La poursuite de mon intérêt m'oppose-t-elle aux autres ?
Extrait du document
«
Analyse du sujet:
L'intérêt est un moteur reconnu de l'action humaine.
La philosophie moderne reconnaît souvent que l'homme n'agit
jamais qu'en vue de son intérêt, c'est-à-dire, ce qu'il estime être son intérêt.
Ainsi, s'avère t-il essentiel tout au
long de ce devoir de bien distinguer ce que l'individu perçoit comme son intérêt, intérêt apparent, de son véritable
intérêt.
Il faut se demander ensuite ce que peut être une action désintéressée, par exemple l'action morale.
L'homme
moral est-il un personne altruiste, s'oppose-t-il dans sa recherche du bien à son propre intérêt personnel, qu'il doit
contenir ou refouler ? Ou poursuit-il dans son action un intérêt plus vaste ?
L'idée selon laquelle l'action intéressée serait égoïste ne tient que pour autant que l'on conçoit l'intérêt de façon
réductrice.
En effet, ce n'est qu'à partir du moment où mon intérêt est le même que celui d'un autre et que le bien
visé ne peut être partagé, qu'il y a véritablement conflit et donc opposition.
Ici, la poursuite de l'intérêt est érigé en principe de vie, ce qui signifie non pas qu'effectivement tout individu
poursuit son intérêt mais que je décide de poursuivre mon intérêt au mépris de l'intérêt des autres.
Problématisation:
Le sujet nous invite à travailler le concept d'intérêt, concept qui s'avère crucial en philosophie et notamment en
philosophie politique.
Le sujet ne peut être en effet traité sans mettre en évidence le rapport entre le type
d'organisation politique et sociale et la notion d'intérêt.
1.
La poursuite des intérêts sans limite aboutit aux conflits.
a)
L'homme par nature se préfère lui-même aux autres.
Il est conduit par cette partialité naturelle qui
consiste à désirer être d'avantage considéré par les autres qu'ils ne se considèrent eux-mêmes.
Bien sûr, ce désir
unanimement éprouvé donne lieu à une véritable impasse.
Cette impasse nous donne à penser un comportement
irrationnel des hommes qui ne parviennent pas à percevoir qu'en désirant l'impossible, ils préparent leur propre
malheur.
Cette égocentrisme dans lequel l'homme serait prisonnier ne pourrait être dépassé que par la culture et la
politique.
Mais le problème est de savoir comment il peut être dépassé.
b)
La philosophie politique de Hobbes se fonde sur le principe fondamental selon lequel l'homme serait, par
nature, mu par la recherche de son intérêt.
C'est sur ce principe que se fonde la solution politique qu'il envisage
dans le Léviathan afin de faire cesser l'état de guerre entre les hommes.
Mais, si l'état de nature y est décrit comme
un état de guerre de chacun contre chacun, ce n'est pas parce que les intérêts sont conflictuels, mais parce que
« les hommes s'entre-craignent », c'est-à-dire, qu'ils n'ont pas de garantie qu'autrui respectera ses promesses, ce
qui les pousse à ne pas tenir les leurs.
On retrouve l'impasse, précédemment évoqué, qui dégénère en conflit
généralisé.
Ainsi, la politique a-t-elle pour but d'orienter les conduites humaines afin que, sans remettre en question
la poursuite de l'intérêt, mais, au contraire, en jouant sur l'intérêt particulier, on évite le conflit.
On peut citer ici
Montesquieu : «Il se trouve que chacun va au bien commun, croyant aller à ses intérêts particuliers.
» (Esprit des
lois).
c)
Si l'on accepte donc que ce qui motive les hommes par nature c'est leur intérêt particulier, et que cela
est un invariant de la nature humaine, cela a des conséquences sur la manière de faire de la politique.
Pour que les
intérêts individuels ne donnent pas lieu à des conflits, on peut appliquer une politique de récompenses et de
châtiments (la « carotte » qui incite à avancer, et, son opposé, le « bâton ») de telle sorte que l'individu perçoit
l'intérêt public comme son propre intérêt.
Mais, en réalité, cette adéquation peut être obtenue d'une autre manière,
sans faire appel au couplage récompense/sanction.
2.
La poursuite de l'intérêt peut ne pas s'opposer à autrui s'il coïncide avec l'intérêt commun.
a)
Nous avons vu que l'intérêt particulier envisagé comme un égoïsme étriqué poussait les hommes au
conflit.
Egoïsme étriqué, car, si les hommes avaient perçu combien le conflit engendré par leur comportement
pouvait les faire souffrir, ils n'auraient pas considéré leur intérêt de la même manière.
Ainsi, une autre manière de
coïncider les intérêts particuliers et de montrer qu'il est dans l'intérêt de chacun de suivre l'intérêt public.
Or, cela
ne se conçoit que de deux manières.
b)
La première manière est ce que l'on a appelé l'intérêt bien compris ou l'intérêt éclairé.
Dans une telle
considération, c'est à la raison qu'incombe le rôle de faire coïncider intérêt privé et intérêt public.
La raison permet,
en effet, de prendre en compte le comportement d'autrui et de percevoir plus loin les conséquences de mes actions.
Ainsi, tout en conservant l'intérêt comme moteur, il s'agit de chercher quel est mon vrai intérêt par la raison.
Hegel
écrit dans Principes de la philosophie du droit « Dans la vérité, l'intérêt particulier ne doit être ni négligé ni refoulé,
mais accordé à l'intérêt général, et ainsi l'un et l'autre sont maintenus.
».
c)
Mais, cela entraîne à donner un grand poids à la raison.
Pour Rousseau, l'intérêt ne doit pas être éclairé
mais étendu à l'intérêt général.
Il met au coeur de sa réflexion l'idée cruciale selon laquelle l'intérêt particulier et
l'intérêt général sont conflictuels tout en affirmant que le vrai intérêt est l'intérêt général.
Rousseau affirme qu'il ne
faut pas compter sur la raison, car dans les faits les hommes préfèrent leurs intérêts apparents et immédiats, à.
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