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Justice et démocratie

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« VOCABULAIRE: DÉMOCRATIE: Régime politique dans lequel la souveraineté est exercée par le peuple. Justice: a) Juste reconnaissance du mérite et des droits de chacun. b) Caractère de ce qui est conforme au droit positif (légal) ou au droit naturel (légitime). Peut-il y avoir, au sein d'une société, consensus sur les règles de justice ? Et si non, à quelles conditions peuvent-elles cependant s'imposer légitimement à tous ? Telles sont les questions que pose le rapport de la justice et de la démocratie.

La démocratie exige en effet que les règles de justice qui régissent les rapports des hommes au sein d'une société soient établies et consenties par ceux qui s'y soumettent.

Par conséquent, « il n'appartient qu'à ceux qui s'associent de régler les conditions de la société », nous dit Rousseau. La première condition de légitimité des règles de justice est donc que les hommes souhaitent effectivement vivre ensemble et soient d'accord sur les principes de leur association.

Or ces principes ne peuvent faire l'objet d'un accord que s'ils sont ceux de la démocratie.

Ici, le consensus est nécessaire, et semble aller de soi.

Mais à peine ce consensus établi, les difficultés surgissent.

Des conceptions différentes sur la façon d'organiser les rapports sociaux s'affrontent, des conflits naissent, des antagonismes se créent.

Qui décidera entre ces points de vue divergents ou même opposés et également légitimes ? La deuxième condition sera que soit posée la règle de la majorité.

Cette règle nous est si familière qu'elle suscite peu de discussion ou d'interrogation.

Pourtant, à y regarder de plus près, elle ne va pas de soi.

Que sous-entend, en effet, cette règle de la majorité ? Qu'il est juste que le plus grand nombre l'emporte. La majorité, un droit du plus fort ? À s'en tenir à cette définition, la règle de la majorité n'est ni plus ni moins que l'affirmation d'un droit du plus fort. C'est pourquoi il est nécessaire d'aller plus loin dans l'analyse, si l'on veut donner à cette règle une légitimité, si l'on veut, en un mot, qu'elle soit juste. Remarquons tout d'abord que l'objet des délibérations est général.

Lorsque nous sommes consultés et que nous votons, nous n'avons pas à nous prononcer sur tel ou tel cas, mais sur un principe dont on nous demande de dire si nous estimons qu'il est nécessaire au bon fonctionnement de la société et à la justice.

Prenons, par exemple, la question de la peine de mort.

Lorsque nous nous prononçons à ce sujet, nous ne jugeons pas d'un cas particulier. Nous pouvons bien être scandalisés par l'horreur de tel ou tel crime, nous pouvons même en être personnellement affectés, si c'est un de nos proches qui en a été la victime.

Il se peut même que nous ressentions un désir de vengeance.

Mais ce n'est pas de cela qu'il s'agit.

La question est seulement celle de savoir si nous pensons que la peine de mort est utile à la société et si elle est légitime.

Et cette question s'adresse à notre raison, et non au sentiment.

Il peut être difficile de faire un tel partage, mais ce partage est nécessaire.

Nous pouvons, comme homme, éprouver un sentiment, avoir une volonté particulière.

Mais c'est au citoyen qu'on s'adresse et à sa volonté générale, c'est-à-dire à la volonté qu'il a touchant l'organisation de la société en général. C'est parce que ce partage entre la volonté particulière et la volonté générale, entre le sentiment et la raison est difficile que le risque d'une confusion ne peut être tout à fait écarté.

Or ce risque menace la démocratie.

Comment s'en protéger ? Pour Rousseau, un tel risque rend nécessaire l'existence d'un législateur.

Si le peuple vote les lois, ce n'est pas lui qui doit les faire.

Le peuple a besoin d'être guidé. Il est vrai, sans doute, que faire acte de législateur réclame des compétences particulières.

Les lois sont en effet rédigées par une commission spéciale, qui les soumet ensuite aux représentants de la souveraineté populaire, dans le cas d'une démocratie parlementaire, ou au peuple lui-même, dans le cas d'une démocratie directe.

Mais avant d'être rédigées, ces lois ont été proposées.

Pourquoi et comment le sont-elles ? Le débat démocratique L'oeuvre du législateur est en effet provisoire, et même révisable.

L'idée d'une législation définitive et définitivement juste est sans doute satisfaisante pour l'esprit, mais n'est pas réaliste : la société change.

C'est là une première raison, d'ordre technique.

Mais il est une deuxième raison pour laquelle le système des lois ne peut être achevé, qui est, cette fois, d'ordre moral et politique.

C'est qu'une démocratie véritable repose sur la légitimité même du débat, et ce débat est, comme le dit Claude Lefort « un débat nécessairement sans garant et sans terme ».

D'une part, en effet, la majorité qui se dégage, à un moment donné, est toujours provisoire et, d'autre part et surtout, cette majorité ne saurait, en toute justice, confisquer le débat.

Le seul danger pour la démocratie et pour la justice serait alors que le débat cesse et fasse place au règne d'une opinion publique et massive.

C'est pourquoi la liberté de pensée, la liberté d'expression et de communication sont et demeurent des droits fondamentaux.

Car seul le respect de ces droits peut faire progresser la justice.. »

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