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Bergson

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Une énorme tuile, arrachée par le vent, tombe et assomme un passant. Nous disons que c'est un hasard. Le dirions nous, si la tuile s'était simplement brisée sur le sol ? Peut être, mais c'est que nous penserions vaguement alors à un homme qui aurait pu se trouver là, ou parce que, pour une raison ou pour une autre, ce point spécial du trottoir nous intéressait particulièrement, de telle sorte que la tuile semble l'avoir choisi pour y tomber. Dans les deux cas, il n'y a de hasard que parce qu'un intérêt humain est en jeu et parce que les choses se sont passées comme si l'homme avait été pris en considération, soit en vue de lui rendre service, soit plutôt avec l'intention de lui nuire. Ne pensez qu'au vent arrachant la tuile, à la tuile tombant sur le trottoir, au choc de la tuile contre le sol : vous ne voyez plus que du mécanisme, le hasard s'évanouit. Pour qu'il intervienne, il faut que, l'effet ayant une signification humaine, cette signification rejaillisse sur la cause et la colore, pour ainsi dire, d'humanité. Le hasard est donc le mécanisme se comportant comme s'il avait une intention. Bergson

« Une énorme tuile, arrachée par le vent, tombe et assomme un passant.

Nous disons que c'est un hasard.

Le dirions nous, si la tuile s'était simplement brisée sur le sol ? Peut être, mais c'est que nous penserions vaguement alors à un homme qui aurait pu se trouver là, ou parce que, pour une raison ou pour une autre, ce point spécial du trottoir nous intéressait particulièrement, de telle sorte que la tuile semble l'avoir choisi pour y tomber.

Dans les deux cas, il n'y a de hasard que parce qu'un intérêt humain est en jeu et parce que les choses se sont passées comme si l'homme avait été pris en considération, soit en vue de lui rendre service, soit plutôt avec l'intention de lui nuire.

Ne pensez qu'au vent arrachant la tuile, à la tuile tombant sur le trottoir, au choc de la tuile contre le sol : vous ne voyez plus que du mécanisme, le hasard s'évanouit.

Pour qu'il intervienne, il faut que, l'effet ayant une signification humaine, cette signification rejaillisse sur la cause et la colore, pour ainsi dire, d'humanité.

Le hasard est donc le mécanisme se comportant comme s'il avait une intention. Introduction: Le recours à la notion de hasard témoigne d'un désir intellectuel de compréhension complète, en même temps que d'un aveu d'impuissance à tout expliquer.

Mais comment définir le hasard ? C'est ce à quoi s'attache Bergson, à partir d'un exemple simple.

Et il montre que la référence au hasard révèle surtout l'existence d'un projet humain qui colore le monde et lui ajoute des significations. Idées du texte: L'exemple commenté par Bergson, pour illustrer le hasard, est simple et classique: celui d'un homme assommé par la chute d'une tuile. Un premier éclaircissement de la compréhension de cet exemple est possible si l'on inverse la situation: évoque-t-on encore le hasard si la tuile tombe sans assommer l'homme ? Bergson dit que l'on peut encore évoquer le hasard dans deux cas: soit que l'on imagine que quelqu'un aurait pu se trouver à l'endroit de la chute; soit que la chute de la tuile s'effectue à un endroit particulier, qui nous intéresse pour une raison ou une autre: ce peut être l'endroit où je pensais donnez RDV le lendemain à mon petit ami, par exemple ! Même si elle n'est pas accompagnée d'un accident, la chute donne l'impression de viser son lieu précis.

Et cette impression est due au fait que ce lieu a une signification particulière pour l'homme. On peut donc admettre, avec Bergson, qu'il n'y a de hasard que relativement à un "intérêt humain".

C'est un fonction de cet "intérêt" que le hasard prendra une signification particulière: on parlera d'"hasard heureux" ou d'"hasard malheureux".

La causalité devient finalité. En l'absence de toute considération portant sur une présence humaine ou un projet, l'événement de la chute de la tuile redevient une situation neutre et soumise au mécanisme du déterminisme des lois naturelles. Bergson souligne que l'homme donne au hasard une dimension subjective, anthropomorphique, en soulignant que le mécanisme se comporte "comme s'il" avait une intention.

