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Le droit peut-il être injuste ?

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« Définition des termes du sujet: Injuste / Injustice: un mal, ce qui est contraire à la loi, une inégalité. JUSTE : qui est conforme au droit et à l'égalité des personnes. DROIT: a° Un droit: liberté d'accomplir une action (droit de vote); possibilité d'y prétendre ou de l'exiger (droit au travail, droit de grève). b° Le droit: ce qui est légitime ou légal, ce qui devrait être, opposé au fait, ce qui est. c° C e qui est permis par des règles non écrites (droit naturel) ou par des règles dûment codifiées (droit positif). Le droit positif est l'ensemble des règles qui régissent les rapports entre les hommes dans une société donnée.

Le droit naturel est l'ensemble des prérogatives que tout homme est en droit de revendiquer, du fait même de son appartenance à l'espèce humaine (droit au respect). Le droit peut-être défini comme l'ensemble des lois, des décrets, des codes, qui norment le fonctionnement de nos institutions ; le respect du droit garantit le fonctionnement cohérent de celles-ci.

Mais le droit ne constitue-t-il qu'une série de repères, de règles, n'est-il pas aussi lui-même pensé en fonction d'exigences de justice ? A utrement dit, il paraît vraisemblable que le droit soit conçu comme le plus juste possible.

Toutefois, nous verrons que le droit ne saurait se confondre avec la morale, il doit répondre à des impératifs pratiques, économiques, politiques qui ne se concilient pas nécessairement avec les valeurs morales de justice. I- Le droit, une garantie de justice. Aucune justice n'est possible hors d'un Etat de droit ; dans Du Contrat social, Rousseau montre que la seule politique qui vaille, hors de toute législation, c'est celle de la force.

Un Etat sans droit, ou, au sein duquel le droit n'est plus respecté, est un Etat profondément injuste où règne la loi du plus fort.

Le droit est censé annuler le privilège de la force et imposer à chacun les mêmes règles.

Le droit permet du moins de ne pas exclure tout à fait les plus faibles de la société, on peut penser par exemple aux quotas de personnes handicapées que les entreprises d'une certaine taille sont tenues d'embaucher sous peine d'amende. Un Etat de non-droit n'a aucune stabilité, comme l'a montré Hobbes dans Le Léviathan, le plus fort ne parvient jamais à instaurer un ordre permanent, il se fait tuer par de plus faibles mais plus rusés.

Un Etat de non-droit est synonyme d'anarchie.

Le droit permet donc de normer l'action de chacun, ou du moins de l'encadrer, de donner à chacun des repères.

Le droit pose donc des jalons, des codes (code du Travail, de la Famille, de la Santé publique…).

Bref, il est la garantie d'un certain ordre social, d'une certaine cohérence des institutions. Mais, cette cohérence n'est pas purement formelle, elle est censée être la plus juste possible.

Ainsi, le droit du travail garantit aux salariés le droit des conditions de travail correctes ; les lois discutées à l'Assemblée nationale sont censées répondre aux attentes des citoyens, ou, du moins, les servir.

Des avancées sociales, vers plus de justice, n'ont été permises que par le vote de lois (lois sur la pilule contraceptive, l'avortement volontaire). II- Le droit n'est pas la morale Toutefois le droit ne saurait être confondu avec la morale, celle-ci est juste par définition, tandis que le droit n'a pas la justice pour fin unique.

La morale est un système de valeurs qui permet d'appréhender le bien, le mal, de juger du bien-fondé de nos actions.

Une morale injuste est une contradiction dans les termes.

La morale n'a d'autre critère que celui de normer nos actions en fonction de ce qui semble le plus juste. Mais disposer d'une morale ne nous dispense pas de la nécessité de recourir au droit ; en effet, le droit est une valeur politique : on peut contraindre ou sanctionner ceux qui ne le respectent pas.

Le droit norme nos comportements publics, au sein des institutions et de la société, tandis que notre rapport avec la morale est d'ordre privé, personnel.

La morale repose sur des principes, mais il n'existe aucun tribunal qui permette de la faire respecter, c'est qu'elle ne vise pas, comme le droit, au bon fonctionnement de la société. Le droit doit donc répondre à d'autres impératifs que celui de satisfaire un désir de justice, il diffère radicalement de la morale, qui reflète un ordre de valeurs idéales.

Les juristes qui travaillent à écrire le droit ne sont pas des moralistes, ils sont spécialistes dans leurs domaines et savent quels sont les critères qui doivent être imposés afin de rendre leur activité plus cohérente.

Tandis que la morale a une prétention à valoir universellement, le droit est une affaire régionale, le conseil de l'ordre des médecins est composé de praticiens, le tribunal des prud'hommes de spécialistes en droit du travail. I I I - Le droit peut être injuste Parce qu'il est tenu de satisfaire d'autres exigences que celles de l'ordre moral, le droit peut donc, de manière contingente (c'est-à-dire non pas à dessein) être injuste.

Le droit est trop général pour être juste : les textes ne peuvent prendre en compte toutes les particularismes, les circonstances atténuantes qui reviennent à chacun.

Si l'on appliquait le droit sans délai, c'est-à-dire sans la médiation d'un arbitre (un magistrat), les décisions pénales seraient toujours injustes.

La nécessité de la présence d'un juge, qui adapte la loi, l'interprète selon le cas étudié, prouve que la loi n'est pas en soi et d'emblée juste.

Le droit ne se confond ni avec la morale ni avec la justice, il est bien plus pratique que spirituel. Les lois votées, les décrets, les codes, ne sont pas destinées à répondre aux seules exigences morales de la société ; le droit peut parfois refléter bien davantage des intérêts économiques que moraux.

C ertains souhaitent par exemple assouplir le droit du travail afin de tirer un plus grand profit du corps ouvrier ; or, un tel souhait exprime une volonté économique et non pas morale.

Le droit peut donc être injuste, Marx par exemple dénonçait ce qu'il appelait le « droit bourgeois », un ensemble de règles, privilégiant les intérêts de la bourgeoisie. Le droit est donc au carrefour d'une série d'impératifs : politiques, économiques, culturels, sociaux, moraux.

Il est naïf de penser que le droit serait toujours juste, la dangerosité d'un tel présupposé est évidente : cela reviendrait à s'interdire de modifier une mauvaise loi.

Le droit est donc moins symptomatique d'un ordre moral et de justice que de la vie politique, économique et culturelle d'un Etat. Conclusion : Le droit garantit un pas vers la civilisation ; selon Alain, il ne rend pas la paix possible, mais c'est la paix qui rend le droit possible, toutefois, la paix ne se conserve-t-elle pas que si, ensuite, on s'emploie à faire respecter le droit ? Le droit fonde la cohérence de nos institutions et norme nos conduites publiques.

Cependant, comme on l'a vu, le droit n'incarne pas une visée unilatéralement morale.

S'il cherche à garantir un ordre juste, ce peut être un ordre économique et non pas nécessairement moral.

Le droit peut donc se révéler injuste, la disproportion des peines par rapport aux actes commis, dans le cadre du droit pénal, sert depuis longtemps de principe dissuasif.

Si le droit est donc injuste, ce n'est donc pas forcément par accident.. »

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