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Interprétation, vérité et délire ?

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« Définition des termes du sujet: Vérité La vérité concerne l'ordre du discours, et il faut en cela la distinguer de la réalité.

Elle se définit traditionnellement comme l'adéquation entre le réel et le discours. Qualité d'une proposition en accord avec son objet.

La vérité formelle, en logique, en mathématiques c'est l'accord de l'esprit avec ses propres conventions.

La vérité expérimentale c'est la non-contradiction de mes jugements, l'accord et l'identification de mes énoncés à propos d'un donné matériel.

On distinguera soigneusement la réalité qui concerne un objet (ce cahier, cette lampe sont réels) et la vérité qui est une valeur qui concerne un jugement. Ainsi le jugement : « ce cahier est vert » est un jugement vrai ou bien un jugement faux.

La vérité ou la fausseté qualifient donc non l'objet lui-même mais la valeur de mon assertion. La philosophie, parce qu'elle recherche la vérité, pose le problème de ses conditions d'accès et des critères du jugement vrai. A.

Une interprétation n'est pas une vérité scientifique • Mais dans quelle mesure l'herméneutique, ou le travail de décryptage du sens, est-elle une discipline scientifique ? La vérité d'une interprétation ne peut être la même que la vérité d'une théorie physique exprimée dans un langage mathématique et soumise au verdict de l'expérimentation.

Comme l'a montré l'épistémologue Karl Popper (19021994), une théorie physique est une hypothèse qui peut être réfutée, ou « falsifiée » par l'expérience.

Si la conséquence tirée de l'hypothèse et soumise au verdict expérimental se révèle fausse, la théorie sera définitivement abandonnée.

Rien de semblable n'existe dans les disciplines herméneutiques.

Une interprétation peut être ingénieuse, pénétrante, lumineuse, mais elle reste nécessairement arbitraire.

On ne peut la «falsifier»: il n'existe pas de dispositif expérimental susceptible, le cas échéant, de la réfuter.

À un même fait je peux découvrir plusieurs sens.

D'une même expérience, je puis proposer plusieurs interprétations, également significatives mais divergentes – sans avoir la possibilité de trancher.

« Toute interprétation est révocable », conclut Ricoeur dans De l'interprétation (1965) ; « le déchiffrement des énigmes n'est pas une science ». B.

Le conflit des interprétations • C'est un fait bien établi, par exemple par de nombreuses statistiques convergentes, qu'on se suicide beaucoup moins en temps de guerre qu'en temps de paix.

Quel est le sens de ce fait ? Une herméneutique sociologique proposera le sens suivant : dans la patrie menacée, le danger renforce la cohésion du groupe social.

L'urgence des périls communs fait oublier aux uns et aux autres leurs problèmes personnels.

Les drames intimes qui provoquent les suicides passent au second plan.

C'est notamment l'interprétation que propose Durkheim dans la célèbre étude qu'il a consacrée au suicide en 1897 (Le Suicide).

Mais l'herméneutique psychanalytique propose une signification un peu différente : en période de guerre, toutes les pulsions agressives sont tournées – concrètement sur le front, en pensée à l'arrière – contre l'ennemi, et les hommes ne songent plus à les retourner contre eux-mêmes.

Le masochisme latent se convertit en sadisme. • Les deux sens proposés (renforcement des liens sociaux ou bien dérivation des pulsions agressives) sont également intelligibles.

Et l'on pourrait sans doute encore en trouver d'autres.

L'herméneutique ne peut être tenue pour scientifique, précisément parce que ses interprétations sont irréfutables – à l'abri de toute réfutation expérimentale.

L'interprétation pouvant se diriger sous tous les sens, n'ayant aucune barrière pour la limiter peut être délirante.

Une interprétation est délirante lorsqu'elle regroupe abusivement tous les faits sous la fausse lumière d'une explication unique qui peut être chimérique. « Un système faisant partie de la science empirique doit pouvoir être réfuté par l'expérience.

» POPPER L'histoire des sciences physiques est celle de leur révolution permanente.

Les théories n'ont qu'une valeur provisoire. Des faits « polémiques » surgissent qui les contredisent, qui obligent à des révisions.

Tout succès scientifique ouvre plus de questions qu'il n'en clôt.

Faut-il pour autant sombrer dans le scepticisme et affirmer qu'il n'y a rien qui vaille vraiment ? Comment distinguer, dès lors, la véritable science de la métaphysique ou des pseudo-sciences comme l'alchimie ou l'astrologie ? Et que penser des sciences humaines ? La psychanalyse, la théorie de l'histoire de Marx peuvent-elles prétendre légitimement à la scientificité ? Popper, dans « Logique de la découverte scientifique » propose un critère de démarcation, capable d'établir, de manière concluante, la nature ou le statut scientifique d'une théorie.

Il écrit : «C'est la falsifiabilité et non la vérifiabilité d'un système qu'il faut prendre comme critère de démarcation.

En d'autres termes, je n'exigerai pas d'un système scientifique qu'il puisse être choisi, une fois pour toutes, dans une acception positive mais j'exigerai que sa forme logique soit telle qu'il puisse être distingué, au moyen de tests empiriques, dans une acception négative : un système faisant partie de la science empirique doit pouvoir être réfuté par l'expérience.

» A l'époque de Popper, on affirmait généralement que ce qui distinguait la science des autres disciplines, c'était le caractère empirique de sa méthode.

Autrement dit, en multipliant les observations et les expériences, le savant en tirait, en vertu du fameux principe d'induction, des lois qu'il considérait comme nécessaires et universellement valides.

Partant de là, les néopositivistes soutenaient que tout ce qui n'est pas vérifiable est « métaphysique » et. »

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