Bergson prend soin de souligner que cette intention n'est pas réellement présente dans le mécanisme: c'est notre interprétation qui la lui accorde, parce que ce qui contredit notre projet ne peut nous apparaître que sous l'aspect d'un contre-projet (doté d'une intention). Conclusion: Les choses et les événements sont en eux-mêmes dénués de signification.

ils ne font que suivre la causalité du déterminisme naturel.

Mais l'être humain, parce qu'il produit du sens, admet mal qu'un obstacle puisse être dépourvu de signification et d'intention. BERGSON (Henri-Louis).

Né et mort à Paris (1859-1941). Il fit ses études au lycée Condorcet et à l'École normale supérieure.

Il fut reçu à l'agrégation de philosophie en 1881.

Il fut professeur de philosophie aux lycées d'Angers et de Clermont-Ferrand. Docteur ès lettres en 1881, il enseigna successivement, à Paris, au collège Rollin, puis au lycée Henri IV, et, à partir de 1898, à l'École normale.

Titulaire, en 1900, de la chaire de philosophie grecque au Collège de France, puis de celle de philosophie moderne, il entra à l'Académie des Sciences morales et politiques en 1901, à l'Académie française en 1914, et reçut le Prix Nobel de littérature en 1927.

— La méthode philosophique de Bergson est l'intuition :« Nous appelons intuition la sympathie par laquelle on se transporte à l'intérieur d'un objet pour coïncider avec ce qu'il a d'unique et par conséquent d'inexprimable.

» Les données immédiates de la conscience doivent être saisies dans leur vraie nature et non à travers des notions que nous emprunterions à la connaissance de l'espace.

L'intuition pose les problèmes en termes de durée.

« Les questions relatives au sujet et à l'objet, à leur distinction et à leur union, doivent se poser en fonction du temps plutôt que de l'espace.» — Bergson distingue le temps véritable et psychologique du temps mathématique, qui est sa traduction en espace.

L'être est altération et l'altération est substance.

La durée, c'est « la forme que prend la succession de nos états de conscience quand le moi se laisse vivre.» Entre les choses, il n'est que des différences de degré.

C'est seulement entre deux tendances qui traversent une chose, qu'il y a différence de nature.

La matière est ce qui ne change plus de nature ; mais elle est aussi durée.

Elle est le plus bas degré de la durée, elle est un « passé infiniment dilaté ».

Car la durée est une mémoire, elle prolonge le passé dans le présent.

Le passé survit en soi ; il coexiste avec soi comme présent.

Le présent est le degré le plus contracté du passé.

Le passé et le présent sont contemporains l'un de l'autre.

L'élan vital est la durée en tant que différence de soi avec soi, en tant qu'elle s'actualise, en tant qu'elle passe à l'acte.

La durée vraie est une création continue.

La vie, de même que la conscience, est durée, mobilité, création continue, liberté.

— Bergson distingue deux sortes de mémoire : « Le passé se survit sous deux formes distinctes : 1) Dans des mécanismes moteurs ; 2) Dans des souvenirs indépendants...

En poussant jusqu'au bout cette distinction fondamentale, on pourrait se représenter deux mémoires théoriquement indépendantes.» Il parle de mémoire-souvenir et de mémoire-contraction.

« Toute conscience est mémoire — conservation et accumulation du passé dans le présent.

» C'est en ce sens que le présent est le degré le plus contracté du passé.

On peut rattacher à cette théorie la phrase célèbre du philosophe :« Comprendre, c'est savoir refaire.» — Bergson applique le principe de l'élan vital à la morale et à la religion.

« Les grands entraîneurs de l'humanité semblent bien s'être replacés dans la direction de l'élan vital.

» Il distingue la morale close que la société impose aux individus, et la morale ouverte, qui est celle du héros.

Il distingue la forme statique de la religion, représentée par les dogmes et les rites, et sa forme dynamique représentée par ceux qui ont retrouvé l'élan créateur distinctif de la vie, c'est-à-dire par les saints et les mystiques, Saint François d'Assise ou Pascal. Oeuvres principales : Essai sur les données immédiates de la conscience (1889), Quid Aristoteles de loco senserit (1889), Matière et mémoire, essai sur la relation du corps à l'esprit (1897), Le Rire, essai sur la signification du comique (1900), L'Evolution créatrice (1907), L'Energie spirituelle (1919), Durée et simultanéité (1922), Les deux sources de la morale et de la religion (1932), La pensée et le mouvant (1934).. »

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