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la souffrance est elle sacrilège?

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« Introduction On pourrait distinguer plusieurs types d'attitudes face à la souffrance : 1) révolte contre l'injustice qu'elle constitue ; 2) résignation devant ses effets ; 3) exaltation de la valeur salutaire d'une épreuve devenue désirable.

Mais qu'elle soit supportée, affrontée ou voulue, tel un sacrifice, toute souffrance ne participe-t-elle pas d'une souffrance originaire et commune : la simple souffrance d'exister ? Alors, le fait d'exister n'est-il pas le fait le plus opposé à ce qui ne souffre jamais, à savoir Dieu ? Depuis longtemps la souffrance est justifiée du fait que l'homme habite un monde où ne réside que l'inessentiel.

L'homme se cherche et ne se trouve pas.

Il doit ainsi faire l'effort de s'unir à l'absolu à travers cette expérience intime qu'est la souffrance.

La souffrance est donc la marque propre du profane qui cherche un sens sacré à son existence. I.

statut mythique et biblique de la souffrance a.

Platon, dans le Protagoras (320d-322b), évoque le mythe de Prométhée et d'Epiméthée.

Les Dieux chargent ces deux personnages de distribuer aux êtres vivants les qualités qui leur permettront de subsister.

Mais Epiméthée, qui effectue le partage, oublie l'homme.

Ainsi Prométhée, qui constate la nudité de l'homme, vola à Héphaïstos (dieu du feu et des métaux) et à Athéna (déesse de la guerre, de l'intelligence) la connaissance des arts avec le feu afin d'en pourvoir l'homme.

Ainsi, pour avoir violer le sacré, Prométhée fut puni en étant enchaîné au sommet du Caucase, et livré aux vautours qui lui dévorent le foi. b.

La souffrance est toute autre quand on passe du mythe au christianisme.

Ainsi la souffrance est évoquée dans le Nouveau Testament comme moyen d'accéder à la vie sacrée, au Paradis, puisque souffrir c'est se rapprocher de Dieu.

Jésus devait souvent avoir cette maxime selon les dires des évangiles : « soit heureux si tu souffres, car Dieu s'intéresse à toi ».

La souffrance devient donc, à travers la religion, le constat pour l'homme d'une existence futile, et le moyen d'accéder à la bénédiction du Christ.

Kierkegaard montrera que personne ne peut vivre une vie pleinement spirituelle en dehors de la souffrance.

Selon lui, « les souffrances sont un secours », et permettent à l'homme de se rapprocher du divin : « la vie spirituelle est en un sens un mourir à l'immédiat » (Journal, T.

3). II.

l'existence est toujours souffrance a.

On retrouve l'idée de souffrance dans la philosophie orientale (indienne), notamment dans les Upanishad.

Chaque individu a le devoir de vivre en accord avec son dharma (loi éternelle du monde, mesure de l'agir de l'homme) en remplissant les devoirs qui lui incombent, conformément à sa situation sociale.

A l'époque des Upanishad s'accomplit un retournement pessimiste des valeurs de l'existence humaine.

Celle-ci est envisagée sous sa dimension souffrante et éphémère.

Une souffrance toujours renouvelée naît dans la perpétuelle alternance de la mort et de la naissance.

Les biens extérieurs de la vie apparaissent sans valeur, comparés à l'immuable Brahman (principe de tout être, essence du monde qui pénètre tout).

Ainsi doit apparaître le vœu de délivrance ( moksha), qui doit libérer du cycle des réincarnations.

Mais comme les actions sont causes et liens des réincarnations, même les actions les meilleures ne peuvent conduire à la délivrance.

Le chemin véritable est donc l'abstention de toute action et de tout désir (ascèse).

La souffrance s'arrête au moment où le sujet a la perception suprême et intuitive de l'essence infinie du Brahman. b.

Ainsi même dans le bouddhisme, toute existence est souffrance.

