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La vérité peut-elle ne pas être unanime ?

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« Analyse du sujet : P artons du sens commun : la vérité est ce qui semble être compris e et acceptée par tout un chacun du moment qu'il se trouve doué de raison et qui laisse de côté sa mauvaise foi.

Dans ces conditions, comment la vérité pourrait ne pas toucher un esprit rationnel ? « L'herbe est verte » et « un triangle a trois cotés » sont des vérités que nul ne peut révoquer à moins de feindre la stupidité.

Le sujet apparaît alors comme absurde et sans intérêt ; mais c'est ici que l'on doit trouver une problématique : tout sujet philosophique est paradoxal, c'est à dire qui choque l'opinion commune (contre l'opinion).

Il faut alors se demander s'il n'exis te pas certaines vérités qui soient discutables.

L'unanimité renvoie implicitement au couple de notions objectif/subjectif.

En formulant le problème autrement : existe-t-il des vérités qui ne sont pas objectives ? A prendre en compte le sens moral du terme « unanime » : la vérité est-elle toujours préférable au mensonge ou à l'illusion ? En poussant l'idée à s on extrême, il s'agit de mettre en rapport vérité et bonheur. Proposition de plan : 1) La vérité fait l'unanimité car elle est au fondement de la science.

Descartes en faisant du cogito le socle de toute s a philosophie nous montre que l'on ne peut, en tant qu'être raisonnable et rationnel, qu'adhérer à la vérité.

Le cogito est cette vérité indubitable et absolue à partir de laquelle il va pouvoir fonder toute les sciences.

Le fait que ma pensée, indépendamment du contenu, implique nécessairement mon existenc e est une vérité que nul ne peut nier (le cogito est d'ailleurs l'argument imparable contre les sceptiques). Il ne s'agit pas de s'arrêter à ce type de vérité (trop étroit pour proposer une réponse au sujet) mais d'élargir notre raisonnement au concept de vérité en général.

Si la vérité fait l'unanimité alors tout le monde doit la reconnaître.

O r, c'est justement son caractère d'évidence qui peut permettre de répondre non au sujet.

C 'est encore Descartes qui nous éclaire.

La vérité s e voit à son évidence.

P our un esprit attentif ( Discours de la méthode, seconde partie), la vérité s'impose d'elle-même et immédiatement à l'esprit (telle que le cogito).

Pour les vérités moins évidentes (comme l'irrationalité de racine carrée de 2), il s'agit de procéder par méthode : partir des évidences, des vérités premières et progresser par démonstration pour découvrir avec certitude les vérités moins évidentes.

P ar cette méthode, applicable par tous (elle reste encore en vigueur aujourd'hui dans toute notre scolarité…), la vérité fait obligatoirement l'unanimité. De plus, la vérité est ce qui (classiquement) fait correspondre une idée à la réalité.

C ette simplicité de la définition de la vérité renforce son unanimité ; si je dis qu'il pleut, il n'y a qu'à vérifier en regardant par la fenêtre ou sentir la pluie sur ma peau etc.

A insi, son assertion ou son infirmation fera l'unanimité. Transition : M ais c'es t dans cette définition même de la vérité que les limites de cette première partie surgissent.

C ette définition classique suppose que les données de l'expérience soient acc essibles de façon objective et identique par tous.

Est-ce bien le c as ? L'expérience, les données des sens n'est-ce pas ce qui est propre à chacun et qui échappe par définition à l'objectivité dont l'unanimité ne peut se passer ? 2) P renons appui sur Protagoras qui stipule que « l'homme est la mesure de toute chose ».

C eci signifie que rien ne peut être connu de façon absolu et qu'aucune affirmation, croyance, doctrine n'est universelle.

T out n'est que convention.

En ce sens la vérité n'est rien que ce qui m'apparaît à moi, à mes sens.

V érité pour moi qui change pour autrui.

L'être, l'ess ence des choses demeurent inconnus puisque tout se livre à mes sens et dans un moment donné. A ussi, pouvons-nous dire « à chacun s a vérité » et celle-ci ne peut faire évidemment l'unanimité.

C 'est l'idée même d e s c i e n c e qui s'écroule sous l'apparenc e.

Mais s i le domaine de la c onnaissance appartient au relatif, il en va de même dans les autres domaines. Reprenons la citation de Pascal dans Les Pensées : « vérité au-delà des Pyrénées, erreur en deçà ».

A insi, les vérités que l'on peut dégager en soc iologie, en histoire, en ethnologie ou encore en psychologie ne valent que pour une population donnée, un contexte historique, économique bien précis.

L'unanimité synonyme d'universalité ou même de généralité est proscrite : ce qui est vrai pour tel peuple, ne l'est pas pour un autre. M ais la vérité dans le domaine épistémologique pose également problème.

C 'est l'empirisme qui nous force à regarder avec précaution l e s vérités scientifiques les plus évidentes.

