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l'amour s'oppose-t-il a la raison ?

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« Quand on oppose deux concepts, différents par essence, il est parfois difficile de trouver un point de coïncidence entre les deux.

Il suffit de comparer les champs lexicaux de l'amour et celui de la raison l'amour est ivresse, sentiment, passion, elle vient du cœur.

La raison est calcul, ordre, organisation, elle peut être aussi saisie directe de l'être en soi, elle vient de l'intelligence.

Plutôt que de chercher des coïncidences, il faudrait plutôt chercher une certaine complémentarité dans la perception qu'à l'homme de ses propres réalités. 1)Un amour qui mène à la raison : l'amour platonique ? La conception platonicienne de l'amour se trouve exposée dans Le Banquet comme processus de désindividualisation et de désappropriation sensible. L'érotique se présente comme une démarche ascétique où tout attachement apparaît comme contradictoire, de telle sorte qu'il appelle un dépassement.

En effet, toujours désirant et inquiet, l'amour constitue une élévation qui, de degré en degré, passe d'un beau corps à tous les beaux corps, des belles formes à la beauté de la conduite et des connaissances.

Ainsi, au terme de la progression se trouve atteint et aimé le beau en soi.

L'amour platonique rejoint la dialectique platonicienne, dont il n'est qu'un analogue : il fait découvrir à l'âme que la beauté sensible est le reflet spéculaire de la beauté réelle.

C'est donc une sorte d'exercice spirituel, hâtant le retour de l'âme à son véritable lieu.

L'amour est ainsi un moyen de s'évader du sensible : sa vérité, c'est l'amour intellectuel, l'amour philosophique, qui est tout au service de la saisie de l'intelligible.

Pourtant, si l'érotique est universalisable, il n'empêche que le philosophe, toujours prêt à refaire le chemin, semble très sensible aux attraits particuliers d'un disciple.

Mais cette tendresse n'est jamais exclusive ni jamais refermée sur elle-même.

L'amour platonique en ce sens ne refuse pas l'érotisme comme tel, mais seulement l'érotisme aliénant qui s'oppose à son dépassement.

L'introduction de la continence dans l'amour platonique semble remonter à un courant néo-platonicien qui se développe vers la fin du Moyen Âge chrétien.

Les « dames » et les « troubadours », en s'inspirant de l'amitié homosexuelle des philosophes grecs, déplacent cette amitié en un amour bienveillant entre un homme et une femme.

L'amour est une sorte de moteur spirituel qui permet d'accéder à l'expérience métaphysique.

L'amour, dès le départ idéalisé, se porte sur un objet impossible : une femme inaccessible, parfois morte.

C'est un chemin quasi mystique qui permet le passage d'une créature au créateur, et que décrivent Marcile Ficin et Pétrarque.

Cependant, une tension apparaît entre cet amour humain pur et l'idéal monastique qui prône l'amour direct de Dieu.

La dilection charnelle et pure, revendiquée à la suite de Platon, se trouve condamnée par l'Église.

Pourtant c'est Aristote, bien plus que Platon, qui influence l'amour courtois.

La vertu d'amitié qui rend capable d'aimer l'autre plus que soi-même et de préférer à tout le bien de l'aimé devient le modèle de l'amour extraconjugal.

L'amour est une transposition dans la relation homme- femme de l'amitié masculine.

C'est donc au moment où l'héritage du dualisme platonicien se trouve amalgamé avec l'idéal monastique de la continence la plus rigoureuse, elle-même pensée sur le modèle de la virginité chrétienne, que l'amour platonique prend le sens que nous lui attribuons aujourd'hui : c'est une amitié spirituelle qui refuse la médiation du corps. 2) L'amour ne naît pas de la raison. Schopenhauer ne se lasse pas de décrire, dans le Monde comme volonté et comme représentation, une existence humaine prisonnière de l'illusion du bonheur, oscillant constamment de la souffrance à l'ennui, nécessairement insatisfaite puisque la volonté ne veut rien que sa propre affirmation.

Les commentateurs ont voulu réduire ce « pessimisme » (le mot est alors nouveau) à un effet du romantisme ; mais on pourrait aussi bien penser à l'apologétique chrétienne, au divertissement pascalien.

Invoquer, comme le fait Lachelier, l'humeur du philosophe ou ses expériences de jeunesse est tout aussi insuffisant (le fait-on pour l'optimisme de Leibniz ?).

Il y a cohérence entre la métaphysique et l'anthropologie. L'amour et la mort prennent une importance nouvelle hors de la référence à la dualité de l'âme et du corps.

Tout amour, toute passion amoureuse cachent sous leurs manifestations, des plus vulgaires aux plus sublimes, le même vouloir- vivre, le même « génie de l'espèce ».

Cette dénonciation de la sexualité (« le grand secret »), en particulier dans le chapitre férocement misogyne des Parerga « sur les femmes », eut un grand retentissement littéraire, et Freud pourra trouver chez Schopenhauer non seulement la subversion du moi et le primat de la sexualité, mais même l'ébauche d'une théorie du refoulement.

En perpétuant l'espèce dans l'individu, la sexualité signifie au moi sa propre mort.

Les moralistes ont bien vu que la peur de la mort était aveugle, déraisonnable, mais elle ne peut être comprise et surmontée que rapportée au noyau de notre être, au vouloir- vivre indestructible.

Là encore, l'illusion est de chercher un principe d'immortalité dans l'indépendance d'une âme raisonnable.

L'amour n'a rien de rationnel,. »

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