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La faculté de comprendre n'est-elle qu'une « annexe de la faculté d'agir » ?

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« La faculté de comprendre n'est-elle qu'une « annexe de la faculté d'agir » ? (BERGSON) « Le commencement de toutes les sciences, dit Aristote.

c'est l'étonnement que les choses soient ce qu'elles sont.

» Cette explication classique de l'origine de la science a été combattue de nos jours, en particulier par M.

Bergson pour qui la faculté de comprendre n'est qu'une « annexe de la faculté d'agir ».

Que faut-il penser de cette conception ? I.

La différence essentielle entre la faculté de comprendre et la faculté d'agir semble tout d'abord démontrée : A.

Par la simple observation des choses et des hommes.

Bien souvent, il y a action sans compréhension : d'abord dans la matière brute; ensuite chez les animaux régis par leurs habitudes ou par leurs instincts aveugles; chez l'homme lui-même en qui une grande partie de l'activité reste automatique, qu'il soit travailleur manuel ou travailleur intellectuel.

— Parfois aussi, il y a compréhension sans action : je comprends comment s'obtient telle réaction chimique sans faire l'expérience; je puis comprendre comment je me débarrasserais de la sotte habitude du tabac sans rien faire pour cela... B.

Par la réflexion sur les deux opérations désignées par les mots agir et comprendre.

— Comprendre, c'est percevoir des rapports entre les choses, et en particulier entre les causes et les effets : comprendre, c'est principalement saisir le pourquoi et le comment de l'action.

— Agir, c'est produire un changement : l'action d'un acide sur une base produit un sel (action chimique); celle de la chaleur sur le métal produit une dilatation (action physique); sur une graine elle produit la germination (action physiologique); l'étonnement provoque l'esprit à la recherche (action psychologique)... Mais ce dernier exemple nous amène à atténuer l'opposition entre comprendre et agir. II.

La conception de Bergson, sous sa forme paradoxale, rappelle une vérité très profonde : l'homme est essentiellement un faisceau de tendances actives; l'intelligence n'apparaît que comme le phare destiné à diriger l'action. A.

Tout d'abord, comprendre, expliquer, sont des verbes actifs et l'intellection elle-même est une action : ce besoin de comprendre, qui est à l'origine des sciences, n'est que le besoin d'agir de l'intelligence.

Nous constatons, chez l'homme cultivé, cet exercice de l'intelligence passé à l'état de jeu. B.

Ensuite et surtout, il semble bien que c'est la nécessité de l'action qui provoque le jeu de l'intelligence, a) La plus grande partie de l'activité de l'adulte et surtout de l'adulte civilisé est automatique; mais lorsque se présente une difficulté qui ne peut être résolue par le jeu automatique de ses muscles ou de sa pensée, il est amené, par les exigences de son action même, à réfléchir et à comprendre.

b) Si nous imaginons le primitif, il nous est permis de conjecturer que ce sont les problèmes imposés par l'action qui l'ont amené à poser des questions théoriques et à s'élever peu à peu aux conceptions les plus générales du monde et de toutes choses : ce sont sans doute les besoins physiologiques qui lui ont fait observer attentivement les phénomènes physiques pour trouver les lois de leur production et le moyen d'agir sur eux.

L'anxiété de la mort et l'horreur pour un total anéantissement l'ont aiguillé vers une explication de sa nature et de sa destinée... III.

Cependant, la primauté reste à l'intelligence, et en considérant la faculté de comprendre comme une annexe de la faculté d'agir, il ne faudrait pas en faire un pouvoir de second ordre. A.

D'abord quantitativement, si l'on peut dire, la pensée tend à primer l'action : physiologiquement, ce fait est exprimé par le développement presque monstrueux des hémisphères cérébraux chez l'homme; socialement, par la généralisation de l'instruction; économiquement, par la diminution du travail et la technicité de la production. B.

Ensuite qualitativement, l'action n'a de valeur humaine, économique et surtout morale, qu'en tant que dirigée par l'intelligence. CONCLUSION.

— Notre génération n 'est pas intellectualiste : pour elle, la vie est faite pour agir : elle oublie, peutêtre, qu'elle serait bien peu efficace l'action que ne dirigerait pas la pensée.

Mais, par ailleurs, la pensée aspire à informer l'action : elle reste bien superficielle la pensée qui ne passe pas à l'acte! N'est digne de l'homme qu'une action dirigée par la pensée et une pensée inspirant son action.. »

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