Il s'agit de comprendre ici l'origine et la valeur de nos pensées.
Sommes-nous acteurs ou récepteurs de nos
pensées ? Maîtrisons-nous nos pensées ? C'est la liberté ultime de l'homme, celle de penser, qui est ici en jeu.
1.Mes pensées m'appartiennent.
Je peux douter du contenu de mes pensées, non que ce soit moi qui les
pense .
Méditations cartésiennes Descartes.
Dans ses méditations, Descartes part à la conquête d'une science rigoureuse en empruntant un chemin
intérieur.
Pour trouver le fondement de cette science, il pose le doute
sur tous ses contenus de pensée et préjugés, et expérimente par luimême la valeur « vrai ».
Il s'aperçoit inévitablement que même en y
renonçant, l'acte de penser persiste.
Il est une chose qui pense
inséparable du fait de l'existence « seule la pensée ne peut être
détachée de moi ».
Si je cesse de penser je cesse d'exister ; « Je
pense, donc je suis ».
C'est à partir de l'acte de penser du « je » que se
déduit l'existence.
Puisque c'est le « je » qui pense et qui agit sur ses
pensées, mes pensées sont miennes.
Descartes, dans cet isolement
recherché, incarne la force de la pensée créatrice, et par là même, la
force de la subjectivité puisqu' il fait du « je » créateur des pensées, la
base de toute fondation possible.
On pourra utiliser aussi cette référence stoïcienne: "Il n'y a qu'une route
vers le bonheur, c'est de renoncer aux choses qui ne dépendent
pas de notre volonté..." ÉPICTÈTE
Bien que la référence ne soit pas indiquée, le candidat qui possède une
certaine culture philosophique aura reconnu ici une formulation
stoïcienne.
Il s'agit précisément d'une citation d' Epictète (Entretiens,
IV, 4, 39).
On peut cependant traiter ce sujet alors même qu'on ignore
tout de la philosophie des stoïciens.
Si les hommes n'atteignent pas le
bonheur, c'est bien parce qu'ils ont des désirs multiples et que, parmi
ceux-ci, nombreux sont ceux qui ne peuvent être satisfaits.
Il y a des choses, comme la santé ou la richesse,
qui ne dépendent pas entièrement de notre volonté.
Savoir se contenter de ce qui est possible, serait alors la
seule « route vers le bonheur ».
C'est dans la quatrième partie du livre IV des Entretiens, dédiée « A ceux qui cherchent à mener une vie
tranquille », et sous le titre « Le labeur véritable » qu'Épictète déclare :
« Il n'y a qu'une route vers le bonheur (que cela soit présent à ton esprit dès l'aurore, jour et nuit), c'est de
renoncer aux choses qui ne dépendent pas de notre volonté, de croire qu'aucune d'elles n'est notre propriété,
de les abandonner toutes à la divinité, à la Fortune.
»
Comme un leitmotiv revient sans cesse dans la philosophie stoïcienne l'impérieuse nécessité des distinctions : «
S'instruire ? C'est apprendre à diviser les choses, en choses qui dépendent de nous, et en choses qui n'en
dépendent pas.
» Ce qui en grec ancien a le charme de l'assonance : ta eph êmin, ta ouk eph êmin ; ce qui
dépend de nous, ce qui ne dépend pas de nous.
Ce qui dépend de nous, c'est la volonté et les actes volontaires.
« Les dieux n'ont fait dépendre de nous que
ce qui est supérieur à tout, ce qui domine tout, c'est-à-dire l'usage correct des représentations » (Épictète,
Entretiens, I, 1, 7).
Ce qui dépend de la volonté peut être un bien (vouloir supporter généreusement la mort de
son fils) ou être un mal (vouloir se plaindre de la mort de son fils).
Vouloir l'un ou l'autre, cela est en notre
pouvoir.
A partir de la représentation, il est possible de donner d'abord son assentiment (j'admets cette mort),
puis de s'élever jusqu'à la compréhension (de la loi universelle qui veut le cycle de vie et de mort).
On voit que
ce qui dépend de nous, ce sont nos actions, nos oeuvres propres, celles que nous accomplissons en
conformité avec notre nature.
Et connaître sa propre nature, pour l'homme, c'est reconnaître « qu'on n'est ni
chair, ni os, ni nerfs, mais le principe qui se sert de ces instruments, le principe qui, à la fois, gouverne et
comprend les représentations » (Épictète, Entretiens, IV, 7).
Connaître sa propre nature, pour l'homme, c'est
reconnaître qu'il y â en lui-même une faculté capable « d'avoir conscience d'elle-même, de sa nature, de son.
»
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