C'est une des « Quatre Nobles Vérités » constituant le savoir salvateur.

La cause de cette souffrance est la soif de vivre.

Ce qui libère de la souffrance est l'extinction de la soif de vivre.

Et ce qui mène à la suppression de la soif de vivre est le « noble sentier octuple ».

Ce sentier contient les huit commandements éthiques du Bouddha (point de vue droit, état d'esprit droit, discours droit, action droite, moyens d'existence droits, aspiration droite, réflexion droite, droite dissolution).

Qui a reconnu les nobles vérités et parcouru le sentier octuple, parvient au salut. c.

Plus l'homme est conscient de la vie, plus il se rend compte que toute vie est souffrance.

Ainsi, comme l'indique Schopenhauer, d'ailleurs très influencé par les Upanishad, même si la volonté tend à la satisfaction et à l'accomplissement, l'un comme l'autre demeurent vains dans le monde.

Aucune satisfaction ne dure et l'effort ne trouve son terme dans aucun but.

La mesure de la souffrance est inépuisable et croît avec la conscience.

C'est seulement dans la contemplation artistique des idées que la volonté trouve un repos éphémère.

Il suit de cette connaissance deux dispositions à l'égard de la vie : soit on affirme la volonté, et l'homme prend la vie telle qu'elle est, en toute connaissance de cause ; soit on nie la volonté, ainsi on cherche à surmonter la souffrance par l'extinction de l'élan vital.

Ce dernier chemin caractérise les ascètes indiens et chrétiens (cf.

Le monde comme volonté et comme représentation). II.

La souffrance de l'homme a.

L'homme, l'existant, est jeté dans un monde qui a déjà des règles.

Il s'habitue à vivre dans la quiétude assoupie de conditions extérieures qui lui semble aller de soi.

Il a besoin d'une impulsion particulière qui le confronte à sa propre existence.

Cette impulsion est fournie par la confrontation à des situations limites : la mort, le combat, la souffrance, la faute.

K.

Jaspers montrera que grâce à ces situations limites l'existant se rend compte de son attachement à l'inessentiel, aux conditions extérieures superficielles.

L'homme est ainsi radicalement rejeté sur lui-même.

L'existant aura donc à se comprendre lui-même à travers l'autre, et tenter de se délivrer de ses attaches à l'inessentiel dans la transcendance.

La souffrance est ici un moyen de se dégager du monde profane, et d'entrer dans la quête de soi (cf.

La Philosophie, 1932).

A.

Camus, de son côté, montrera que chacun a à prendre sur soi la souffrance d'un monde sans signification et sans Dieu.

Le personnage principal du roman La Peste s'emploie à cette tâche. b.

Le psychanalyste Otto Rank a présentait le caractère originairement souffrant de l'individu.

Il affirme ainsi que la naissance, ainsi que la séparation d'avec la mère, sont les deux situations qui donneront à l'enfant ses premières angoisses.

Ces angoisses seront alors à la base de toute souffrance ultérieure.

Freud reprendra cette idée et montrera avec l'inconscient que tous les symptômes pathologiques des sujets remontent d'un « trauma » antérieur qui a été refoulé dans l'inconscient.

Ainsi l'homme est fondamentalement marqué, et ce dès le début de sa vie, par une souffrance inextirpable. Conclusion La souffrance, dans les religions, semble être une condition importante en l'homme puisqu'elle lui permet d'approcher le divin.

Il n'y a de souffrance véritable, éternelle, que pour les infidèles et les méchants, qui périront éternellement dans les feux de l'enfer (cf.

la Bible et le Coran).

Cependant, il apparaît que la souffrance est omniprésente dans la vie de l'homme, et celui-ci a à affronter l'existence afin de mieux l'appréhender.

Ainsi la souffrance paraît toujours bénéfique puisqu'elle est la marque insigne de l'épreuve de la vie : « tout ce qui ne tue pas nous fortifie » (Nietzsche).. »

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