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Nietzsche: La nature du travail philosophique

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Il me semble de plus en plus que le philosophe, étant nécessairement l'homme de demain ou d'après-demain, s'est de tout temps trouvé en contradiction avec le présent; il a toujours eu pour ennemi l'idéal du jour. Tous ces extraordinaires pionniers de l'humanité qu'on appelle des philosophes et qui eux-mêmes ont rarement cru être les amis de la sagesse mais plutôt des fous déplaisants et de dangereuses énigmes, se sont toujours assigné une tâche dure, involontaire, inéluctable, mais dont ils ont fini par découvrir la grandeur, celle d'être la mauvaise conscience de leur temps. [...] En présence d'un monde d'« idées modernes » qui voudrait confiner chacun de nous dans son coin et dans sa « spécialité », le philosophe, s'il en était encore de nos jours, se sentirait contraint de faire consister la grandeur de l'homme et la notion même de la « grandeur » dans l'étendue et la diversité des facultés, dans la totalité, qui réunit des traits multiples ; il déterminerait même la valeur et le rang d'un chacun d'après l'ampleur qu'il saurait donner à sa responsabilité. Aujourd'hui la vertu et le goût du jour affaiblissent et diluent le vouloir, rien n'est plus à la mode que la débilité du vouloir. NietzscheAnalyse thématique succincte Deux thèmes généraux sont abordés par les deux paragraphes du texte. o La vocation constante du philosophe dans toute la tradition (« être la mauvaise conscience de [son] temps »). o L'application de cette vocation au « monde moderne » et aux tendances néfastes qui s'y manifestent. Thèse centrale La fonction critique traditionnelle du philosophe, qui le situe toujours en rupture avec les préjugés de son époque, doit le conduire aujourd'hui tout à la fois à contester l'enfermement à courte vue dans la spécialisation et à combattre l'affaiblissement du vouloir qui lui est lié.

« Il me semble de plus en plus que le philosophe, étant nécessairement l'homme de demain ou d'après-demain, s'est de tout temps trouvé en contradiction avec le présent; il a toujours eu pour ennemi l'idéal du jour.

Tous ces extraordinaires pionniers de l'humanité qu'on appelle des philosophes et qui eux-mêmes ont rarement cru être les amis de la sagesse mais plutôt des fous déplaisants et de dangereuses énigmes, se sont toujours assigné une tâche dure, involontaire, inéluctable, mais dont ils ont fini par découvrir la grandeur, celle d'être la mauvaise conscience de leur temps.

[...] En présence d'un monde d'« idées modernes » qui voudrait confiner chacun de nous dans son coin et dans sa « spécialité », le philosophe, s'il en était encore de nos jours, se sentirait contraint de faire consister la grandeur de l'homme et la notion même de la « grandeur » dans l'étendue et la diversité des facultés, dans la totalité, qui réunit des traits multiples ; il déterminerait même la valeur et le rang d'un chacun d'après l'ampleur qu'il saurait donner à sa responsabilité.

Aujourd'hui la vertu et le goût du jour affaiblissent et diluent le vouloir, rien n'est plus à la mode que la débilité du vouloir. Analyse thématique succincte Deux thèmes généraux sont abordés par les deux paragraphes du texte. • La vocation constante du philosophe dans toute la tradition (« être la mauvaise conscience de [son] temps »). • L'application de cette vocation au « monde moderne » et aux tendances néfastes qui s'y manifestent. Thèse centrale La fonction critique traditionnelle du philosophe, qui le situe toujours en rupture avec les préjugés de son époque, doit le conduire aujourd'hui tout à la fois à contester l'enfermement à courte vue dans la spécialisation et à combattre l'affaiblissement du vouloir qui lui est lié. Construction du texte Les deux paragraphes correspondent à deux moments, qui s'articulent selon un passage du plus général au plus particulier : du statut général de la critique philosophique à sa mise en oeuvre particulière dans l'approche des tendances du monde moderne, ou de l'idéologie qu'il développe, il y a un enchaînement direct. • Le premier paragraphe précise les traits de la figure du philosophe comme « mauvaise conscience de [son] temps » : — décalage par anticipation (« l'homme de demain ») ; — homme de progrès (« pionniers de l'humanité ») ; — distance paradoxale qui peut être saisie comme « folie » ou « énigme » dès lors que les préjugés familiers sont niés par les philosophes. • Le deuxième paragraphe explicite l'impact de la critique nécessaire du philosophe, en pointant les tendances du monde moderne qui paraissent néfastes : — la spécialisation aliène l'homme à un point de vue trop particulier ; — la régression de la responsabilité, liée à la perte du point de vue du tout, est ce qui doit être combattu avec énergie ; — l'affaiblissement du vouloir, comme symptôme du processus général, est lui aussi mis en cause par Nietzsche. NIETZSCHE (Friedrich-Wilhelm).

