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L'amour est-il un mode de connaissance ?

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« Introduction.

— Pour comprendre les autres, disant les moralistes, il faut les considérer avec sympathie, les regarder avec les yeux du coeur f1).

L'amour, c'est-à-dire l'attrait qui nous porte vers ceux de nos semblables qui nous plaisent et la tendresse que nous éprouvons pour eux, serait-il donc un mode de connaissance ? A cette question, la psychologie classique répond par la négative ; mais l'affirmation, elle aussi, a eu ses défenseurs, principalement de nos jours.

Nous verrons s'il ne nous est pas possible de faire la synthèse de ces positions antithétiques. I.

— L'AMOUR N'EST PAS UN MODE DE CONNAISSANCE (Thèse) Exposé.

— La conception classique du mécanisme psychique est assez simple et assez connue pour que nous n'ayons pas besoin de nous attarder à son analyse.

Au point de départ du psychisme, il y aurait un fait de connaissance : par exemple, je vois Pierre et je porte un jugement sur l'ensemble de sa personne, physique ou morale.

Des perceptions et des jugements résulte une attitude affective : attitude négative d'indifférence, lorsque rien dans l'individu qui se présente n'excite mon intérêt ; attitude positive de sympathie ou d'antipathie, d'amour ou de haine, suivant que le jugement est favorable ou défavorable.

Enfin, l'idée que je me fais de Pierre et les sentiments que j'éprouve pour lui déterminent ma conduite à son égard.

Ainsi, la connaissance détermine l'affectivité et l'amour ; ensuite, connaissance et affectivité déterminent l'action volontaire.

Si nous en tenons à la conception classique, l'amour résulte de la connaissance ; il n'est pas lui-même une connaissance. L'amour est le moteur de la connaissance C'est parce que j'aime la philosophie (AMOUR de la sagese) que je suis disposé a m'intéresser à cette discipline. C'est parce que j'aime la peinture que je vais approfondir mon étude de lPicasso ou de l'impressionnisme.

C'est parce que j'aime la Grèce ou l'Inde que je vais me rendre régulièrement dans ces pays et mieux les connaître. Connaissance sympathie De même que je connaîtrai mieux les personnes que j'aime que celles pour lesquelles j'eprouve de l'antipathie. Je ne peux pas réellement comprendre autrui si je ne me sens pas des affinités avec lui.

De plus, le temps que je passe avec les personnes que j'aime me permet de faire plus intimement connaissance.

Ainsi, dans les vieux couples, mari et femme n'ont plus de secrets l'un pour l'autre. L'homme est mû par le désir de connaître C'est la raison pour laquelle Platon a souligne le lien qui existait entre amour et connaissance.

La connaissance n'est pas une opération sèche et désincarnée, elle naît du désir que nous inspirent les beaux corps, les belles choses.

Avec l'amour, Platon montre qu'à côté de la voie ardue du mythe de la caverne, où il faut rompre avec le sensible pour s'élever à la sagesse, on peut suivre une voie plus aisée en s'appuyant sur le désir. Dans Le Banquet, Diotime, surnommée «l'étrangère de Mantinée., résume ainsi cette voie. «La vraie voie de l'amour, dit-elle, c'est de partir des beautés sensibles et de monter sans cesse vers la beauté surnaturelle en passant comme par échelons d'un beau corps à deux, de deux à tous, puis des beaux corps aux belles actions et des belles actions aux belles sciences pour aboutir à cette science qui n'est autre que la science de là beauté, laquelle reconnaît le beau tel qu'il est en soi.

Si la vie vaut jamais la peine d'être vécue, cher Socrate, c'est à ce moment où l'homme contemple cette beauté qui n'est ni belle par un côté ni laide par un autre, ni belle en un temps ni laide en un autre, ni belle en un lieu ni laide en un autre.

Car elle ne se présente ni comme un corps, ni comme une science, ni comme une chose sur terre ou dans le ciel» (Le Banquet, 211 b). Discussion.

— Ce schéma parfaitement clair nous fournit une analyse satisfaisante du mécanisme théorique du psychisme élémentaire ; il est nécessaire de passer par lui, mais on ne saurait s'y arrêter comme à la description exacte de la vie psychologique réelle.

En effet, la réalité est beaucoup plus complexe. Le psychisme ne commence pas par une véritable connaissance et on ne saurait appeler de ce mot les impressions confuses de l'enfant qui vient de naître.

Celui-ci n'éprouve guère que des sensations désagréables qu'il cherche à écarter.

Ses connaissances, si connaissances il y a, sont incluses dans ses réactions affectives, germe de ce que nous appellerons plus tard amour ou haine.

Aussi l'amour, dans ce cas, semble-t-il pouvoir être considéré comme un mode de connaissance. Même chez l'adulte, l'ordre est moins absolu que ne le prétend la conception classique.

Si la connaissance détermine l'amour, celui-ci, à son tour, influe sur la connaissance.

Qu'un événement fortuit ou une observation de détail fasse naître en nous un mouvement de sympathie, nous voyons avec des yeux tout autres celui qui jusque-là nous était indifférent. Et l'on voit les amants vanter toujours leur choix; Jamais leur passion n'y voit rien de blâmable, Et dans l'objet aimé tout leur devient aimable : Ils comptent les défauts pour des perfections, Et savent y donner de favorables noms. La pâle est aux jasmins en blancheur comparable ; La noire à faire peur une brune adorable; La maigre a de la taille et de la liberté ; La grasse est dans son port pleine de majesté.... »

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