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Le mensonge est-il toujours condamnable ?

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« Introduction Le mensonge se définit comme l'acte de langage consistant à faire une déclaration intentionnellement fausse.

II n'y a de mensonge que par la connaissance du vrai, jointe à la volonté délibérée de cacher cette vérité et d'abuser autrui.

Le mensonge suppose donc la vérité connue et, à ce titre, s'oppose à la véracité. Que le caractère de devoir attaché à la véracité ne puisse être contesté, doit-il nécessairement en résulter que le mensonge soit toujours condamnable ? Rien n'est moins sûr, à l'épreuve de la réflexion, c'est-à-dire dès lors que l'on distingue, au sein d'une sorte de « typologie » du mensonge, différents motifs de dissimuler la vérité.

Si le mensonge peut en effet nuire à autrui, ne peut-il parfois considérer son intérêt, ou encore vouloir épargner sa souffrance ? Le mensonge n'est pas seulement de méchanceté ou de cynisme ; il peut être de politesse, ou de charité.

Dans ces conditions, seule une analyse différentielle des motifs permettra de répondre à la question : y a-t-il un droit de mentir ? I — Le mensonge légitime comme remède a) Dès l'antiquité, le mensonge est dénoncé par la plupart des philosophes, au profit de la sincérité, que Platon définit comme « une disposition naturelle à ne point admettre volontairement le mensonge, mais à le haïr et à chérir la vérité » (République, VI, 485 c-d).

Le mensonge est « également détesté des dieux et des hommes » (République, II, 382 c). b) Pourtant, cette condamnation de principe souffre quelques exceptions : ainsi, Platon justifie-t-il le recours, par les gouvernants, à des « fables » destinées à maintenir l'ordre dans la cité.

Ces fables, au sens strict du mot, ne seront pas considérées comme de « vrais » mensonges : « il y a chance que nos gouvernants soient obligés d'user largement de mensonges et de tromperie pour le bien des gouvernés ; et nous avons dit quelque part que de pareilles pratiques étaient utiles sous forme de remèdes » (République, II, 459 c-d). c) Mais il peut encore exister un droit de mentir, qui, paradoxalement, vise à préserver l'unité des relations entre les hommes ; l'imposture et la fourberie brisent ce lien, et doivent donc être combattus avec les mêmes armes.

Toute victime d'un abus de force ou d'une injustice est ainsi fondée à se défendre par le mensonge.

Schopenhauer, par exemple, estime que je puis « selon les circonstances, opposer à la violence d'autrui la ruse ; je n'aurai pas en cela de tort ; en conséquence, je possède un droit de mentir, dans la même mesure où je possède un droit de contrainte » (Le Monde comme volonté et comme représentation, § 62, P.U.F., Paris, 1966, p.

428). II— Le devoir de véracité absolue Mais la justification politique du mensonge reste au seuil de toute analyse morale.

La relation entre gouvernants et gouvernés n'est pas symétrique.

Au contraire d'un tel pragmatisme, l'exigence morale est universelle. a) Si je puis bien, parfois, être tenté de mentir, il m'apparaît néanmoins aussitôt que, comme l'a bien montré Kant, je ne puis en aucune manière vouloir une loi universelle qui commanderait de mentir.

L'universalisation de la maxime du mensonge comporte une contradiction interne : seule la confiance mutuelle rend possible la promesse et, plus généralement, la relation de langage entre les hommes. b) Le mensonge, faute contre la véracité, met en péril le principe du discours qui constitue la vie en commun ; il porte atteinte à la règle de réciprocité soutenant l'exercice du langage comme institution régissant toutes les formes de la communauté.

Le mensonge trahit à la fois l'attente de l'autre et l'institution qui médiatise la confiance mutuelle des sujets parlants. c) Le mensonge est ainsi négation de la personne, puisque, mentant à autrui, je le tiens pour un être dont je puis user comme d'un objet, c'est-à-dire un simple moyen, au bénéfice de mon propre intérêt.

En tant que fin en soi, l'être raisonnable a au contraire droit à la vérité.. »

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