HENRI BERGSON, Le Rire
Extrait du document
«
Un rationalisme universel
Pour Zenon, le fondateur du stoïcisme, tout ce qui compose l'univers, tous les êtres, toutes les choses,
divines, humaines et naturelles, sont constitués et conduits par l'action de la raison, qu'il appelle le logos.
Cette raison stoïcienne n'est pas un pur intellect détaché du monde sensible.
Elle est immanente, à l'œuvre
dans les moindres détails de la marche du monde.
Nulle place n'existe pour l'irrationnel ou le hasard qui ne sont
que des illusions et des défauts de la connaissance.
Dès lors, dans toutes les divisions du savoir - logique,
physique, théologie, psychologie -, il s'agit de faire toute la lumière sur ce postulat de départ : les domaines du
savoir sont intimement liés entre eux.
Mais le but de cette connaissance est le développement d'une morale qui
s'appuie sur les autres domaines de la connaissance et qui permet une existence de sage.
C'est
essentiellement cette dernière partie qui connaîtra un grand succès dans l'Antiquité.
Un monde fondé en raison
La morale va servir à dégager non pas tant une ligne de conduite précise qu'une disposition de l'âme à travers
toutes les actions et toutes les situations.
Le stoïcisme, en effet, n'enjoint pas de mener tel ou tel type de
vie.
Un empereur - et ce sera le cas avec l'empereur romain Marc Aurèle au IIe siècle après J.-C.34 - comme
un simple citoyen peuvent ainsi suivre les préceptes de la morale stoïcienne.
L'être vivant a dès le départ de
sa vie la connaissance du bien car il est naturellement raisonnable puisque la raison est la nature.
Ce bien
consiste à vouloir se conserver lui-même, c'est-à-dire à vouloir préserver ce que la raison elle-même ou la
nature a produit.
Car la nature-raison veut se faire perdurer elle-même au travers des choses et des êtres
individuels.
Le bien est donc différent de la santé, de la richesse ou de la satiété.
Ces sortes de biens sont en
quelque sorte subordonnés au Bien supérieur qui est la préservation de soi-même en tant qu'être de raison.
Aussi la vertu ne tient-elle pas à la recherche des biens secondaires, richesse, santé, vertu, mais à celle du
Bien supérieur que l'on vient de décrire.
La vertu est une pure tension de la volonté vers ce Bien supérieur, un
pur vouloir de la préservation de soi-même.
Ceci a pour conséquence une modification très importante de la
perspective morale : être vertueux équivaut désormais à une activité tout intérieure et non plus, comme chez
Aristote, à une activité extérieure.
Introduction
Le mot conscience vient du latin cum-scientia qui signifie accompagné de
savoir.
Être conscient, c'est en effet agir, sentir ou penser et savoir qu'on agit,
qu'on sent et qu'on pense.
Le fait d'être conscient constitue donc pour l'homme
un événement décisif qui l'installe dans le monde et lui commande de prendre
position.
Car l'homme, dans la mesure où il est conscient, n'est plus simplement
dans le monde, chose parmi les choses, vivant parmi les vivants.
Or pour Bergson, la conscience n'est pas ce qui nous est immédiatement
accessible, car constate Bergson, le rapport que nous avons à nous-mêmes est
biaisé.
En tant que nous sommes dans un monde, en tant que nous sommes
orientés par certains besoins, nous sommes davantage dirigés vers la quête de
l'utilité et de là nous devenons comme étrangers à nous-mêmes.
C'est dans
cette mesure que s'interpose entre nous et le monde un voile dés lors que nous
visons dans l'existence que la dimension utile.
Ce rapport à l'utilité brime notre
connaissance de nous-mêmes et nous donne une vision erronée du réel qui
consiste en une simplification.
Nous verrons donc en premier lieu comment la vie
est nécessairement tournés uniquement vers la dimension utile de la réalité, en
nous pressant d'agir.
« Entre nous » à « confusément ».
De là notre rapport au monde ne saurait consister qu'en une simplification.
(de
« Mais ce que je vois et ce que j'entends », à « où mon action s'engagera.
»
Vivre c'est voir l'utile
Bergson débute le texte en affirmant: "Entre nous et notre propre conscience, un voile s'interpose, voile épais pour
le commun des hommes », un rapport à nous-mêmes que nous présentons comme recelant une grande clarté est en
réalité un rapport voilé, et davantage voilé pour le plus commun des hommes.
Bergson affirme donc d'emblée que
nous sommes étrangers à nous-mêmes.
Mais que ce « voile léger est presque transparent, pour l'artiste et le
poète ».
L'artiste et le poète paradoxalement verraient mieux la réalité que l'homme du commun.
Et pourtant on
présente généralement l'artiste et le poète comme éloignés de la réalité, ils sont, dit-on, davantage dans
l'imagination, et l'illusion plutôt que dans la raison et dans la vérité.
Ce devrait être eux qui voient la réalité de
manière voilée.
Mais pour Bergson, comme nous le verrons plus tard c'est tout le contraire.
Aussi interpelle Bergson: « Quelle fée a tissé ce voile ? Fut-ce par malice ou par amitié ? ».
Ce n'est pas un malin
génie qui a mis ce voile entre nous et nous-mêmes, c'est tout simplement les exigences inhérentes à l'existence qui
ont créés cette illusion.
Car précise aussitôt Bergson: « Il fallait vivre, et la vie exige que nous appréhendions les
choses dans le rapport qu'elles ont à nos besoins.
».
En d'autres termes entre nous et le monde s'interpose nos.
»
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