Né à Rocken en 1844, mort à Weimar en 1900. Il fit s e s é t u d e s à l ' é c o l e d e P forta, puis, renonçant à la carrière ecclésiastique, il les termina aux Universités de Bonn et de Leipzig.

La lecture de Schopenhauer et la rencontre avec Wagner sont les événements capitaux de cette période.

En 1868, Nietzsche est nommé professeur de philologie grecque à l'Université de Bâle ; il conserva ce poste jusqu'en 1878, date à laquelle il fut mis en congé définitif pour raisons de santé.

C ommence alors la série des voyages de Nietzsche en Italie : Gênes, l'Engadine, Rapollo, Nice, la Sicile, Rome, V enise, lisant Empédocle, jouant C hopin et Rossini.

Il découvrit Stendhal et Bizet.

Il passe les mois d'été à Sils-M aria, dans une petite chambre, face à la montagne.

C 'est à Turin, en janvier 1889, qu'il fut terrassé dans la rue par une crise de démence, probablement d'origine syphilitique, et qui se termina par la paralysie générale.

Ramené à Bâle, Nietzsche dut être interné quelque temps dans une maison de santé ; puis, sa soeur l'accueillit auprès d'elle, à Weimar, où il mourut l e 2 5 août 1 9 0 0 .

La philosophie de Nietzsche se caractérise par un amour passionné de la vie.

Ses premiers écrits concernent l'A rt ; reprenant la terminologie de Schopenhauer, volonté et représentation, 'Nietzsche distingue l'art dionysien (musique) : c'est l'exaltation tragique de la vie, l'état où l'homme a tendance à se confondre dans le monde ; et l'art apollinien (arts plastiques) : le principe apollinien est le principe contemplatif.

Le rêve apollinien s'oppose à l'ivresse dionysiaque.

C 'est dans le drame wagnérien que Nietzsche voit la réconciliation de ces deux principes.

Nietzsche fait la critique de la C onnaissance et de l'Histoire.

Si la durée du monde n'a pas de terme, la nature cosmique et humaine, cependant, ne varie pas, et les combinaisons qui constituent le monde sont limitées.

La vie que nous vivons, nous devons la revivre plusieurs fois.

La doctrine nietzschéenne de l'éternité est un éternel retour de l'identique, qui surmonte la temporalité du temps.

Midi est l'instant éternel où le temps, arrêté, devient éternité.

Nietzsche a toujours eu la nostalgie du soleil, de la Méditerranée, de la Grèce.

A près sa brouille avec Wagner, c'est Bizet qui lui semble le plus grand musicien.

Les pages cruelles qu'il a écrites contre les A llemands, les pages enthousiastes sur la civilisation juive, peuvent expliquer que Nietzsche n'ait pas exercé une grande influence, ni philosophique, ni littéraire, sur les A nglo-Saxons.

Brandès et d'A nnunzio furent les premiers à saisir l'importance de la pensée de Nietzsche.

II faut accepter joyeusement la vie, et la volonté et l'imagination permettent seules d'échapper au pessimisme schopenhauerien, qui a profondément marqué Nietzsche.

L'homme doit donner éternité à l'instant, saisir à la fois le passé et le futur, supratemporellement et surhumainement.

La tentative de Nietzsche fut d'enseigner « une nouvelle éternité ».

L'homme doit se transformer en un être supérieur : le Surhomme (Ubermensch).

Les valeurs vitales, force de la volonté et de la pensée, intensité de la vie, sont exaltées aux dépens des valeurs de la connaissance.

La pitié et la résignation chrétiennes deviennent de fausses valeurs ; la volonté de puissance est la base de la nouvelle éthique. Le national-socialisme s'est emparé, en la déformant, de la pensée de Nietzsche.

Le philosophe de Sils-Maria fut surtout moraliste et poète.

Ses livres sont, le plus souvent, une suite d'aphorismes ou de paragraphes ayant chacun un titre.

Le style est fulgurant.

Nietzsche a dit lui-même qu'il brûlait « au feu de sa propre pensée », et qu'il n'écrivait plus avec des mots, « mais avec des éclairs».

L'influence de Nietzsche fut et demeure considérable.

Heidegger voit en sa pensée l'achèvement logique de toute la métaphysique occidentale.. »

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