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L'apparence est-elle mensonge ?

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« Le terme d'"apparence" peut prendre deux significations : le sensible d'un côté et les ressemblances de l'autre.

La question porte donc sur le rapport entre ce qui est donné immédiatement — à savoir soit ce qui est perçu, soit, de manière générale, un extérieur — et ce à quoi cet immédiat fait accéder — un objet éventuellement géométrique, à la différence des sens, d'un côté, et de l'autre un intérieur.

Il y a dans "apparence" une dimension d'immédiateté (le "à première vue") et une dimension d'extériorité (on oppose l'apparence extérieure à l'essence intérieure, etc.). L'apparence est-elle un mensonge à cause de nos sens, trompeurs ? Par exemple, Descartes dans la 2e Méditation prend l'exemple de la tour ronde que de loin on voit carrée.

Il y a aussi ce qu'on pourrait appeler la question de l'analogie (Kant, Critique de la faculté de juger, "Analogie de la nature") : je vois un animal qui ressemble à un poisson, j'en déduis qu'il a la structure intérieure d'un poisson.

Mais en même temps, si je ne pouvais jamais faire d'analogie, je ne pourrais jamais relier les animaux, et plus généralement les choses entre elles, donc ni classer ni connaître.

Si mensonge il y a, n'est-il pas utile comme premier pas vers la connaissance ? Pour la question des sens trompeurs, il y a un fait que Descartes oublie et que Husserl soulignera (Idées directrices pour une phénoménologie) : c'est que les sens disposent eux-mêmes de moyens pour se rectifier : j'avance vers la tour et je vois qu'elle est ronde.

L'apparence ne saurait donc être systématiquement trompeuse.

Si elle était toujours trompeuse, il suffirait de ne jamais s'y fier.

Or il arrive qu'elle soit le reflet de la vérité.

Référence utile : Platon, Le Banquet. L'apparence s'oppose à l'être. Platon nous met en garde contre l'art qui n'est qu'une copie de la réalité.

Reste toutefois que, grâce à l'art, la copie demeure alors même que le modèle a disparu.

Mais si le prétendu modèle n'existe plus, n'est-ce pas parce qu'il était lui aussi la copie d'une réalité supérieure, éternelle, immuable? C'est, en tous cas, ce qu'affirme Platon au livre VII de La République : l'homme qui prend ce monde sensible pour la vraie réalité est semblable à ces prisonniers qui, depuis leur enfance, sont enchaînés dans une caverne et prennent les ombres projetées sur la paroi pour la vraie réalité. Ainsi, selon Platon, il existe un autre monde, le monde des Idées par rapport auquel ce monde sensible n'a pas plus de consistance qu'une ombre.

La vérité est du côté des Idées et notre âme ne peut la contempler que si elle se détourne des objets sensibles qui la lient au corps. La réalité que nous connaissons n'est pas la réalité en soi. Cette séparation entre l'être et l'apparence, la vraie réalité et la réalité inauthentique, se retrouve chez Kant qui sépare la réalité nouménale (celle des choses en soi) de la réalité phénoménale (celle que nous connaissons théoriquement).

L'homme ne peut jamais connaître qu'une réalité informée par les formes a priori de sa sensibilité (espace et temps) et les concepts a priori de son entendement (catégorie de la causalité, par exemple).

Certes, chez Kant, l'apparence n'est plus l'ombre de l'Idée et du vrai, mais il y a l'affirmation que le monde que nous connaissons est une vérité élaborée par l'esprit, donc en quelque sorte seconde par rapport à la vérité de la réalité nouménale. L'apparence est l'apparaître même de la vérité. L'opposition entre l'au-delà et l'en-deça, l'affirmation que le réel singulier est une déperdition, la croyance à « l'êtrede-derrière-l'apparition », les grandes Idées, l'idéalisme, tout cela est fortement récusé par Nietzsche qui affirme que l'apparence, loin d'être mensonge, est l'apparaître même de la vérité.

Il n'existe qu'un seul monde et ce monde a valeur et sens.

L'apparence et l'être ou le vrai sont indissociablement liés.

La vérité en sa profondeur se manifeste bien par son apparaître.

L'apparence appartient elle-même à la réalité, elle est une forme de son être.

Les opposition métaphysiques entre l'apparence et le réel, le mensonge et la vérité, ne sont que le symptôme de notre impuissance originaire à supporter un monde qui serait pur chaos, devenir contradictoire, informe et ineffable. Quelques références à utiliser: La dépréciation Platonicienne de l'art. Platon montre que l'image artistique est doublement inadéquate, à la fois à l'être (à l'Idée) et à l'étant (à la chose représentée).

Que l'on compare, pour reprendre l'exemple du livre x, un lit fait par un menuisier, et un lit peint par un peintre.

L'artisan qui veut fabriquer un lit doit se référer en pensée à l'Idée du lit, se soumettre à ce qu'exige un tel ustensile, obéir à ses conditions d'utilisation.

Le peintre pourra se contenter de quelques traits et ombres qui évoqueront un lit.

Il lui suffira pour produire une vue du lit d'en donner une «apparence» (l'apparence de sa matérialité) sans se préoccuper de sa Forme, de son Idée, où se trouve inclus l'usage possible du lit: qu'on puisse s'y allonger.

Pour produire son image, l'artiste n'a pas à remonter à l'Idée.

Mais, en outre, Platon s'appuie sur le postulat réaliste qui veut qu'un lit dont on peut se servir est supérieur à un lit qu'on peut seulement regarder, et encore toujours sous le même angle.

L'art est ainsi condamné comme inadéquat à l'étant, autant qu'à l'être. Mais l'art n'est-il pas au moins respectable sinon admirable parce qu'il est difficile ? Non, rien de plus simple, dit Socrate, que de produire comme le fait un artiste.

Il suffit pour «produire » de cette façon de prendre un miroir et. »

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