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Bergson

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Quand je suis des yeux, sur le cadran d'une horloge, le mouvement de l'aiguille qui correspond aux oscillations du pendule, je ne mesure pas de la durée, comme on paraît le croire ; je me borne à compter des simultanéités, ce qui est bien différent. En dehors de moi, dans l'espace, il n'y a jamais qu'une position unique de l'aiguille et du pendule, car des positions passées, il ne reste rien. Au-dedans de moi, un processus d'organisation ou de pénétration mutuelle des faits de conscience se poursuit, qui constitue la durée vraie. C'est parce que je dure de cette manière que je me représente ce que j'appelle les oscillations passées du pendule, en même temps que je perçois l'oscillation actuelle. Or, supprimons pour un instant le moi qui pense ces oscillations du pendule, une seule position même de ce pendule, point de durée par conséquent. Supprimons, d'autre part, le pendule et ses oscillations ; il n'y aura plus que la durée hétérogène du moi, sans moments extérieurs les uns aux autres, sans rapport avec le nombre. Ainsi, dans notre moi, il y a succession sans extériorité réciproque ; en dehors du moi, extériorité réciproque sans succession. Bergson

« La science considère le temps et l'espace comme des milieux homogènes, cad comme un cadre vide au sein duquel les choses et les événements prendraient place comme dans un repère orthonormé.

L'homogénéité, c'est l'absence de toute qualité.

Or, Bergson va montrer que ce qui caractérise la conscience de la durée, c'est précisément l'expérience d'un changement qualitatifs de nos états intérieurs.

La durée vécue ne se mesure pas.

L'aiguille de l'horloge ne fait que parcourir un espace.

Cet espace parcouru ne semble être du temps que pour un être conscient qui, en suivant des yeux ce mouvement spatial, l'associe à son expérience vécue de la durée. 1.

La durée Selon Bergson, la durée est la réalité même : c'est-à-dire la durée pensée et concrètement vécue, le temps de la conscience intime, et non la durée mesurée comme une distance d'un point à un autre.

Afin de saisir cette durée, le philosophe doit se réconcilier avec ce qu'il vit concrètement et faire prévaloir la perception des choses sur leur conceptualisation. 2.

La conversion nécessaire Comment appréhender cette durée qui semble toute intime ? Il convient d'opérer une conversion, de nous défaire des habitudes de pensées qui réduisent le réel à une ombre de lui-même, en ne faisant que le mesurer et le diviser par pur intérêt.

Si nous n'avons de la durée que cette perception réduite, cela signifie que, pour nous, la durée est d'abord ce qui nous sépare de quelque chose ou, si l'on veut, un moyen terme entre un début et une fin.

Ce moyen terme n'est donc pas perçu pour lui-même, mais en vue d'autre chose, et la réduction de la durée à de l'espace signale d'abord une conception utilitaire du monde, bien loin du désintéressement qui devrait être celui du philosophe.

Si nous voulons saisir ou contempler la durée en son absoluité, ou du moins nous en rapprocher, il nous faut nous défaire de notre obsession pour l'action. « Quand je suis des yeux, sur le cadran d’une horloge, le mouvement de l’aiguille qui correspond aux oscillations du pendule, je ne mesure pas de la durée, comme on paraît le croire ; je me borne à compter des simultanéités, ce qui est bien différent.

En dehors de moi, dans l’espace, il n’y a jamais qu’une position unique de l’aiguille et du pendule, car des positions passées, il ne reste rien.

Au-dedans de moi, un processus d’organisation ou de pénétration mutuelle des faits de conscience se poursuit, qui constitue la durée vraie.

C’est parce que je dure de cette manière que je me représente ce que j’appelle les oscillations passées du pendule, en même temps que je perçois l’oscillation actuelle.

Or, supprimons pour un instant le moi qui pense ces oscillations du pendule, une seule position même de ce pendule, point de durée par conséquent.

Supprimons, d’autre part, le pendule et ses oscillations ; il n’y aura plus que la durée hétérogène du moi, sans moments extérieurs les uns aux autres, sans rapport avec le nombre.

Ainsi, dans notre moi, il y a succession sans extériorité réciproque ; en dehors du moi, extériorité réciproque sans succession.

» BERGSON Repérer le thème du texte, l'objectif de l'auteur et sa thèse.

Thème : la saisie du temps. Objectif de l'auteur : corriger l'opinion commune selon laquelle on mesure une durée en enregistrant la succession des positions de l'aiguille sur le cadran de l'horloge. Thèse : seule la conscience saisit le temps car elle est durée. Distinguer les différentes idées du texte et montrer comment elles s'articulent logiquement en les expliquant. La première partie du texte énonce l'opinion commune sur la mesure du temps et annonce sa critique.

Que faiton lorsque l'on compte les minutes sur le cadran de l'horloge ? On croit mesurer une durée, alors "qu'on se borne à compter des simultanéités".

La durée d'un être ou d'un événement peut être définie comme la portion de temps qu'il occupe, et l'on mesure cette portion en additionnant le nombre d'unités (minutes, heures, années,...) qui séparent son début de sa fin.

C'est cette opération qui, si elle est mieux analysée, va se révéler trompeuse.

Que se passe-t-il en réalité ? A chaque moment où je constate la position de l'aiguille, j'enregistre une simultanéité, c'est-à-dire l'instant où en même temps je suis et l'aiguille est en telle position.

Ensuite je compte combien j'ai additionné d'instants.

Un tel compte est "bien différent" de la mesure d'une durée. L'explication de Bergson s'opère en deux parties et consiste à préciser ce qui se passe dans l'espace, en dehors de moi, puis ce qui se passe dans ma conscience.

Dans l'espace, il n'y a à chaque instant qu'une position de l'aiguille, celle que je constate.

Il est impossible de constater les positions passées de cette aiguille, elles ne sont plus.

Or mesurer une durée suppose bien que l'on garde d'un être tout le passé qui sépare son début de son état présent.

L'espace n'offrant que de l'actuel ne permet pas de mesurer une durée.

Que se passe-t-il dans ma conscience ? Un mouvement continu se poursuit par lequel les faits de conscience se pénètrent. »

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