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Athéisme marque de force d'esprit mais jusqu'à un certain point ?

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« Athéisme marque de force d'esprit mais jusqu'à un certain point ? Le thème de cet énoncé porte sur la notion d'athéisme.

Athéisme étant ici rapproché de la “ force d'esprit ”, il faut dès lors comprendre le lien entretenu par l'athéisme avec la rationalité.

Historiquement, l'athéisme comme néologisme apparaît pour qualifier les libres penseurs.

Liberté d'une pensée qui acquiert son autonomie par sa fondation exclusive en l'esprit. Se donnant à lui-même contenu, c'est-à-dire soustrait à l'influence des dogmes, ainsi que sa forme, c'est-à-dire s'instituant comme étant à lui-même sa propre fin, le libre esprit devient méthode, exercice de déconstruction de toute trace d'irrationalité – telle la religion engoncée dans les superstitions. Le problème de l'énoncé consiste alors à déterminer les limites de ladite force d'esprit, autrement dit de saisir le point à partir duquel la force s'invalide pour devenir faiblesse.

La possibilité d'un tel retournement sur et contre soi de l'esprit ne pouvant être d'origine extérieure, puisque la force d'esprit, dont la marque est l'athéisme, consiste en le rejet de toute hétéronomie, en d'autres termes se caractérise par le rejet de toute autorité qui lui serait imposée de l'extérieur comme une transcendance (telle l'église romaine).

Ainsi doit-on questionner la dimension endogène de quelque limitation qui soit au principe de la finitude de la force d'esprit.

Si la force d'esprit doit être limitée en “ un certain point ”, cela ne peut que procéder de la rationalité elle-même ; et partant, la raison d'être à elle-même sa propre limite. En conséquence de la position de ce problème, deux enjeux peuvent structurer le développement du propos : premièrement, penser la nature et la signification de la force de l'athéisme ; pour, dans un second mouvement de la réflexion, tenter une détermination des limites de la raison, et du statut de cette dernière dans l'acte de son autolimitation. I.

La force de l'athéisme Historiquement, comme catégorie de pensée, l'athéisme est contemporain de la liberté d'esprit.

Cette quasicontemporanéité tient à la naissance d'une attitude critique de la raison à son propre égard.

Sondant ses fondements propres, la raison peut ainsi dévoiler l'irrationalité au principe de nombreuses pratiques religieuses.

Une telle irrationalité, qui est celle de la superstition, toujours gravement condamnée comme étant de loin pire que l'athéisme (Bayle, Pensées diverses…), est supplée dans sa déconstruction du religieux par la découverte concomitante du relativisme des croyances. L'athéisme se fonde donc sur l'impossible fondation rationnelle de la religion universelle. Articulé au relativisme, la force critique de l'esprit conduit nécessairement au scepticisme – qui n'est qu'une version plus ou moins radicalisée de relativisme.

Mais le scepticisme est toujours l'attribut et le produit d'une raison.

D'une raison qui est la condition même de sa possibilité.

Car le scepticisme, force ultime de l'esprit, est engendré par la critique rationnelle de l'impossibilité, ou du moins de l'illégitimité de la rationalité, dans l'absolu.

Et tel est son paradoxe, qui déjà indique comment la raison peut à elle-même être sa propre limite.

Sextus comme Montaigne se voient ainsi contraints de recourir à la raison infondée, afin de simplement assumer le quotidien des tâches humaines ; ou alors le scepticisme devient plus dogmatique que le dogmatisme, lorsqu'il affirme qu'il est vrai/certain que rien ne peut être vrai/certain (comme c'est le cas dans la Nouvelle Académie). De cela doit être conclu que la force de l'athéisme, athéisme attestant la puissance de l'esprit libre, tient principalement à son criticisme (au sens kantien de l'examen des conditions de possibilité de la validité des connaissances humaines, ainsi que des pratiques).

Mais l'athéisme est ambigu, car il peut mener à l'abandon de la raison (le scepticisme absolu), tout comme à son contraire, le rationalisme effréné d'une raison entreprenant de douter de tout pour se fonder en certitude. II.

La limite de la raison La force d'esprit de l'athéisme est, nous l'avons dit et montré, illimitable de l'extériorité.

La limite ne peut qu'être endogène ; et la raison : autolimitation.

Sans limitation, la force critique du libre esprit peut aboutir au rationalisme déiste, c'est-à-dire à l'absolue rationalisation de la nature (essence ou substance) de la divinité.

Car la dynamique rationnelle du déisme et de l'athéisme est la même : ébranler les fondements de tous savoirs et pratiques pour en sonder l'(ir)rationalité. Mais là où l'athée s'arrête, c'est à l'acquiescement des preuves rationnelles de la divinité (par exemple, les preuves métaphysique ou ontologique de Descartes).

Et cela lui permet d'en condamner le contenu (Dieu), mais non la démarche. Ici l'athéisme se trouve être auto-contradictoire en ce qu'il exige une argumentation rationnelle de ce dont il sait l'impossibilité à être prouver.

Avec Pascal pourrait-on dire que l'athée ignore vouloir la preuve du cœur, c'est-à-dire la conversion par ce qui seul a valeur d'argument dans un ordre en lequel la rationalité est impuissante. En conséquence, la limitation de la raison qui est autolimitation n'est que le prolongement du geste critique réflexif de la raison, mais geste critique qui, se prolongeant, ne fait plus que déconstruire le faux-semblant des évidences irrationnelles, mais dé-finit la légitimité de son exercice, pense la finitude de son pouvoir comme étant à son principe, ou encore : “ limite la connaissance pour faire place à la croyance ” (Kant, Préface à la seconde édition de la Critique de la raison pure).

Ainsi en est-il d'une réelle Aufklärung, d'une autonomie véritable de l'esprit : se savoir soi-même comme limité dans la légitimité de son pouvoir. Conclusion - Le point limite de la force d'esprit de l'athéisme consiste alternativement en la misère de l'homme du scepticisme radical, écrasé sous le poids de la finitude de son esprit saisie par sa propre force, et dans l'orgueil rationaliste, qui, croyant douter de tout, omet de se soumettre au doute.. »

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