Autrui et la connaissance de soi
Extrait du document
«
VOCABULAIRE:
AUTRE / AUTRUI : 1) Comme Adjectif, différent, dissemblable.
2) comme Nom, toute conscience qui n'est pas
moi.
3) Autrui: Tout homme par rapport à moi, alter ego: "Autrui, c'est l'autre, c'est-à-dire ce moi (ego) qui n'est
pas moi (alter)." (Sartre).
Les autres hommes, mon prochain.
C'est à la fois l'autre et le même (mon semblable, un
moi autre, une personne).
CONNAÎTRE / CONNAISSANCE: 1.
— Être familier de quelqu'un ou quelque chose.
2.
— Discerner, distinguer
quelque chose : « Le premier et le moindre degré de connaissance, c'est d'apercevoir » (CONDILLAC) 3.
— Posséder
une représentation de quelque chose, en part.
une représentation exacte.
4.
— Connaissance: a) Acte par lequel un
sujet s'efforce de saisir de saisir et de se représenter les objets qui se présentent à lui.
b) Résultat de cet acte.
La conscience de soi est relation à une autre conscience de soi
Hegel est l'un des premiers penseurs à avoir analysé la conscience en la
rapportant à autrui.
Dans la Phénoménologie de l'esprit (1807), il montre que
la conscience de soi n'est pas une relation du type : moi = moi.
Elle n'est
véritablement conscience de soi « que pour une autre conscience de soi ;
c'est-à-dire qu'elle n'est qu'en tant qu'être reconnu ».
C'est en passant par
l'autre que je peux me mettre à distance de moi-même.
« Pour se faire valoir et être reconnue comme libre, il faut que la conscience
de soi se représente pour une autre comme libérée de la réalité naturelle
présente.
Ce moment n'est pas moins nécessaire que celui qui correspond à la
liberté de la conscience de soi en elle-même.
L'égalité absolue du Je par
rapport à lui-même n'est pas une égalité essentiellement immédiate, mais une
égalité qui se constitue en supprimant l'immédiateté sensible et qui, de la
sorte, s'impose aussi à un autre Je comme libre et indépendante du sensible.
Ainsi la conscience de soi se révèle conforme à son concept et, puisqu'elle
donne réalité au Je, il est impossible qu'elle ne soit pas reconnue.
Mais l'autonomie est moins la liberté qui sort de la présence sensible
immédiate et qui se détache d'elle que, bien plutôt, la liberté au sein de cette
présence.
Ce moment est aussi nécessaire que l'autre, mais ils ne sont pas
d'égale valeur.
Par suite de l'inégalité qui tient à ce que, pour l'une des deux
consciences de soi, la liberté a plus de valeur que la réalité sensible présente,
tandis que, pour l'autre, cette présence assume, au regard de la liberté,
valeur de réalité essentielle, c'est alors que s'établit entre elles, avec l'obligation réciproque d'être reconnues dans
la réalité effective et déterminée, la relation maîtrise-servitude, ou, absolument parlant, servitude-obéissance dans
la mesure où cette différence d'autonomie est donnée par le rapport naturel immédiat.
Puisqu'il est nécessaire que chacune des deux consciences de soi, qui s'opposent l'une à l'autre, s'efforce de se
manifester et de s'affirmer, devant l'autre et pour l'autre, comme un être-pour-soi absolu, par là même celle qui a
préféré la vie à la liberté, et qui se révèle impuissante à faire, par elle-même et pour assurer son indépendance,
abstraction de sa réalité sensible présente, entre ainsi dans le rapport de servitude.
»
Hegel, « Propédeutique philosophique ».
C'est dans l'un des plus fameux passages de la « Phénoménologie de l'esprit », qui décrit la lutte à mort pour la
reconnaissance avant que d'aborder la dialectique du maître et de l'esclave, que Hegel déclare : « C'est seulement
par le risque de sa vie que l'on conserve la liberté.
»
Hegel entend montrer que la rencontre avec autrui prend logiquement la forme d'un conflit, d'une lutte, dont le
risque est la mort et l'enjeu la reconnaissance par l'autre de mon humanité.
Pour ne pas méconnaître l'enjeu de la « lutte à mort pour la reconnaissance », il faut savoir que la « Phénoménologie
» envisage de décrire le mouvement logique du développement de la conscience, cad les expériences, le mouvement
par lequel la conscience s'éduque.
Il est donc toujours dangereux d'isoler un chapitre du texte, puisque « le vrai est le tout », que chaque étape n'est
qu'un moment dont la compréhension exigerait la connaissance de l'ensemble du processus.
Il faut d'autre part
prévenir un autre contresens possible.
Hegel n'entend pas décrire un épisode réel de l'histoire humaine, et il ne faut
pas s'imaginer deux individus surgissant face à face et engageant une lutte.
Il s'agit bien plutôt d'une genèse
logique de la rencontre avec autrui.
Hegel souhaite montrer que, dans la mesure où l'homme accepte de risquer sa vie pour quelque chose, il pose qu'il
n'est pas seulement un simple être vivant, sensible, fini.
Il pose que l'homme ne se réduit pas à la simple animalité et
au souci de la conservation de soi.
En quelque sorte le risque de la mort est la pierre de touche de nos valeurs, car
en risquant sa vie, l'homme montre que ce pourquoi il la risque a plus de valeur qu'elle, et qu'il se définit et s'éprouve
comme autre chose qu'un simple vivant.
Plus précisément, l'idée maîtresse de Hegel dans ce passage est la suivante : l'homme n'accède à la véritable
consciente de son humanité que lorsqu'elle est reconnue par un autre.
L'homme doit faire la preuve de son
humanité, et il ne peut la faire qu'en engageant une lutte à mort avec un autre homme.
C'est en acceptant le risque
de sa mort qu'il prouve que sa reconnaissance comme conscience, comme autre chose qu'un simple animal, vaut
plus que par sa simple survie.
Etre homme, c'est donc pouvoir mettre en jeu sa propre vie pour prouver la valeur.
»
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