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l'apparence est-elle un mensonge ?

Extrait du document

« Vocabulaire: MENSONGE (n.

m.) 1.

— Assertion qui indique un fait auquel le locuteur ne croit pas, ou exprime une opinion qui n'est pas la sienne ; par ext., assertion contraire à la vérité.

2.

— Menteur (paradoxe du ) : argument sceptique contre la raison et paradoxe logique (auquel la théorie des types* donne une solution) : Épiménide le Crétois dit que les Crétois sont menteurs, donc il ment, mais alors les Crétois ne sont pas menteurs, donc il ne ment pas, mais alors il ment, etc. Apparence: Aspect extérieur d'une chose; façon dont elle se manifeste à nous. Aspect trompeur des choses, par opposition à ce qu'elles sont réellement. Du latin « apparere » qui signifie apparaître, l'apparence, c'est la manière dont une personne ou une réalité se présente à notre vue.

Ce qui apparaît ou se manifeste à nos yeux, c'est l'aspect extérieur d'une chose.

Or, cet aspect peut parfois être trompeur et même s'opposer à la réalité de la chose.

L'apparence peut donc être mensonge, autrement dit s'opposer à la vérité, qui seule fait voir l'être authentique des choses. Le terme d'"apparence" peut prendre deux significations : le sensible d'un côté et les ressemblances de l'autre.

La question porte donc sur le rapport entre ce qui est donné immédiatement — à savoir soit ce qui est perçu, soit, de manière générale, un extérieur — et ce à quoi cet immédiat fait accéder — un objet éventuellement géométrique, à la différence des sens, d'un côté, et de l'autre un intérieur.

Il y a dans "apparence" une dimension d'immédiateté (le "à première vue") et une dimension d'extériorité (on oppose l'apparence extérieure à l'essence intérieure, etc.). L'apparence est-elle un mensonge à cause de nos sens, trompeurs ? Par exemple, Descartes dans la 2e Méditation prend l'exemple de la tour ronde que de loin on voit carrée.

Il y a aussi ce qu'on pourrait appeler la question de l'analogie (Kant, Critique de la faculté de juger, "Analogie de la nature") : je vois un animal qui ressemble à un poisson, j'en déduis qu'il a la structure intérieure d'un poisson.

Mais en même temps, si je ne pouvais jamais faire d'analogie, je ne pourrais jamais relier les animaux, et plus généralement les choses entre elles, donc ni classer ni connaître.

Si mensonge il y a, n'est-il pas utile comme premier pas vers la connaissance ? Pour la question des sens trompeurs, il y a un fait que Descartes oublie et que Husserl soulignera (Idées directrices pour une phénoménologie) : c'est que les sens disposent eux-mêmes de moyens pour se rectifier : j'avance vers la tour et je vois qu'elle est ronde.

L'apparence ne saurait donc être systématiquement trompeuse.

Si elle était toujours trompeuse, il suffirait de ne jamais s'y fier.

Or il arrive qu'elle soit le reflet de la vérité.

Référence utile : Platon, Le Banquet. L'apparence s'oppose à l'être. Platon nous met en garde contre l'art qui n'est qu'une copie de la réalité.

Reste toutefois que, grâce à l'art, la copie demeure alors même que le modèle a disparu.

Mais si le prétendu modèle n'existe plus, n'est-ce pas parce qu'il était lui aussi la copie d'une réalité supérieure, éternelle, immuable? C'est, en tous cas, ce qu'affirme Platon au livre VII de La République : l'homme qui prend ce monde sensible pour la vraie réalité est semblable à ces prisonniers qui, depuis leur enfance, sont enchaînés dans une caverne et prennent les ombres projetées sur la paroi pour la vraie réalité. Ainsi, selon Platon, il existe un autre monde, le monde des Idées par rapport auquel ce monde sensible n'a pas plus de consistance qu'une ombre.

La vérité est du côté des Idées et notre âme ne peut la contempler que si elle se détourne des objets sensibles qui la lient au corps. La philosophie de l'art commence avec Platon par une condamnation.

Il faut renvoyer les poètes hors des murs de la Cité.

Socrate rejette les discours écrits pour privilégier la parole, et la peinture n'est tenue que pour une imitation dégradée et inférieure d'une réalité par ailleurs déjà imitée des Idées.

Par ailleurs, poésie, peinture et musique ne sont pas sensées exprimer la beauté.

Si l'art est condamnable, c'est qu'il est fondé sur la mimêsis, l'imitation.

Les choses sont, et elles sont ce qu'elles sont par l'Idée qu'elles incarnent, qu'elles matérialisent.

L'Idée est l'essence ou l'être vrai de chaque chose.

L'artisan fabrique des ustensiles en vue d'une Idée, il imite le modèle idéal pour en faire une chose.

Pour tout produire de la sorte, il suffirait de promener un miroir tout autour de nous pour restituer l'image exacte des choses.

La "production" artistique se dit poiein : rendre présent.

Le tableau est un miroir, il ne produit pas les choses dans leur être mais dans leur apparence.

L'artisan quant à lui ne produit pas non plus l'être véritable qui est l'Idée, mais un analogon.

Il y a donc trois degrés à considérer : l'Idée, vraie, naturelle, unique, immuable, parfaite et identique à soi ; les choses ou les objets fabriqués par l'artisan, demiourgos qui incarne l'Idée en de multiples exemplaires ; la peinture des choses qui les reproduit dans leur apparence.

L'artiste est donc plus éloigné de la vérité que l'artisan.

L'art est une imitation du réel, non pas en ce qu'il est, mais en ce qu'il apparaît.

Il n'est capable de produire que des simulacres ou des idoles. "Cet artisan dont je parle n'est pas seulement capable de faire toutes sortes de meubles, mais il produit encore tout ce qui pousse de la terre [...], tout ce qu'il y a dans le ciel, et tout ce qu'il y a sous la terre, dans l'Hadès.

Voilà un sophiste tout à fait merveilleux l [...] Si tu veux prendre un miroir et le présenter de tous côtés ; tu feras vite le soleil et les astres du ciel, la terre, toimême, et tous les êtres vivants, et les meubles, et les plantes, et tout ce dont nous parlions à l'instant. Oui mais ce seront des apparences et non des réalités [...] Mais tu me diras, je pense que ce que fait [le peintre, plus que tous les artisans] n'a point de réalité, n'est-ce pas ? et pourtant, d'une certaine manière, le peintre lui aussi fait un lit.

Ou bien non ? Si, répondit-il, du moins un lit apparent. Et le menuisier ? N'as-tu pas dit tout à l'heure qu'il ne faisait point la Forme (eidos), ou, d'après nous, ce qui est le lit, mais un lit particulier ?. »

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