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La morale consiste-t-elle à vivre conformément à la nature ?

Extrait du document

« Observation.

— Une certaine équivoque résulte, surtout dans le second sujet, de l'ambiguïté du terme nature.

Il est donc nécessaire de bien le préciser. Position de la question.

Les Stoïciens avaient posé en principe que l'homme doit «vivre conformément à la nature».

Que signifie exactement cette formule? Peut-elle être prise comme maxime fondamentale de la morale? Autrement dit, quels sont les rapports de la nature et de la moralité? I.

Qu'est-ce que la nature? Le terme nature peut être pris en plusieurs sens différents, et la formule n'aura plus le même sens, ni la même valeur, selon le sens qu'on adoptera. A.

— Il peut d'abord être pris en un sens biologique.

Ce sera alors le naturalisme pur.

La nature, c'est alors l'ensemble des tendances, des instincts et des besoins qui constituent l'homme en tant qu'être psycho-organique. B.

— Mais l'homme n'est pas seulement un être psycho-organique, un individu.

Il est aussi une personne douée de conscience morale et de raison, capable de concevoir un idéal de valeurs.

La « nature humaine », c'est cette nature intégrale de l'homme, pris dans la totalité de ses facultés et de ses aspirations. C.

— On peut enfin entendre par nature, non plus seulement la nature propre à l'homme, mais la Nature au sens large, c'est-à-dire l'ensemble de tout ce qui existe.

Celle-ci peut encore être conçue, soit de façon empirique et positive, soit de façon métaphysique.

Même dans le premier sens, la Nature présente encore quelque chose de rationnel, car elle forme un tout soumis à des lois.

A plus forte raison en est-il ainsi dans la conception métaphysique, qui était précisément celle des Stoïciens : pour ceux-ci, c'est la Nature elle-même qui est Dieu; le monde est un « animal raisonnable » dont Dieu est l'âme et « la raison universelle circule dans tous les êtres ». II.

Nature et vie morale. Il est évident que, selon le sens adopté, les rapports de la nature et de la moralité seront tout différents. A.

— La moralité ne saurait se confondre avec la nature si l'on entend celle-ci dans le premier sens indiqué, c'est-àdire dans le sens purement naturaliste.

Elle se situe en effet sur le plan de la valeur, donc sur un plan transcendant à celui des tendances et des instincts.

En ce sens, il y a bien un dualisme irréductible de la nature et de la moralité, dualisme qui n'est autre que celui de la vie (au sens biologique du terme) et de la valeur, du fait et du droit, du positif et du normatif. B.

— Il en va tout autrement si l'on entend le mot nature dans le second sens, comme désignant l'être intégral de l'homme.

En ce sens, il existe bien, comme l'ont affirmé les théologiens, une « morale naturelle » dont la loi, bien qu'elle puisse être souvent obscurcie ou déviée par les déterminations que lui impose son existence temporelle, est inscrite dans la conscience de l'homme.

On peut même soutenir, en ce sens, que l'objet de la moralité est, pour l'homme, de réaliser pleinement sa nature, étant entendu que celle-ci exige, pour se réaliser pleinement, qu'il se hausse jusqu'au plan des valeurs. C.

— On peut prolonger cette idée sur le plan métaphysique.

Si l'on admet que la Nature, sans nécessairement se confondre avec Dieu comme l'a voulu le panthéisme stoïcien, implique un ordre rationnel, on peut soutenir que la moralité consiste, pour l'homme, à s'intégrer dans cet ordre universel et à jouer, dans cet ordre, le, rôle que lui assigne sa nature d'être spirituel et rationnel. Conclusion.

La moralité dépasse la nature au sens purement biologique de ce terme.

Mais, en un autre sens, elle consiste pour l'homme à réaliser pleinement sa nature propre et à s'intégrer, non à l'ordre empirique des lois naturelles, mais à l'Ordre rationnel qui régit toutes les choses et tous les êtres.. »

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