Puisque selon ce courant, toute connaissance dérive de nos sens, de l'expérience alors l'avenir nous est inconnu.

M a i s alors, comment pouvons-nous prédire telle conséquence en connaissant telle cause ? Hume nous dit que s'il y a unanimité pour dire que le s oleil se lèvera demain, c e n'est pas à cause d'une vérité scientifique ou d'une quelconque loi universelle, mais à cause de l'habitude.

Parce que l'homme a toujours jusqu'à présent c onstater l'aube, que nous en concluons tous avec assure que le soleil se lèvera.

Mais la logique empiriste voudra que l'on précise que l'idée de causalité ne relève que de la probabilité, de la répétition d'un même phénomène observé. Le soleil se lèvera-t-il demain ? Bien sûr que oui serions-nous tentés de répondre, sauf extravagance.

Pourtant, qu'est-ce qui nous permet de fonder cette affirmation ? Pas autre chose que l'habitude : nous avons toujours vu le soleil se lever et après notre mort, nous supposons qu'il continuera à poindre à l'horizon.

O r, d'une habitude (nous avons toujours vu…), pouvons-nous à bon droit tirer une loi et une certitude ? H ume n'est pas fou, il se doute bien que le soleil va continuer à se lever mais son raisonnement marque les limites de ce que nous pouvons apprendre par l'expérience et par l'induction (aller du singulier au général).

Quand nous voulons comprendre un phénomène, nous nous fions toujours à nos inductions. Nous voyons de la fumée s'élever derrière une colline et nous en induisons alors qu'il y a un feu que nous ne percevons pourtant pas.

Nous relions un phénomène à un autre et cette mise en relation naît d'une répétition d'expériences qui nous fait dire ensuite sous forme de loi : « il n'y a pas de fumée sans feu ».

C ependant, il n'y a aucune liaison nécessaire entre eux.

Il faut donc distinguer les vérités de fait et les vérités de raison.

Les premières sont contingentes et relèvent de l'expérience, ce sont des conjonctions de phénomènes (A et B).

Les secondes sont nécessaires et renvoient à une logique de connexion (A donc B).

Quoi que l'on puis s e invoquer : conviction intime, habitude, autorité de l'astronome ou vraisemblance, le fait que le soleil ne s e lève pas demain est possible bien qu'improbable, et c'est pourquoi « nous tenterions donc en vain d'en démontrer la fausseté ».

En revanche, les vérités de raison sont toutes nécessaires (hier, aujourd'hui et demain) parc e que leur contraire implique contradiction.

P ar exemple, il serait contradictoire et donc impensable que la partie soit plus grande que le tout.

Dans ces conditions, ce que l'on démontre en mathématique ou en géométrie a un coefficient de certitude absolu, tandis que c e que l'on démontre en physique et dans les s c iences expérimentales en général, à partir de nos inductions, n'a pas le même degré de certitude.

Il ne s'agit surtout pas pour Hume d'invalider la science, ni d'affirmer sa totale relativité, mais de noter que nos déductions ne sont que des inductions dans le cadre expérimental.

T irer une loi à partir d'une série de phénomènes qui prés entent seulement des conjonctions régulières , pour nous qui cherchons à les comprendre, n'implique pas qu'ils aient des liaisons nécessaires . Transition : Si le débat entre empiristes et rationalistes ne sera sans doute jamais clos, le sujet doit être abordé s ous l'angle moral : la vérité est-elle toujours désirée ? Si non, alors elle ne fait pas l'unanimité. 3) L'unanimité doit être prise dans son acception d'approbation.

T oute vérité est-elle bonne à dire ? C 'est le plus gros reproche que l'on ait pu faire à la morale kantienne : celui d'obliger à dire la vérité en toute circonstance et en tout lieu : l'impératif catégorique oblige à agir de telle sorte que la maxime de mon action puisse être érigée par ma volonté en loi universelle de la nature (Fondements de la métaphysique des mœurs, deuxième section).

La seconde guerre mondiale est malheureusement riche en circonstances où le mensonge était préférable à la vérité.

P lus que jamais la vérité ne faisait pas l'unanimité. De plus, l'illusion es t parfois préférable à la vérité.

En effet, une vérité qui brise un rêve, une illusion ou une croyance peut avoir de graves conséquences s ur un individu ou même un peuple.

On peut alors donner une réponse affirmative au sujet (réponse paradoxale à souhait) en mettant en lumière, sous l'angle social, politique et psychologique que l'homme a besoin de rêver, d'imaginer, de fantasmer afin de fuir une réalité trop pesante.

L'exemple du film La vie est belle de Roberto Begnini est parlant : l'illusion est protectrice.

Guido, le héros, est un personnage qui n'est présent dans le monde réel que comme un bouffon, pour qui le principe de réalité est remplacé par un principe de l'illusion.

Il protège ainsi s on fils d'une réalité sordide.. »

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