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L'imagination enrichit-elle la connaissance ?

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« ANALYSE DU SUJET Bien saisir : — d'une part que la réponse à la question va dépendre avant tout de l'appréhension que l'on peut se faire de ce qu'est imaginer ; — d'autre part de ce que peut être « une fonction de connaissance ».

(Différencier, par exemple, la fonction comme ce qui règle de la fonction comme ce qui motive ou ce qui permet certaine attitude vis-à-vis de la réalité, y compris notre « réalité mentale ».) [Introduction] En termes classiques, l'imagination est volontiers opposée au réel, au monde tel qu'il est.

Or, c'est bien ce dernier que vise la connaissance.

Si l'on en reste là, il semble difficile d'admettre que l'imagination pourrait enrichir la connaissance ellemême ; pire : elle semblerait capable de la perturber, ou d'empêcher son élaboration.

Peut-être une conception plus subtile des relations entre l'imaginaire et le réel permet-elle d'entrevoir un autre rapport. [I.

Reproches classiques adressés à l'imagination] a.

Elle nous éloigne du réel (il suffit de rappeler que l'image est traditionnellement dévaluée depuis Platon : du côté de la simple apparence, elle manque évidemment de réalité, de densité ontologique). b.

Elle risque de nous égarer dans l'illusion, le rêve, l'élaboration de songeries trompeuses (on peut se référer à Descartes : le malin génie serait celui qui m'oblige à imaginer ce qui n'est pas : mon corps, les objets que je crois percevoir.

etc.). Dans la sixième Méditation, Descartes observe qu'il est possible d'imaginer un triangle, c'est-à-dire de se le représenter à l'esprit, bien présent et réel, mais qu'il est impossible d'imaginer un "chiliogone", figure géométrique à mille côtés.

La conception ou l'intellection de n'importe quelle figure est possible et se fait sans difficultés, il suffit d'en produire la définition. L'imagination se trouve rapidement limitée dans sa puissance de représentation.

Fort utile pour se représenter les choses corporelles ordinaires de la vie, elle se fait vite confuse et approximative si on veut la comparer à la précision et à la distinction des concepts.

L'imagination peine quand la conception est encore rapide et aisée.

Mais dans le Discours de la méthode, Descartes reconnaît à l'imagination une puissance supérieure à la raison : "Comme dans le silex, il y a en nous des semences de science : les philosophes les tirent au jour au moyen de la raison, tandis que par le moyen de l'imagination, les poètes les font jaillir et jeter une plus claire lueur." c.

Elle m'éloigne de toute action efficace, puisque, sur ce qu'elle me propose, il n'y a pas d'action possible.

Dans cette optique, elle serait en contradiction avec l'élaboration de la connaissance, puisque cette dernière cherche à percer les secrets du « réel » — et ce n' est évidemment pas en abandonnant ce dernier que je peux avoir la moindre chance de le connaître. [II.

Imagination et connaissance du monde] a.

Référence à Bachelard : l'imagination est une activité combinatoire, qui correspond de la sorte à la recherche d'autres formules possibles de ce qui est déjà repéré ou expérimenté ou connu. Selon Bachelard, l'imagination n'est pas « la faculté de former des images, elle est plutôt la faculté de déformer les images fournies par la perception, elle est surtout la faculté de nous libérer des images premières, de changer les images ».

Elle est une puissance foncièrement dynamique et organisatrice qui travaille à déréaliser le réel atteint dans la perception en le destructurant pour opérer une structuration nouvelle, en sorte qu'en elle l'univers tout entier n'est plus donné au sujet, mais produit, inventé par lui.

Elle est « l'expérience même de l'ouverture, l'expérience même de la nouveauté ». b.

C'est bien, par exemple, l'imagination qui élabore le projet : ce dernier est d'abord de l'irréel, non présent actuellement dans le monde, il définit un futur possible en faisant échapper la pensée au monde seulement présent : — dans la technique : l'invention de tout nouvel outil implique une utilisation différente d'éléments déjà donnés, qui ne se manifeste d'abord que comme image mentale (puis dessinée, de manière de plus en plus précise) ; — dans l'activité scientifique elle-même, c'est l'imagination qui suscite l'hypothèse scientifique (« explication anticipée » selon Claude Bernard : cette anticipation signifie bien qu'il s'agit d'une explication qui est d'abord «irréelle », purement mentale).

C'est encore elle qui articule de façon nouvelle les concepts pour élaborer de nouvelles explications théoriques (qui, bien entendu, exigeront ensuite d'être vérifiées : il ne s'agit pas de ramener tout le comportement scientifique du côté de la seule imagination).. »

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