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La science apporte-t-elle à l'homme l'espoir de constituer un langage artificiel ?

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« Introduction La pluralité des langues apparaît classiquement — depuis le mythe de la Tour de Babel — comme un obstacle à la communication universelle.

De son côté, la science affirme au contraire que ses énoncés sont par définition universels.

De surcroît, la mathématisation à laquelle elle recourt constitue une notation qui n'a guère besoin de traduction.

Peut-on en déduire que la science nous donnerait à juste titre l'espoir de constituer un langage artificiel, dont le principal avantage serait l'universalité? 1.

Avantages de la notation scientifique — Parce qu'elle obéit à la recherche d'une vérité définie par la rigueur de ses énoncés et par la monosémie de ses symboles, la science produit des formes linguistiques généralement plus simples et moins ambiguës que le langage quotidien. Ainsi, pour comprendre une loi, il suffit d'être initié, à la suite d'un apprentissage, aux signes qu'elle met en oeuvre: certains renvoient à des objets ou des phénomènes strictement délimités, d'autres à des opérations quantifiables (symboles mathématiques) mais dans tous les cas, leur «traduction» en langage empirique ne présente aucune ambiguïté. — Dès lors le passage d'un énoncé scientifique d'une langue à l'autre est beaucoup plus aisé que la traduction d'un énoncé ordinaire (pour ne rien dire d'un énoncé littéraire ou poétique). — Le langage scientifique autorise ainsi une communication plus sûre et plus rapide.

On note, cependant sans plus attendre qu'une langue scientifique universelle, artificielle en ce sens que ses termes et symboles ne feraient partie d'aucune langue naturelle, devrait évidemment être apprise en plus de cette dernière par tout utilisateur. II.

Que pourrait représenter le langage artificiel de la science? — La langue, par définition, nous livre le réel sur un mode symbolique en le représentant à distance. — Le monde ainsi représenté par une langue scientifique serait par définition le monde tel que le reconstitue la science, c'est-à-dire différent de l'univers quotidien (notre perception usuelle ne correspond pas du tout à la façon dont la physique décrit la matière) et «objectif» (au sens où l'univers de la science est dénué de toute dimension affective ou subjective: nous avons avec lui des relations d'efficacité mais non de complicité). — De surcroît, ce langage artificiel devrait évoluer au rythme même des connaissances scientifiques (problème de la modification des notations symboliques spécialisées), c'est-à-dire beaucoup plus vite qu'une langue naturelle. III.

Richesse des langues naturelles — La langue naturelle est bien entendu un instrument de communication, mais elle est loin de n'être que cela. — Elle offre à chaque utilisateur un moyen d'expression subjective (personnelle) qui disparaît dans toute langue artificielle. — Elle résulte d'une histoire culturelle qui l'habite encore: certains mots sont chargés de connotations particulières parce que leur usage renvoie implicitement à une oeuvre littéraire, un événement historique, un personnage de l'histoire nationale, etc.

Ce aussi bien du point de vue de la mémoire individuelle que collective. — Elle entretient, comme langue maternelle, des rapports particuliers avec l'inconscient. — Ses ambiguïtés sont précisément la source de sa richesse potentielle (dimension qui favorise la création littéraire). — Toute langue artificielle, même si elle était scientifiquement fondée, serait privée d'une telle épaisseur.

Elle faciliterait la communication, mais interdirait pratiquement l'usage culturel. Cf.

la différence, en Afrique, entre langues véhiculaires (pauvres) et vernaculaires (riches). (Si l'on a les connaissances requises, c'est dans cette partie que l'on peut proposer une analyse du langage de l'informatique, en le comparant aux caractères des langues naturelles.) Conclusion L'espoir d'un langage artificiel scientifiquement fondé n'est pas nouveau ; il prend source chez Descartes et Leibniz. Mais toute langue artificielle échoue dès que l'on sort de la stricte communication utilitaire ou d'information pour accéder au palier de la création dans la langue (cf les difficultés de l'Ido ou de l'Esperanto).. »

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