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Les oeuvres d'art font-elles partie du monde ?

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« Cette question sous-entend que les œuvres d'art feraient partie d'un autre monde que le nôtre ? Qu'est-ce à dire ? Notre monde est celui du quotidien, de l'utilité, des objets, les œuvres d'art auraient dans cette mesure des finalités plus hautes que notre quotidien, elles entretiendraient entre elles des rapports dans une sphère supérieure.

Cet autre monde pourrait être celui du sacré, du rare, de l'inestimable, mais est-ce encore une réalité à l'heure d'un marché de l'art en expansion, de la consommation des biens culturels, de l'art contemporain qui n'a de cesse de récupérer les objets de la vie quotidienne dans ces œuvres. 1) Les œuvres d'art font partie d'un autre monde : elle font partie d'un monde sacré. L'expression de l'intelligible dans le sensible ne peut suffire à faire de l'œuvre d'art quelque chose de sacré. Heidegger pense que l'œuvre d'art est dévoilement de la vérité de la chose.

L'œuvre installe un monde, ce n'est pas elle qui est installée.

L'œuvre rayonne, elle a une aura.

Ce qui donne le sacré de l'œuvre d'art, c'est « l'ici et le maintenant » de la véritable présence de l'œuvre d'art.

Il se fait souvent un silence quasi religieux face à une œuvre d'art digne de ce nom.

A l'exemple du romantisme qui a voulu rénover le sentiment religieux, la peinture de Caspar David Friedrich, Le retable de Tetschen, peinture de paysage représentant un Christ sur une montagne éclairée par le soleil Une œuvre d'art ne mérite pas un discours mais une prière car la contemplation d'une peinture élève notre âme vers Dieu.

La contemplation esthétique est une expérience intime d'union avec l'esprit du Créateur.

Cette pensée qu'on pourrait appliquée au Retable exprime ce désir d'union de la nature, de l'art et de la religion en vue d'une certaine totalité 2) Les œuvres d'art font partie du monde : elles sont des objets d'échange comme les autres. De Ricardo à Marx, en passant par Stuart Mill, les économistes ont reconnu le statut économique particulier de l'œuvre d'art, en relation étroite avec le caractère unique de l'œuvre.

Son prix n'a pas d'autre limite que celle du désir et du pouvoir d'achat des acquéreurs potentiels.

Il s'agit, dans l'acception marxiste du terme, d'un prix de monopole.

Le produit ne devient réellement produit (l'ouvrage de l'artiste ne devient réellement œuvre d'art, le producteur ne devient réellement artiste) que dans et par la consommation, laquelle anime en outre la production en reproduisant le besoin et en posant idéalement l'objet de la production sous forme, comme l'écrit Marx, d'image préalable, de mobile, de but.

Et c'est la distribution, encore, qui investirait l'objet, par-delà sa valeur d'échange, et par le moyen de l'achat, de la spéculation, de l'enchère, de la mise en réserve, d'une valeur de signe dont il emprunterait son prestige, sa légitimité.

Dans le marché de la peinture ancienne, où dominent les éléments monopolistiques, on atteint, dans le cas idéal, typique de la limitation absolue de l'offre, des sortes de sommets économiques.

La rareté du chef-d'œuvre unique du génie unique est la rareté la plus rare, et la plus chère, parmi les raretés socialement désignées comme artistiques.

Elle est aussi la plus résistante aux aléas de la conjoncture.

La notion de valeur refuge l'emporte, dans le marché de l'art ancien, sur celle de valeur spéculative – même si la tenue des prix, dans les zones marginales, n'est pas indépendante de la révision périodique de la hiérarchie des valeurs artistiques et des caprices du goût.

Les œuvres d'art ne peuvent se prévaloir d'un statut différent qui les exclurait du monde des choses quotidiennes. 3) les œuvres font partie de notre monde, elles en sont issues. Les premières œuvres de Marcel Duchamp qui ont marqué ont été les ready-Made, véritable objet de la vie quotidienne récupérés, et simplement décontextualisés et élevées au rang d'œuvre d'art.

Un porte-bouteille, une roue de vélo, un bidet.

On peut imaginer que par là s'amorce une rupture avec toute définition traditionnelle de l'art, de l'art conçu comme un objet, un artefact conçu des mains de l'artiste, de l'art comme création.

La récupération amorcée par les Nouveaux Réalistes et dans un forme différente par le pop art laisse imaginer que tout peut rentrer dans le domaine de l'art, qu'il n'y plus de critère discriminant pour distinguer une œuvre d'art d'un objet non esthétique.

Des artistes comme Arman, César reprend des éléments de la vie quotidienne dans des compressions, des réarrangements avec notamment des poubelles, des déchets, des voitures.

Le pop art par le biais de Warhol fait rentrer des boites de conserve, d'emballage dans le domaine de l'art.

Aussi, c'est le regard de l'artiste qui fait d'un objet quelque chose d'artistique, qu'il lui donne une signification.

Ainsi n'importe quel objet vu par un photographe peut devenir artistique, comme chacun selon Warhol peut avoir son quart d'heure de célébrité.

Tout est nivelé, il n'y a plus de supériorité de objets sur les autres au risque de l'insignifiance.

On ne peut plus distinguer les œuvres d'art des objets quelconques.

Un simple changement de contexte suffit, mais sinon la différence peut être imperceptible. Conclusion. Les œuvres d'art font partie du monde dans la mesure où elles peuvent être des objets d'échange comme les autres, qu'elles peuvent être fabriqué à partir d'objets issus de la vie quotidienne.

Elles font partie du monde dans la mesure où nous cohabitons avec elles par le biais des reproductions des œuvres d'art et qu'elle tiennent une place dans la vie sociale.

Les placer dans un autre monde revient à adopter une position mystique vis-à-vis d'elles, de croire à leur origine non- humaine ce qui n'est pas le cas.. »

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