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La science est-elle raisonnable ?

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« Dans le célèbre roman de Mary Shelley, Frankenstein, le professeur Frankenstein réussit à créer un être vivant à partir de membres et d'organes prélevés sur des cadavres.

Mais il renie sa créature, qui, par vengeance, commet des crimes effroyables.

Dans le monde contemporain, tout comme dans ce roman, le progrès scientifique a souvent de terribles conséquences.

Si bien que l'on s'interroge : cultiver les sciences, est-ce bien raisonnable ? 1.

LES LUMIÈRES ET LEURS BIENFAITS A - Au sortir de l'animalité ¦ Selon le mythe que Platon rapporte dans le Protagoras, la science favorise l'éclosion des arts et institue ainsi un mode de vie propre à l'homme. ¦ Bien plus, la science manifeste la spécificité de l'esprit humain.

Alors que les animaux restent rivés à la sensation immédiate, l'homme acquiert, grâce à sa mémoire, une certaine expérience.

Et, grâce à sa raison, il tire de cette expérience une connaissance universelle sur la réalité : la science.

Comme le note Aristote, la science résulte de la partie la plus haute de l'âme, la partie rationnelle.

Cultiver la science, c'est donc s'extraire de l'animalité, c'est être pleinement homme. B - L'ignorance est mère de tous les vices ¦ Mais la science ne concourt pas seulement aux progrès de l'individu, elle guérit également la société de ses vices. Car, pour les philosophes du siècle des Lumières, les maux sociaux découlent avant tout de l'ignorance.

La pénurie règne parce que l'agronomie est méconnue ; et le despotisme persiste parce que les hommes ignorent leurs droits naturels.

La science est, à leurs yeux, le seul remède. ¦ L'ignorance n'est en effet pas seulement une absence de savoir, un vide que la connaissance scientifique viendrait combler, c'est aussi un faux savoir, une superstition nocive que la raison combat.

La science s'oppose donc à l'obscurantisme qui sape les fondements d'une société véritablement humaine.

Elle révèle à l'homme sa propre nature : il est un être doué de raison. 2.

LA SCIENCE NE FAIT PAS LE BONHEUR A - La science de tous les dangers ¦ La science est, certes, l'activité rationnelle par excellence ; est-elle, pour autant, nécessairement raisonnable ? Est rationnel ce qui, dans le domaine de la connaissance, se conforme aux règles de la raison.

C'est essentiellement un concept de théorie de la connaissance.

Au contraire, le raisonnable est une notion morale.

Une action (ou l'opinion qui l'inspire) est appelée « raisonnable », lorsqu'elle n'a pas de conséquences condamnables.

Est au contraire déraisonnable ce qui ruine le bonheur ou la justice. ¦ Fort de cette distinction, il est possible de dénoncer, à la manière de Rousseau et selon un mot du XIX siècle, le scientisme des Lumières : le progrès scientifique détruit la moralité et le bien-être véritable, parce qu'il prive l'homme de sa pureté originelle et affaiblit en lui la voix de la vertu naturelle. ¦ Le diagnostic rousseauiste paraît convenir encore mieux à la situation contemporaine.

La science est devenue une puissance redoutable : que l'on songe à l'eugénisme sophistiqué que permettraient les progrès de la génétique.

La science se montrerait alors d'autant plus criminelle qu'elle mettrait la rationalité au service de la barbarie. B - « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme » (Rabelais) ¦ La critique et l'éloge de la science ont, paradoxalement, un présupposé commun.

Dans les deux cas, on admet qu'il est possible d'évaluer le savoir scientifique d'un point de vue moral.

On ne juge pourtant que des actes, ou, à la rigueur, des opinions qui incitent à des actes ; or, la science, au sens strict, se constitue exclusivement de thèses et de pensées, pas d'actions. ¦ Blâmes et louanges ne devraient donc pas s'adresser au savoir lui-même, mais bien plutôt aux utilisations condamnables de la science comme le note François Jacob, Prix Nobel de biologie.

Voilà pourquoi s'impose un contrôle légal et éthique sur l'usage des savoirs scientifiques.

Lui seul peut en effet donner à la science la conscience du raisonnable.. »

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