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La vérité est-elle une suite d'erreurs rectifiées?

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« La vérité est-elle rivée à l'expérience au point de n'être que le résultat d'un effort de correction ? N'est-ce pas ramener la vérité à un simple calcul réussi que de faire l'hypothèse suivant laquelle la vérité ne serait qu'une suite d'erreurs rectifiées ? Nous examinerons s'il convient d'établir un rapport d'identité entre le concept de vérité et une série corrective, c'est-à-dire si atteindre la vérité s'obtient au bout d'une chaîne de rectifications.

Cette évaluation, si elle est négative, ne nous délivreras peut-être pas positivement l'idée de vérité mais nous saurons a minima ce qu'elle ne saurait être. I-L'attention ou la logique sont les plus sûrs moyens d'atteindre la vérité. Etre attentif est le moyen le plus à même de nous livrer la vérité.

En effet, en raisonnant de façon précise et cohérente nous sommes certains, au moins d'éviter l'erreur, et peut-être de trouver la vérité.

Descartes nous conseille dans Le discours de la méthode de suivre quatre préceptes : ne retenir pour vrai que ce qui me semble évident, en prenant soin de peser ce qui me paraît l'être ; diviser les difficultés, aller du plus simple au plus complexe et enfin dénombrer les termes du problème pour être sûr de ne rien oublier. Refusant l'intuitionnisme et la méthode cartésienne, Leibniz soutint lui que c'est par l'exercice du calcul et l'obéissance à une logique formelle que nous pouvons atteindre le vrai.

En effet, selon lui la raison est bien trop faillible pour faire reposer sur elle le moyen d e livrer la vérité.

Mieux vaux faire confiance à une logique immuable qui a fait ses preuves et nous guide. Que nous soyons, sur ce point, cartésien ou leibnizien, trouver la vérité revient à corriger nos erreurs.

La méthode chez Descartes procède par rectification de toutes nos erreurs d e jugement et d'inattention, c'est une reprise permanente de soi sur soi-même ; le formalisme défendu par Leibniz procède aussi par corrections, si le calcul est simple la vérité nous est aussitôt délivrée, mais il se peut que nous nous trompions d'abord dans une opération logique ou omettions une donnée.

Certes il s'appui sur une logique qui est censée nous garantir de la faillibilité de notre raison, mais c'est encore nous, sujets faillibles, qui l'utilisons.

Et rien de plus certain que l'assertion suivant laquelle on apprend à calculer et à maîtriser la logique en faisant des erreurs. II-Il n'y a pas de « vérité » mais un relativisme réel. Or la vérité ne peut-être réduite à un calcul juste, il ne faut pas prendre la vérité pour le vrai. La vérité ne se joue peut-être pas dans la logique binaire du vrai et du faux, si la vérité, comme la définit Kant dans La Critique de la raison pure n'est que « l'adéquation de la connaissance et de son objet », autrement dit vérité nominale, alors il n'y a plus de vérité que le mot et son concept n'est plus dès lors qu'un terme de logique parmi d'autres. Le mot de vérité a-t-il donc cesser de résonner comme étant l'absolu, quête suprême de la philosophie ? N'y aurait-il pas de vérité que partielle, de ceci et de cela, bref simplement du vrai ci et là ? A part Hegel et Heidegger qui, même parmi les philosophes, est encore obnubilé par l'idée d'atteindre La vérité ? Aussi l'idée selon laquelle la vérité résulte d'une rectification d'erreurs n'en est que confortée. Le développement de la science nous confirme qu'il n'y a de vérité que relative au résultat d'une démarche corrective, et plus encore, nous prouve, par son évolution constante, qu'il n'y a de vérité que provisoire (cf l'évolution des conceptions de la nature du gène, de l'atome ou de l'univers).

L'idée de vérité agirait comme une Idée kantienne, c'est-à-dire comme un horizon directeur, toujours visé et jamais atteint, qui concourt au perfectionnement de notre connaissance en la stimulant. III-La vérité ne peut-être déterminée négativement. Au début de La structure du comportement Merleau-Ponty écrit « … mon œil semble « suivre » la lumière.

En réalité, son mouvement est l'intégration d'une série d'adaptations partielles, comme la marche se ramène à une suite de chutes rattrapées.» (Merleau-Ponty expose ici des thèses auxquelles il n'adhère pas).

De la même façon nous ramenons la vérité à une suite d'erreurs rectifiées, or l'erreur est manifeste.

L'analogie n'a pas valeur de preuve mais peut nous aider à réfléchir : lire la marche comme une « suite de chute rattrapées » est certes poétique mais erroné.

Il n'y a que chez le jeune enfant, qui justement apprend à marcher, que la série des pas est un passage à la limite entre l'équilibre et la chute, l'adulte marche sans qu'on ai l'impression qu'il doit à chaque pas s'efforcer de conserver son équilibre et lutter contre la loi de la chute des corps. De même c'est une lecture trompeuse que celle qui ramène la vérité à un résultat de circonstance.

Non que la science ne procède pas par correction, mais est-ce la science ou le calcul, la raison, qui ont partie liée à la vérité ? Ne cherche-t-ils pas que le vrai par opposition au faux ? La vérité ne se joue t-elle pas bien plutôt dans l'événement ? Ainsi c'est peut-être la tragédie grecque qui illustre le mieux l'impossibilité qu'il y a de réduire absolument la vérité à une correction d'erreurs. Si les enquêtes d'Œdipe ou d'Electre procèdent plus ou moins par rectifications (comme toute enquête), il est inexact d'établir une relation d'identité entre le moyen par lequel on obtient quelque chose et le résultat de l'opération.

La vérité comme révélation d'un événement fini et certain (opposé aux résultats des sciences soumis à la contingence de la méthode et du cadre théorique qui changeront) transcende les moyens mis en œuvre pour l'obtenir.

Savoir la vérité cela ne revient pas à savoir ce qu'elle n'est pas, la valeur de la vérité ce n'est pas d'écarter telle et telle chose fausse, c'est d'affirmer l'événement et pour le sujet qu'elle concerne elle ne se définit pas par la manière dont il l'a trouvée mais bien par ce qu'il va en faire.

La vérité c'est bien plutôt une rupture qu'un résultat, un commencement qu'une fin, la question n'est pas comment l'a-t-on obtenu, mais qu'en faire ? Conclusion : La vérité doit, selon nous, être distingué du vrai.

Elle échappe à la simple alternative du vrai et du faux, dire la vérité ce n'est jamais simplement donner une bonne réponse, ce n'est pas faire un calcul mais révéler quelque chose.

La vérité a bien plus une valeur morale, existentielle que logique et formelle.

La vérité n'est pas de l'ordre du fait scientifique mais de l'événement.. »

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