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Rôle de l'imagination dans la connaissance de soi ?

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« Introduction. N'y a-t-il pas paradoxe à parler du rôle de l'imagination dans la connaissance de soi, puisque selon le mot de Pascal l'imagination est « maîtresse d'erreur et de fausseté »? Nicole (De la connaissance de soi, p.

12) professe la même opinion, mais il ajoute : « L'homme veut se voir parce qu'il est vain; il évite de se voir, parce qu'étant vain, il ne peut souffrir la vue de ses défauts et de sa misère.

» C'est une contradiction dialectique.

Bien voir qu'il ne s'agit pas de dire que l'imagination produit des oeuvres à travers lesquelles on peut se connaître, mais qu'il s'agit de se demander si l'imagination aide à se connaître directement. I.

Maîtresse d'erreur et de fausseté. L'imagination déforme la représentation que nous nous faisons de nous-même, souvent en l'embellissant (Madame Bovary, Tartarin).

On retrouve Nicole : « Pour accorder ses désirs contraires, l'homme a recours à un artifice digne de sa vanité, par lequel il trouve moyen de les contenter tous deux en même temps : c'est de couvrir d'un voile ses défauts, etc..

» Nicole dénonce aussi un second artifice : joindre à l'idée confuse qu'on se fait de soi comme sans défaut : « tout ce qu'il (l'homme) peut trouver des choses extérieures qui lui donnent une image fantastique de grandeur » (ibid., pp.

16 et 17). D'ailleurs il arrive aussi que l'imagination déforme notre image en l'enlaidissant : c'est le cas des scrupuleux.

Le jugement que nous portons sur nous-même flotte, du fait de l'imagination, entre la confiance et l'abattement. II.

Mais peut-on se passer de l'imagination pour se connaître? Il serait souhaitable de l'éliminer si on se place à un point de vue froidement scientifique. Mais si l'on se place dans les conditions de la vie quotidienne on s'aperçoit que la connaissance de soi est recherchée en vue de ses enseignements pour le futur : la conscience veut essayer de se connaître pour agir, veut faire un bilan de soi et un examen de ses possibilités pour savoir si elle est capable de s'engager dans une voie qui s'ouvre devant elle. Même d'un point de vue strictement utilitaire, il faut éviter de se tromper.

Or, pour penser à ce futur, nous n'avons qu'un recours, l'imagination : nous projetons l'image de nous-même dans les situations d'avenir pour voir si nous ferons l'affaire. L'imagination est le seul moyen mis à notre disposition; il faut en accepter les inconvénients comme les avantages. Les inconvénients peuvent être réduits; à la limite, ils ne peuvent être détruits.

Cela tient à la nature prospective de la connaissance de soi. III.

L'imagination, faculté de se voir. Mais il.

y a un autre aspect de l'imagination : c'est elle qui nous donne l'image de nous-même comme d'un petit personnage sur l'écran ou la scène intérieurs.

Nous nous dédoublons, et en quelque sorte pouvons nous étudier nous-même du dehors; ainsi l'imagination qui entachait de subjectivité la connaissance de soi devient-elle au contraire facteur d'objectivité. Conclusion. Nous avons trois formes d'imagination : — une imagination qui s'applique à l'impossible; — une imagination qui s'applique au futur ; — une autre qui s'applique au passé. La première est mensongère, la seconde représente une hypothèse de la conscience sur soi, tournée vers le futur, la troisième en récapitulant les actes décousus du passé, permet de se connaître comme un personnage un, de même que l'on connaît autrui. Peut-on exclure la première, qui semble néfaste, pour ne garder que les deux autres, qui sont bénéfiques ? Certainement pas, car les trois fonctions sont solidaires : il n'y a pas de différence pour la conscience entre le futur et l'impossible tant que le futur n'est pas réalisé, l'imagination du futur restant conjecturale, on ne peut garantir qu'elle ne conjecture pas l'illusion plutôt que le futur, « d'autant plus fausse qu'elle ne trompe pas toujours », comme dit Pascal, à qui il faut revenir après nous en être écartés.

Il y a une ambiguïté fondamentale de l'être humain : du fait même qu'il se fait, il ne peut en toute rigueur se connaître; dans l'estimation de ce qu'il se fait, l'idée de ce qu'il veut être entre toujours, mais ce futur imaginé peut être chimérique.

L'être humain ne peut jamais se connaître parce qu'il n'est jamais achevé, sauf au moment de sa mort; nous ne pouvons faire notre propre bilan : il faut que Quelqu'un le fasse pour nous.. »

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