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Nietzsche: Travail, besoin et bonheur

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Le besoin nous contraint au travail dont le produit apaise le besoin : le réveil toujours nouveau des besoins nous habitue au travail. Mais dans les pauses où les besoins sont apaisés et, pour ainsi dire, endormis, l'ennui vient nous surprendre. Qu'est-ce à dire ? C'est l'habitude du travail en général qui se fait à présent sentir comme un besoin nouveau, adventice : il sera d'autant plus fort que l'on est plus fort habitué à travailler, peut-être même que l'on a souffert plus fort des besoins. Pour échapper à l'ennui, l'homme travaille au-delà de la mesure de ses propres besoins ou il invente le jeu, cad le travail qui ne doit apaiser aucun autre besoin que celui du travail en général. Celui qui est saoul du jeu et qui n'a point, par de nouveaux besoins, de raison de travailler, celui-là est pris parfois du désir d'un troisième état, qui serait au jeu ce que planer est à danser, ce que danser est à marcher, d'un mouvement bienheureux et paisible : c'est la vision de bonheur des artistes et des philosophes. Nietzsche

Le texte proposé est de Nietzsche qui est un philosophe du soupçon. Il nous fait réviser nos conceptions sur nous-mêmes, sur le sens que nous donnons à notre activité, sur notre rapport au monde et aux autres. Quel est le sens du travail ? Pourquoi travaillons-nous ? Le texte commence de façon conventionnelle. Le rapport du travail au besoin n’a rien d’original. A cause de la rareté, l’homme s’est mis à travailler, mais comme il n’est pas autosuffisant, il a besoin des autres membres de la société pour satisfaire tous ses besoins, d’où la division du travail et par suite de cela l’échange s’est instauré comme prélude au commerce. L’activité économique devient le moteur et le critère de la bonne santé d’une société grâce au travail fourni par la population active, grâce à l’accroissement de la productivité et de la consommation. Le travail devient source de richesse selon les économistes libéraux et une valeur fondamentale de la société capitaliste. C’est devenu l’objectif principal de toute formation et de toute éducation ; Il y a un conditionnement au travail. On prépare les jeunes à la vie active. Le but sera de trouver un travail intéressant afin d’obtenir une rémunération qui permette d’acquérir un statut social et de fonder un ménage qui consomme et qui a des besoins. On entre dans le cycle travail-besoin. Le travail qui est initialement utile à la vie est devenu une valeur négative. Il est synonyme de peine, de souffrance et d’exploitation. Par une aberration propre à la psychologie de l’homme qui n’est pas à une contradiction près, on se met à valoriser le travail dans une hypothétique réalisation de soi. Travail et devoir se trouvent associés On ne travaille plus pour vivre mais pour travailler.  La suite du texte va se concentrer sur la transformation de l’homme par son activité. Il ne pourra plus se passer du travail. Il devient un enragé du travail. Les pauses et les loisirs vont l’ennuyer. Il ne peut plus rester inactif ; Il ne travaille plus pour satisfaire des besoins, mais pour échapper à l’ennui. Le travail est devenu une habitude.  Une alternative à cette situation d’enlisement sera l’invention d’une autre activité qui n’aura pour but que d’apaiser le besoin de travailler. Ce sera le jeu.  Une dernière étape que l’auteur appelle le troisième état n’est pas bien précisée, mais qui serait au jeu ce que planer est à danser, c’est la vision de bonheur des philosophes et des artistes.  Que constate-t-on ? L’homme ne s’arrête plus. Il a perdu la conscience de la réalité. Il ne se maîtrise plus. C’est l’ivresse du jeu et au-delà, c’est planer. Quel genre de travail est-ce ce dernier état ?  

« Le besoin nous contraint au travail dont le produit apaise le besoin : le réveil toujours nouveau des besoins nous habitue au travail.

Mais dans les pauses où les besoins sont apaisés et, pour ainsi dire, endormis, l'ennui vient nous surprendre.

Qu'est-ce à dire ? C'est l'habitude du travail en général qui se fait à présent sentir comme un besoin nouveau, adventice : il sera d'autant plus fort que l'on est plus fort habitué à travailler, peut-être même que l'on a souffert plus fort des besoins.

