Bergson
Extrait du document
«
PRESENTATION DE "ESSAI SUR LES DONNEES IMMEDIATES DE LA CONSCIENCE" DE BERGSON
Cet essai est la thèse de doctorat de Bergson (1859-1941), élève de l'École normale supérieure puis professeur de
philosophie.
Il y défend, contre le scientisme et le positivisme, courants de pensée dominants au XIXe siècle, la
possibilité et la prééminence d'une intuition métaphysique de la durée et de la liberté.
Il y montre que la science
expérimentale confond la durée, qui est la dimension propre de la conscience, avec l'espace, qui est la dimension dans
laquelle se déroulent les phénomènes physiques.
Le besoin de séparer et de distinguer les phénomènes les uns des
autres pour la commodité de la vie sociale conduit les hommes à ignorer leur vie psychique profonde et personnelle au
profit d'une représentation simplifiée et impersonnelle de leur expérience, transmise par le langage et la société.
"Quand je me promène pour la première fois, par exemple, dans une ville où
je séjournerai, les choses qui m'entourent produisent en même temps sur
moi une impression qui est destinée à durer, et une impression qui se
modifiera sans cesse.
Tous les jours j'aperçois les mêmes maisons, et
comme je sais que ce sont les mêmes objets, je les désigne constamment
par le même nom, et je m'imagine aussi qu'elles m'apparaissent toujours de
la même manière.
Pourtant, si je me reporte, au bout d'un assez long
temps, à l'impression que j'éprouvai pendant les premières années, je
m'étonne du changement singulier, inexplicable et surtout inexprimable, qui
s'est accompli en elle.
Il semble que ces objets, continuellement perçus par
moi et se peignant sans cesse dans mon esprit, aient fini par m'emprunter
quelque chose de mon existence consciente ; comme moi ils ont vécu, et
comme moi vieilli.
Ce n'est pas là illusion pure ; car si l'impression
d'aujourd'hui était absolument identique à celle d'hier, quelle différence y
aurait-il entre percevoir et reconnaître, entre apprendre et se souvenir ?
Pourtant cette différence échappe à la plupart ; on ne s'en apercevra guère
qu'à la condition d'en être averti, et de s'interroger alors scrupuleusement
soi-même.
La raison en est que notre vie extérieure et pour ainsi dire
sociale a plus d'importance pratique pour nous que notre existence
intérieure et individuelle.
Nous tendons instinctivement à solidifier nos
impressions, pour les exprimer par le langage.
De là vient que nous
confondons le sentiment même, qui est dans un perpétuel devenir, avec son objet extérieur permanent, et
surtout avec le mot qui exprime cet objet." BERGSON.
Introduction
La raison, la faculté de penser, est ce qui permet d'accéder au réel, aux choses extérieures au sujet qui pense.
Cependant, tout le problème de l'épistémologie est de déterminer dans quelle mesure cette raison, par nature
subjective, peut être garante d'objectivité.
La condition pour pouvoir apprendre quelque chose de nouveau est de
pouvoir distinguer ce savoir d'un souvenir, c'est-à-dire d'une donnée déjà inscrite dans la conscience.
Le texte de Bergson extrait de l'Essai sur les données immédiates de la conscience, établit le lien entre la mémoire et la
conscience.
Se souvenir de quelque chose, c'est retrouver une impression passée.
Mais si deux impressions portent sur
un même objet, en quoi celle du passé se distingue-t-elle de celle du présent ?
Il s'agit de pouvoir retrouver fidèlement un sentiment passé, sans le dénaturer par un sentiment présent, mais surtout
il s'agit de pouvoir apprendre, de pouvoir saisir des nouvelles choses sans être obscurci par le poids d'impressions
fondées sur des habitudes.
Bergson part d'un constat paradoxal : des impressions se fixent en moi, et il me semble les reconnaître, pourtant elles
vont se modifier avec le temps.
Les éléments de la mémoire semblent s'entremêler à ceux de la perception et pourtant
ils doivent être nécessairement distincts si l'on veut pouvoir apprendre ou percevoir quelque chose de nouveau.
Une
conscience qui n'est pas attentive à elle-même, ne peut distinguer la chose extérieure de son sentiment et tout
particulièrement, elle ne peut distinguer la chose du mot qui fonctionne comme une habitude.
1.
L'habitude engendre des impressions illusoires
Bergson utilise l'exemple des impressions d'un promeneur dans une ville pour établir la différence entre une perception
première et les images de la mémoire.
A.
La mémoire consiste à enregistrer des images des choses extérieures
Bergson commence son texte en posant d'emblée un paradoxe : tout ce que je perçois pour la première fois, tel un
promeneur dans une ville étrangère, produit des impressions vouées à la fois à durer et à se modifier continuellement.
Qu'une impression dure semble se comprendre par l'existence même de la mémoire.
Son principe est d'enregistrer dans
la conscience des données extérieures à elle.
La mémoire est ce qui permet à une conscience de reconnaître une
maison, un quartier qu'elle a déjà vu, et ainsi de s'y repérer.
Mais en quoi cette impression se modifiera-t-elle ? Est-ce
la même impression qui continue d'exister tout en s'altérant, ou bien une autre impression qui porterait par exemple non
pas sur des données pratiques (comme l'orientation des rues), mais sur des données plus subjectives comme peut
l'être une ambiance ?.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- [Affinités de l'art et de la philosophie] Bergson
- Henri BERGSON (1859-1941) La Pensée et le Mouvant, chap. V (commentaire)
- Bergson étude de texte: liberté et invention
- Explication de texte : Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience
- Explication d'un texte de Bergson sur la conscience