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La richesse est-elle source de bonheur ?

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« Introduction Le bonheur est de ces mots qui recouvrent un idéal plus qu'une réalité.

Si tout le monde s'accorde en effet pour y voir l'aspiration fondamentale de l'homme, cet accord résiste mal à la tentative d'en déterminer le contenu que chacun imagine au gré de ses désirs et de ses espoirs, voire de ses déceptions.

Les hommes ont souvent une disposition immédiate à jouir ou profiter de ce qui s'offre immédiatement à eux.

Ils n'entretiennent en ce sens qu'une maigre réflexion devant leur nature d'animal réfléchi.

Souvent portés par la richesse, c'est-à-dire par ce moyen permettant d'augmenter sa satisfaction matérielle, l'homme se transforme, et tend ainsi à considérer le bonheur au regard de ce qu'il a, non de ce qu'il est. I.

bonheur et sagesse : le renoncement à la richesse a.

Pour Epicure, la plupart de nos désirs sont générateurs de troubles parce qu'ils soumettent l'individu au vertige du changement, à l'instabilité du devenir, à des fuites incessantes dans le renouvellement de leurs objets.

Selon Epicure c'est le plaisir qui est le but de la vie (hédonisme), plaisir qui tend moins à se satisfaire indéfiniment que fin adéquate à une souffrance antérieure : « il ne s'agit pas des plaisirs déréglés ni des jouissances luxurieuses […].

Par plaisir, c'est bien l'absence de douleur dans le corps et de trouble dans l'âme qu'il faut entendre.

Car la vie de plaisir ne se trouve point dans d'incessants banquets et fêtes […] elle est dans la tempérance » (Lettre à Ménécée ).

Le stoïcien Epictète montrera de son côté que « ce qui ne dépend pas de nous », à savoir la santé, la richesse, l'opinion des autres, les honneurs, ne doit pas venir bousculer celui qui aspire au bonheur, à la quiétude de l'âme (ataraxie).

Seul ce qui dépend de soi, ce qui provient de l'agir du sujet conformément à l'ordre du cosmos, peut mener à cette sagesse ou à ce bonheur tant désirée (Manuel). b.

Les cyniques posent qu'une vie de pauvreté, d'endurcissement physique et d'extrême frugalité est nécessaire et suffisante pour conduire l'âme à l'autosuffisance (autarkeïa) et à la félicité.

Les cyniques ne se réfèrent à aucune instance transcendante.

L'ascèse, selon eux, est ce qui débarrasse l'âme de tous les désirs frelatés déposés en elle par la vie dans la cité, lui permettant ainsi de retrouver le goût des choses les plus simples et toujours à notre disposition, telles que l'eau des torrents ou la pierre où reposer sa tête.

Au-delà de cette fonction de permettre un retour à la nature, l'ascèse cynique est ce qui forge pour l'âme une cuirasse d'insensibilité (apatheïa) qui lui permettra de conserver une parfaite sérénité face aux tragédies de l'existence : deuils, infirmités, exil, déshonneur, maladies mortelles.

C'est pourquoi Diogène n'hésite pas à présenter sa doctrine comme un hédonisme et un eudémonisme. II.

le bonheur ne se possède pas a.

Les hommes désirent tous le bonheur, mais ils ne le désirent pas de la même manière, car ils ne désirent pas la même chose. Tous les hommes s'accordent à appeler bonheur ce bien suprême qui est l'unité présupposée des fins humaines.

Mais, comme le bonheur est toujours en avant de nous-mêmes, désiré plutôt que possédé, il est impossible de le décrire et difficile de le définir.

D'où la divergence des opinions professées sur le bonheur : certains le réduisent au plaisir, d'autres aux honneurs, d'autres enfin à la richesse. Mais la première opinion dégrade l'homme au niveau de l'animalité ; quant aux autres, elles prennent pour la fin dernière ce qui n'est que moyen en vue de cette fin.

Le bien suprême est donc au-delà des biens particuliers b.

La renommée littéraire de Tchekhov croît sans cesse devant l'idée d'un bonheur inaccessible.

