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Arthur SCHOPENHAUER (1788-1860)

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Seule l'histoire ne peut vraiment pas prendre rang au milieu des autres sciences, car elle ne peut pas se prévaloir du même avantage que les autres : ce qui lui manque en effet, c'est le caractère fondamental de la science, la subordination des faits connus dont elle ne peut nous offrir que la simple coordination. Il n'y a donc pas de système en histoire, comme dans toute autre science. L'histoire est une connaissance, sans être une science, car nulle part elle ne connaît le particulier par le moyen de l'universel, mais elle doit saisir immédiatement le fait individuel, et, pour ainsi dire, elle est condamnée à ramper sur le terrain de l'expérience. Les sciences réelles au contraire planent plus haut, grâce aux vastes notions qu'elles ont acquises, et qui leur permettent de dominer le particulier, d'apercevoir, du moins dans de certaines limites, la possibilité des choses comprises dans leur domaine, de se rassurer enfin aussi contre les surprises de l'avenir. Les sciences, systèmes de concepts, ne parlent jamais que des genres : l'histoire ne traite que des individus. Elle serait donc une science des individus, ce qui implique contradiction. Il s'ensuit encore que les sciences parlent toutes de ce qui est toujours, tandis que l'histoire rapporte ce qui a été une seule fois et n'existe plus jamais ensuite. De plus, si l'histoire s'occupe exclusivement du particulier et de l'individuel, qui, de sa nature, est inépuisable, elle ne parviendra qu'à une demi-connaissance toujours imparfaite. Elle doit encore se résigner à ce que chaque jour nouveau, dans sa vulgaire monotonie, lui apprenne ce qu'elle ignorait entièrement. Arthur SCHOPENHAUER (1788-1860)

« Seule l'histoire ne peut vraiment pas prendre rang au milieu des autres sciences, car elle ne peut pas se prévaloir du même avantage que les autres : ce qui lui manque en effet, c'est le caractère fondamental de la science, la subordination des faits connus dont elle ne peut nous offrir que la simple coordination.

Il n'y a donc pas de système en histoire, comme dans toute autre science.

L'histoire est une connaissance, sans être une science, car nulle part elle ne connaît le particulier par le moyen de l'universel, mais elle doit saisir immédiatement le fait individuel, et, pour ainsi dire, elle est condamnée à ramper sur le terrain de l'expérience.

Les sciences réelles au contraire planent plus haut, grâce aux vastes notions qu'elles ont acquises, et qui leur permettent de dominer le particulier, d'apercevoir, du moins dans de certaines limites, la possibilité des choses comprises dans leur domaine, de se rassurer enfin aussi contre les surprises de l'avenir.

Les sciences, systèmes de concepts, ne parlent jamais que des genres : l'histoire ne traite que des individus.

Elle serait donc une science des individus, ce qui implique contradiction.

Il s'ensuit encore que les sciences parlent toutes de ce qui est toujours, tandis que l'histoire rapporte ce qui a été une seule fois et n'existe plus jamais ensuite.

De plus, si l'histoire s'occupe exclusivement du particulier et de l'individuel, qui, de sa nature, est inépuisable, elle ne parviendra qu'à une demi-connaissance toujours imparfaite.

Elle doit encore se résigner à ce que chaque jour nouveau, dans sa vulgaire monotonie, lui apprenne ce qu'elle ignorait entièrement. APPROCHE DE LA PROBLÉMATIQUE Bien lire le texte : analyser soigneusement les principaux concepts qui permettent à l'auteur d'opposer l'histoire et le sciences et qui, le plus souvent, sont groupés par deux : coordination et subordination, science et simple connaissance, individuel et universel, individu et genre, toujours et une seule foi, etc.

Essayer d'enchaîner ces couples de notions les uns au autres afin de déterminer la progression des idées du texte, qui n'est pas une simple juxtaposition d'arguments séparés. Thème: la valeur de l'histoire comparée aux autres sciences. Thèse : l'histoire ne peut être une science parce que son objet le fait individuel, ne se prête pas, par essence, à une connaissance scientifique. Plan : - (1.1 à 6) L'histoire n'est pas systématique. - (1.

6 à 15) L'histoire traite de l'individuel. - (1.15 à20) L'histoire ne peut être achevée. Recherche de l'intérêt philosophique : Schopenhauer s'e prend dans ce texte à l'idée que l'histoire est une science coma le sont les mathématiques, la physique ou l'astronomie.

Cette page est écrite à un moment où l'histoire, au sens moderne du terme, en était encore à ses débuts et se cherchait encore rigueur, la solidité qui lui étaient déniées jusqu'alors.

La prise de position de Schopenhauer, pour rétrograde qu'elle apparaisse à un lecteur de ce siècle, doit nous conduire à nous interroger sur l'essence et le statut de l'histoire et de la science : suffit-il que l'histoire (ainsi, peut-être, que les autres sciences humaines) prétende établir des lois, se donne des airs scientifiques pour qu'elle soit une science véritable? À quelles exigences une connaissance doit-elle répondre pour être une science au plein sens du terme? Enfin, doit-on attendre de toute les sciences la même scientificité, toutes les sciences doivent elles être jugées telles, en tant que sciences, par exemple, st le modèle des mathématiques? [Introduction] Dans ce texte, Schopenhauer s'interroge sur la valeur à accorder à l'histoire : contre ses contemporains qui, au XIXe siècle, essayent de fonder l'histoire comme science véritable, Schopenhauer affirme l'impossibilité pour la connaissance historique de se constituer scientifiquement.

Il ne s'agit pas d'une question de fait (l'histoire ne serait pas encore suffisamment développée pour devenir une science, comme le sont devenues la physique et la chimie), mais d'un problème de droit: l'objet qu'étudie l'historien ne peut aucunement devenir l'objet d'une science, l'histoire ne répond pas aux conditions requises pour toutes les sciences.

En ce sens, si l'histoire ne peut devenir une science, c'est-à-dire être constituée en système, c'est parce qu'elle traite de l'individuel et qu'ainsi elle ne peut espérer atteindre une connaissance achevée. [I.

Histoire et système.] [1.

L'histoire et les autres sciences.]. »

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