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Action et pensée ?

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« Définition des termes du sujet: PENSÉE: Faculté de connaître, de comprendre, de juger, de raisonner, qui est censée caractériser l'homme, par opposition à l'animal.

Synonyme d'entendement, de raison. PENSER: Exercer une activité proprement intellectuelle ou rationnelle; juger; exercer son esprit sur la matière de la connaissance; unir des représentations dans une conscience. « Au commencement était le verbe », murmure le Faust de Goethe en parcourant les livres sacrés.

Mais il rectifie vivement et prononce avec assurance : « Au commencement était l'action ».

Il substitue ainsi le fait à la valeur et, pour ainsi dire, l'homme à Dieu, car l'homme agit en quelque sorte avant de penser, la pensée sous sa forme véritable apparaissant, semble-t-il, comme une réflexion sur l'action.

N'a-t-on pas souvent admis que « penser c'est se retenir d'agir » ? L'action serait donc primitive, somme naturelle de toutes les activités qui définissent le vivant, synthèse des mouvements qui composent nos actes, créant des situations de fait, de l'inévitable à partir de quoi on reçoit des impressions, on cherche à donner un sens aux agissements.

C'est alors que se conçoivent des lignes d'adaptation qu'il faut reprendre et modifier avec nos conduites propres : ainsi surgirait ce qu'on peut nommer « penser ». Mais il arrive que, d'une manière plus catégorique, on ne se contente pas de distinguer l'action et la pensée; on les oppose, comme en témoignent les expressions : homme d'action, homme de pensée, par lesquelles on se réfère à des types antagonistes.

L'exposé psychologique propose même souvent la représentation d'une vie active que l'on ne met point au niveau d'une vie intellectuelle (ou cognitive).

(Entre les deux, l'affectivité serait comme un accompagnement avec ses incidents — tantôt effet et tantôt cause —, un fond de tableau, en dehors, si l'on peut dire, des manières d'être auxquelles on accorde une valeur caractéristique).

Il convient donc de voir si, sur le plan de la description comme sur celui de la recherche, on peut légitimement définir en les distinguant les deux termes en cause.

Mais surtout il faut, au-delà d'un schéma de ce genre, tenter d'opérer une réduction de ces mots l'un à l'autre, ou, mieux encore, comprendre comment ils représentent les éléments d'une synthèse qui se fait.

Il n'est pas assuré, malgré l'affirmation de Faust, que l'action, encore qu'elle apparaisse comme une manifestation primitive, se définisse d'elle-même.

Peut-être, au con-traire, en tant qu'expression d'une structure, porte-t-elle déjà un sens (dont le sujet qui agit peut ou non prendre conscience), un sens auquel on pourrait donner une valeur en termes de réalité pensante ou pensée...

Toutefois ce sont les conditions de l'action et de la pensée qu'il convient d'évoquer pour se prononcer, éventuellement, sur la nature de l'une et de l'autre.

Or, la plus générale de ces conditions paraît dans le fait que, lorsque nous prononçons les mots action ,et pensée, nous évoquons des ensembles : — Toute pensée est faite d'idées, de représentations; elle est un système d'implications et de relations. — Quant à l'action, elle se traduit par des mouvements, mais ne se réduit pas à ceux-ci d'une façon quelconque : l'action a une structure; elle a un commencement et une fin.

Elle apparaît comme un enchaînement significatif.

En énumérant des types d'activités psycho-physiologiques, on évoque seulement des éléments d'action, non pas l'action elle-même.

On peut dire, par exemple, que l'instinct est action; mais la suite de réflexes en lesquels on décompose un acte instinctif ne sont pas eux-mêmes action.

(Mieux encore, si l'attitude instinctive est sousjacente à des modes plus complexes d'activité, ce qu'on pourra alors nommer action se découpera dans une autre matière, son unité représentera un système autrement composé).

On est donc amené à remarquer que l'action ne se confond pas avec l'agitation, bien qu'il y ait des actions désordonnées comme des pensées hasardeuses : elle comporte une sorte de justification a priori en tant qu'elle se déroule selon un schéma dynamique.

Finalement, il y a des thèmes d'activité comme il y a des thèmes de la pensée.

Bref, action et pensée sont toutes deux des fonctions et ce sont ces fonctions, au sens fort du mot, qu'il s'agit d'atteindre comme telles. A) Il faut chercher les prémices de l'action dans le mouvement et le devenir dont la nature est à la fois la scène unique et l'acteur innombrable.

Mais c'est à l'échelle du vivant que l'on trouverait, dans l'irritabilité de la matière, la source à la fois du sentir et de l'agir.

Or, la matière vivante ne peut demeurer en l'état : elle n'est ni pur morcellement ni constante dégradation.

Elle implique des unités spécifiques qui ne peuvent subsister qu'en s'accroissant.

D'où des activités véritables liées à des comportements fondamentaux, relatifs à la nutrition et à la reproduction.

La source immédiate de l'action est à ce niveau la stimulation interne ou externe qui révèle des structures d'actes.

En réagissant, peut-on dire, le vivant se donne les moyens d'agir.

D'où la notion de tendance et cette idée, que l'on trouve chez nombre de philosophes, qu'être, c'est tendre.

La monade, écrivait Leibniz, est « un automate incorporel qui n'a ni porte ni fenêtre et dont tout l'être est de tendre ».

Par là il représentait le principe même de l'activité comme fondement de l'être.

En somme s'il n'existait qu'une tendance, l'inclination qu'elle figurerait ne manquerait pas de se réaliser.

En fait l'homme, dit-on, est un faisceau de tendances dont les diverses combinaisons représentent à la fois la matière et l'obstacle à ses actions véritables, conscientes, c'est-à-dire concertées, voulues. L'action dispose donc, ou plutôt doit s'accommoder d'un arsenal d'activités qui révèlent un automatisme naturel et acquis, dont la présence semble correspondre à quelque forme d'adaptation, à des habitudes prises dans des situations typiques de l'existence des espèces ou des individus.

Mais l'action ne va pas sans jugement, quels que soient la rapidité, le caractère intuitif qu'elle fasse alors paraître.

Par là, agir c'est constamment percevoir et s'adapter, se jeter, si l'on veut, à corps perdu en des mouvements où cependant le corps ne cesse de se sauver. C'est ainsi que le langage confond réflexe et jugement-réflexe, comme le montre bien l'appréciation portée, par exemple, sur un bon conducteur d'automobiles.. »

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