Pour échapper à l'ennui, l'homme travaille au-delà de la mesure de ses propres besoins ou il invente le jeu, cad le travail qui ne doit apaiser aucun autre besoin que celui du travail en général.

Celui qui est saoul du jeu et qui n'a point, par de nouveaux besoins, de raison de travailler, celui-là est pris parfois du désir d'un troisième état, qui serait au jeu ce que planer est à danser, ce que danser est à marcher, d'un mouvement bienheureux et paisible : c'est la vision de bonheur des artistes et des philosophes. QUESTIONNAIRE INDICATIF • Qu'est-ce qui nous « accoutume au travail »? • Qu'est-ce que « l'ennui » (selon Nietzsche)? — Importance de la notation « besoin nouveau et surajouté » dans l'économie de ce texte? • Comment comprenez-vous que ce « besoin » sera « d'autant plus fort » « qu'aura peut-être été plus forte aussi la souffrance causée par les besoins »? • Qu'est-ce que « le jeu » (selon Nietzsche)? • Comment appréhendez-vous le « troisième état » évoqué par Nietzsche ? — Comment Nietzsche l'évoque-t-il, tente-t-il d'en rendre compte ? — Comment comprenez-vous « un état de félicité tranquille dans le mouvement »? — En quoi ce texte a-t-il un intérêt philosophique ? Partie du programme abordée : Le travail. Analyse du sujet : Au-delà de sa fonction première (apaiser le besoin), le travail est le grand palliatif à l'ennui, au même titre que le jeu.

Seuls les artistes (ou les philosophes) peuvent trouver le bonheur hors du travail ou du jeu. Conseils pratiques : Analysez avec rigueur la notion d'ennui et celle de divertissement au sens de Pascal. Bibliographie : PASCAL, Pensées, Gallimard (tout le chapitre concernant le divertissement). Nietzsche, La volonté de puissance, Trident. Nietzsche, Humain, trop humain, I, Gallimard. Difficulté du sujet : ** Nature du sujet : Classique. A la question –apparemment provocatrice- de savoir si nous avons réellement besoin de travailler, Nietzsche répond par l'image d'un cercle vicieux qui nous mène indéfiniment, selon une régression à l'infini, du travail au besoin et du besoin au travail.

C'est ce qu'exprime le premier temps du texte, qui est implicitement centré autour d'une mise en cause de la notion de besoin.

Dénonçant l'illusion abstraite du besoin naturel qu'il faut bien combler par le travail, Nietzsche soupçonne le besoin d'être un résultat : l'habitude du travail produit le besoin du travail, qui répond donc à un besoin culturel (« nouveau », « adventice ») et non plus naturel.

C'est culturellemnt que nous avons besoin de travailler, besoin qui envahit même ce qui n'est pas le travail.

Aussi, dans un second temps, Nietzsche repère-t-il jusque dans nôtre attitude de « loisir » des traces d'une attitude qu'on croirait réservé au travail.

Sans travail, nous nous ennuyons, de cet ennui métaphysique (et dont l'accent est assez pascalien) qui témoigne de ce que le travail est rentabilisation, organisation machinale porteuse de repères.

L'exemple du jeu, ce travail sans travail, est bien significatif : il n'y a finalement rien de plus sérieux qu'un jeu aux règles duquel nous sommes souvent plus attachés qu'aux lois elles-mêmes.

Bref : le travail social exporte son « esprit de sérieux ». A cet esprit de sérieux, Nietzsche oppose dans le dernier temps du texte sa vision des natures artistes et créatrices.

Il s'agit de ceux qui ne font plus du jeu quelque chose de sérieux, mais l'expression même de la vie. Quand il dit de cet état qu'il est ce que planer est à danser, il faut comprendre cette analogie comme l'expression d'un dépassement, d'une libre fantaisie.

Le grief que fait Nietzsche à l'esprit de sérieux, à la surenchère culturelle du travail est l'oubli de la Vie, qui est la valeur centrale de la pensée de Nietzsche.

A l'esprit de sérieux (premier état) et au jeu (second état) qui est en apparence le prototype de son contraire, alors qu'il en est en réalité le prolongement le plus insidieux, Nietzsche oppose ce « troisième état », qui, débarrassé des faux besoins, se veut une pure célébration de la Vie.. »

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