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L'existence est-elle irréductible au concept ?

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« La question qui nous est soumise interroge les rapports entre l'existence et le concept, autrement dit entre l'être et la pensée.

Le problème est de savoir si l'existence est irréductible au concept ; or, que signifie le fait de réduire l'existence au concept, l'être à la pensée, la chose à l'idée ? Cela indique d'abord que l'on pourrait tirer l'existence du concept, déduire sa présence de l'idée elle-même.

Contre cette prétention, Kant va faire valoir le statut propre de l'existence, hétérogène par définition à la pensée.

Cependant, le concept se réduit-il à l'idée que l'on se fait des choses ? Pour Hegel, nous le verrons, le concept désigne le savoir lui-même.

En ce sens, il épouse parfaitement les contours de l'être, au point de se confondre avec lui. I – Kant : la critique de la preuve ontologique Kant, dans la Critique de la raison pure (1781), s'attaque à l'idée selon laquelle l'existence serait réductible au concept.

Pour ce faire, il entreprend l'analyse de la notion d'existence et s'intéresse à ce que la tradition philosophique appelle la « preuve ontologique », qui consiste à démontrer l'existence de Dieu à partir de son concept.

Cette preuve se formule de la manière suivante : Dieu est par définition un être parfait, autrement dit, il enferme toutes les perfections dans son essence ; or, l'être est une perfection ; si Dieu devait ne pas être, il ne serait pas parfait, ce qui est contradictoire, donc Dieu existe. L'argument repose sur le passage insensible du concept de Dieu à l'existence de Dieu ; en effet, le concept de Dieu, sa définition ou son essence nous le présente comme parfait.

Si le concept n'était pas tel, ce ne serait pas celui de Dieu.

Or, s'il venait à manquer quelque chose à ce concept, il ne serait pas parfait.

S'il venait à lui manquer une perfection, ce concept n'aurait rien d'achevé et ne s'appliquerait pas à Dieu.

Comme l'existence est une perfection, car l'être est supérieur au non-être (ne pas être étant signe d'une impossibilité à être), elle ne peut manquer à Dieu qui, par voie de conséquence, existe. Toutefois, selon Kant, cette argument repose sur deux erreurs : premièrement, pour qu'un concept soit pensable, il faut qu'il ne soit pas contradictoire.

Je ne peux pas penser le concept d'homme, si j'affirme que j'entends par-là un être qui n'a pas de langage.

Or, l'absence du prédicat « existence » dans le concept « Dieu » n'implique pas contradiction.

Cela tient à la seconde erreur, qui confond l'existence avec une perfection.

Examinons ces deux erreurs. 1° Si la contradiction peut ruiner un concept, elle n'est pas pour autant signe de l'existence.

Par exemple, je sais que le concept de triangle implique de penser trois angles ; si ce n'est pas le cas, mon concept est absurde et contradictoire.

Cela dit, je peux penser sans contradiction que le triangle en question et ses trois angles n'existent pas.

Ce n'est donc pas parce que le concept de triangle implique trois angles, qu'un triangle existe.

De même, ce n'est pas parce Dieu enferme de manière non-contradictoire l'existence, qu'il existe forcément. 2° L'existence n'est pas une perfection, cela signifie qu'elle n'ajoute rien au concept.

En effet, si je prends, d'un côté, cent euro imaginaires et, de l'autre, cent euro réel.

Quand je songe à leur concept, le fait que les uns existent et les autres non ne change rien à ce concept.

Ajouter l'existence revient seulement à la constater, mais cent euro réel n'en valent pas pour autant plus que cent euro.

L'existence n'ajoute rien au concept, elle est juste l'existence. Kant résume très bien cela en disant que l'existence est « l'absolue position d'une chose », autrement dit, l'existence se rencontre.

Je dois toucher, sentir ou voir une chose pour savoir si elle existe.

L'existence n'est alors en rien déductible d'un concept. Pour Descartes, la première vérité est l'existence de ma conscience.

C'est donc à l'intérieur même de la pensée qu'il faut rechercher l'effet qui postule Dieu comme cause.

La première preuve avancée par Descartes est la suivante : Dieu possède toutes les perfections, or l'existence est une perfection, car un être sans existence est nécessairement imparfait.

Donc nous devons aussi compter parmi les perfections de Dieu donc il faut que Dieu existe (« Discours de la méthode », IV et « Méditations métaphysiques », III). Cette preuve est, au fond, la formulation originale de l'argument ontologique de Saint Anselme (XI ième siècle).

Elle avait été critiquée par Gaunilon.

Kant la critique aussi dans la « Critique de la raison pure ».

Pour Kant, les preuves de l'existence de Dieu sont des niaiseries.

Il n'est pas possible de prouver l'existence d'un être transcendant.

Il est impossible de connaître un être qui nous dépasse.

Dans l'argument ontologique, le premier concept, ce n'est pas Dieu mais l'idée de Dieu.

Si nous disons Dieu, nous supposons qu'il existe avant même de le démontrer.

L'idée de Dieu est l'idée d'un être qui possède toutes les perfections.

Or, un être parfait est un être qui existe, donc l'idée de Dieu existe.

Il s'agit pour Kant d'un jugement analytique du type : un tri-angle a trois angles.

Un tel jugement n'ajoute rien à l'idée de triangle.

Le prédicat est contenu dans le sujet.

Les propriétés du triangle sont contenues dans le concept même de triangle.

L'argumentation de Descartes reste donc au niveau des idées. La preuve ontologique n'est qu'une misérable tautologie.

Pour Kant le concept n'est qu'une possibilité logique mais on ne peut pas conclure de la possibilité logique des concepts à la possibilité réelles des choses.

Autrement dit, de l'idée d'un Etre parfait, j'ai bien le droit de conclure à l'idée que l'existence doit lui appartenir, mais nullement à son existence elle-même.

Dans la preuve cartésienne, le passage à l'existence, du Logique à l'Ontologique est indu.

Le concept est toujours possible quand il n'est pas contradictoire.

Ainsi, par exemple, le concept de carré est possible si je ne lui attribue pas deux prédicats contradictoires.

A contrario, « poser un triangle en en supprimant les trois angles est contradictoire », mais si je fais disparaître à la fois le triangle et les trois angles, « il n'y a plus là de contradiction ».

Il en est exactement de même du concept d'un être absolument nécessaire.

Si vous lui ôtez l'existence, vous supprimez la chose avec tous ses prédicats : « Si je supprime le prédicat d'un jugement en même temps que le sujet, il ne peut jamais en résulter une contradiction interne ».

Ainsi , pour Kant, l'existence ne peut se constater que par la voie. »

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