Il vécu dans la confortable « commode » (surnom donné à sa maison) moscovite, entouré de soins, d'affection, d'amitié.

Mais il traverse une sorte de crise morale, prend de plus en plus conscience de ce que doit être le rôle d'un écrivain digne de ce nom : rappeler aux hommes certaines vérités fondamentales, éveiller leur conscience, leur montrer que « le bonheur et la joie de la vie ne sont ni dans l'argent, ni dans l'amour, mais dans la vérité ».

Il fait alors le procès de ce qu'on appelle le bonheur dans une étonnante nouvelle, Groseilles à maquereau (Kryzovnik, 1898) : « Nous ne voyons pas, nous n'entendons pas ceux qui souffrent, et tout ce qu'il y a d'effrayant dans la vie se déroule quelque part dans les coulisses.

C'est une hypnose générale.

En réalité, il n'y a pas de bonheur et il ne doit pas y en avoir.

Mais si notre vie a un sens et un but, ce sens et ce but ne sont pas notre bonheur personnel, mais quelque chose de plus sage et de plus grand.

» III.

Illusion du bonheur par la richesse ? a.

Après Homère, qui vantait un idéal de vie chevaleresque , dans lequel les héros s'égalent parfois aux dieux et qui ne laisse aucune place à l'activité laborieuse comme mode d'affirmation humain et social, Hésiode développe une représentation de l'existence où « l'économique » joue un grand rôle.

Le poète fait l'apologie d'une vie où le travail des champs sert de guide en vue de constituer l'excellence pleine de modération face aux excès du désir.

Ainsi son ouvrage Les travaux et les jours est destiné à son frère, Persès, lui donnant des conseils pratiques pour être heureux grâce à la prospérité économique (Persès aurait dilapidé une partie de l'héritage paternel).

Hésiode fait ainsi l'apologie de la tâche (travaux des champs), de l'effort conscient, destiné à engendrer une production objectivement rentable : « la faim est partout la compagne de l'homme qui ne s'emploie pas à la tâche » ; « c'est par leurs tâches que les hommes sont riches en troupeau et en or » (v.

286 à 319).

Ainsi seul le travail doit produire la richesse et le bonheur, puisque cette richesse relève de l'effort de l'homme.

Le travail contre la démesure, le gaspillage, car il y a une tendance à la jouissance immédiate qui caractérise l'homme. b.

Mais à l'époque du capitalisme, le refrain a changé, et le travail n'est plus considéré comme source de valeur et de bonheur pour l'homme.

Marx entendra bien montrer les différents processus d'aliénation du travailleur vis-à-vis de son travail.

Mais encore, dans les Manuscrit de 44 , Marx annonce une conception très contemporaine des rapports richesse/bonheur ; argent/bonheur.

En effet, celui qui a le plus d'argent peut s'acheter la plus belle femme, bien qu'il soit le plus laid ; mais encore, il peut entretenir l'illusion de pouvoir à volonté changer son être.

Par ailleurs, on constate que l'argent n'est plus ce moyen d'échange, cet instrument permettant aux hommes d'évaluer les choses, mais qu'il est devenu une fin en soi, désirable simplement pour lui-même.

Imaginez la dépression du millionnaire qui apprendrait qu'il ne l'est plus ? Conclusion Tout homme veut être heureux, et cela suffit peut-être à définir, au moins provisoirement, le bonheur : il est ce que chacun désire, non en vue d'une autre chose (comme on désire l'argent pour le luxe ou le luxe pour le plaisir) mais pour lui-même, et sans qu'il soit besoin – ni, d'ailleurs, possible – d'en justifier la valeur ou l'utilité.

« À quoi bon être heureux ? » À cette question saugrenue il n'est pas de réponse, et c'est à quoi le bonheur se reconnaît : il est le désirable absolu, qui vaut par soi seul, la satisfaction ultime vers quoi toutes les satisfactions tendent, le plaisir complet sans lequel tout plaisir est incomplet.

C'est le but sans but (en tout cas sans autre but que lui-même) et le contentement sans reste.

Le bonheur est le souverain bien ; le souverain bien est le bonheur.. »

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