Le juste est-il celui qui a raison ?
Extrait du document
«
[Le juste ne peut se tromper puisqu'il se conforme aux règles du droit, lequel est une émanation de la
raison.
Au mépris de ses appétits et de son bien propre, le juste observe exactement les lois.
Il ne fait
en cela que suivre les commandements de la raison.]
Le juste sait distinguer le vrai du faux
Le roi Salomon apparaît, dans la Bible, comme le modèle du juste.
Pour régler le conflit qui oppose deux
prostituées qui se prétendent l'une et l'autre la mère du même enfant, il menace de couper l'enfant en deux
et d'en donner une moitié à chacune.
Or, la première des femmes supplie Salomon de donner l'enfant à
l'autre, plutôt que de le tuer.
Le roi reconnaît là l'expression de l'amour maternel et remet l'enfant à sa vraie
mère.
La raison est la norme du juste
Que fait le juste, sinon examiner soigneusement chaque situation et
suivre en toutes choses la voie que lui indique sa raison ? C'est du
moins ce qu'affirme Platon, qui montre que l'âme du juste est celle
dans laquelle la raison est aux commandes.
Contrairement à l'homme
injuste, qui se laisse parfois emporter par le désir ou la colère, le juste
maintient chacune de ses tendances à la place qui lui revient.
- Il faut savoir être mesuré car l'hybris est destructeur.
Comme le
montrait Platon, République IX 580 d : "Puisqu'il y a trois parties de
l'âme, il me paraît qu'il y a aussi trois sortes de désirs propres à
chacune d'elle, et aussi trois sortes de plaisirs et de commandement" :
ces trois parties sont la concupiscence (epithumia) à avoir le désir
relatif au plaisir du corps, le courage / coeur (thumos), qui est l'ardeur
ou le zèle, et enfin la raison.
Une âme déréglée ne peut harmoniser ses
désirs avec la raison, et l'homme en proie aux dérèglements (c'est-àdire à la non harmonisation de ses désirs) est esclave de lui même et
comme un pantin tiraillé de toutes parts.
Choisir le juste milieu, c'est
orienter ses désirs par la raison qui perçoit ce qui est juste et bien, le
juste étant un équilibre des parties dans lequelle chacune fait ce qui
lui est propre (comme dans une cité où l'harmonie suppose que chacun
accomplisse son action propre et ne quitte donc pas le milieu qui lui
convient).
La loi est issue de la raison
Pour Montesquieu, les lois que les hommes se donnent, loin d'être arbitraires, résultent des «rapports
nécessaires qui dérivent de la nature des choses».
Est ainsi affirmée, contre ceux qui dénoncent la diversité
des conceptions du juste et de l'injuste, la rationalité essentielle de la loi.
Il est donc impossible que le juste
ait tort puisque la justice est l'expression même de la sagesse de l'homme.
[Ce qui est légal peut être illégitime.
Celui qui respecte la loi n'a pas forcément raison.
La justice des
hommes varie en fonction du lieu et de l'époque.
Le juste ne se réfère donc à rien d'autre qu'à ce que
réclament les lois de son pays.]
Le juste est parfois inique
Dans une démonstration magistrale, Aristote souligne la supériorité de l'équité sur la justice.
Il paraît juste de
punir le meurtre; mais, bien que le résultat soit le même, tuer pour voler n'est pas la même chose que tuer
pour se défendre.
Et le juge qui ne tiendrait pas compte des motivations particulières du meurtrier pourrait
prendre une décision certes conforme au droit positif, mais contraire à la raison..
»
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