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A quoi servent les religions ?

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« Les religions peuvent être définies comme des systèmes de croyances et de pratiques relatives à des choses sacrées, et qui unissent des individus dans une communauté morale.

La question des religions est donc distincte de celle de la foi, qui concerne le rapport de croyance qu'un individu entretient avec une instance divine.

Dans la mesure où la religion crée une communauté et un ensemble de pratiques et de règles, se demander à quoi servent les religions n'est pas se demander à quoi sert de croire en Dieu, mais plutôt à quoi sert de former de telles communauté et de telles règles pratiques.

Doit-on penser que la fonction de la religion est à comprendre avant tout comme une fonction sociale, dans la mesure où elle réunit des individus ? Ou bien que la fonction première est à chercher dans les besoins de l'individu, et qu'elle ne devient sociale que secondairement ? Par ailleurs, si la religion et la foi appellent des problématiques distinctes, peut-on pour autant penser la fonction de la religion indépendamment de la mise en œuvre et de la pratique de la foi ? Autrement dit, que peut apporter la religion à la foi individuelle ? Après avoir envisagé l'idée que les religions servent à combler des peurs et désirs individuels au sein de la société, nous envisagerons la compréhension de la fonction des religions comme étant d'emblée sociale.

On pourra alors distinguer entre deux éléments au sein des religions, correspondant à deux fonctions complémentaires, l'une sociale, l'autre spirituelle. 1° Les religions comme réponse au désarroi individuel Freud s'interroge sur le fait religieux en tant que ce qui est commun aux différentes religions.

Son analyse amène à considérer la religion dans sa dimension collective, mais en ramenant sa fonction à la psychologie individuelle.

La religion est ainsi une réponse collective, culturelle, à un désarroi de l'individu.

Ce désarroi possède une dimension universelle dans la mesure où il prend sa source dans le besoin d'être protégé et aimé, qui, dans l'enfance, est satisfait par le père.

Mais ce désir et l'angoisse qu'entraîne sa frustration ne prend pas fin avec l'enfance, l'homme cherche alors un père plus puissant, qu'il trouve dans la Providence et la bonté divine.

L'idée d'un ordre de l'univers apaise l'angoisse face aux injustices rencontrées au cours de la vie, et la croyance dans une vie après la mort permet de penser un lieu où les désirs frustrés au cours de l'existence pourront se satisfaire.

Or, ce n'est pas seulement par la foi individuelle que ces fonctions peuvent être réalisées, mais par la dimension collective, sociale de la religion, car en apaisant la détresse des individus, la religion apparaît comme le premier facteur de cohésion d'une civilisation.

Elle permet en effet, au niveau collectif, de compenser les frustrations imposées par la vie en communauté et de supporter le respect des interdits fondamentaux qui forment la base des sociétés, comme l'interdit de l'inceste et celui du meurtre.

Les religions servent ainsi à combler des désirs et des angoisses individuels, mais cette fonction s'accomplit au niveau de la communauté, en assurant à chacun un sentiment d'appartenance et de protection au sein de cette communauté. 2° Les religions comme vénération de la réalité sociale Ne peut-on aller plus loin que l'analyse freudienne en affirmant que les religions n'ont pas seulement pour fonction d'aider l'individu à vivre en société, mais que l'essence même de la religion comme phénomène social amène à lui donner une fonction qui soit directement collective ? C'est que qu'affirme l'analyse du phénomène religieux par le sociologue Emile Durkheim, dans Les formes élémentaires de la vie religieuse.

Durkheim pense la fonction des religions à partir de l'analyse des sociétés totémiques anciennes, qui l'amène à définir le phénomène religieux comme la séparation entre deux domaines de réalité, le profane et le sacré.

Les pratiques et rites organisés autour de la vénération du sacré ont selon lui pour fonction véritable non pas la vénération de l'instance totémique en tant que telle, mais de la réalité sociale en tant qu'elle est une réalité qui transcende chaque individu.

En effet, le totem représente le clan : sa vénération peut donc être comprise comme ayant pour fonction cachée d'organiser le respect de la réalité sociale, de la conscience collective.

La fonction de la religion doit ainsi être comprise comme étant d'emblée sociale et non individuelle : par l'organisation de pratique collectives, les religions sont le premier et le plus important des fondements de la société : elles font d'elle un tout cohérent et organisé, où chaque individu, en pensant être soumis au divin qu'il vénère, témoigne en réalité de sa soumission à l'ordre social.

Cette fonction ne doit selon Durkheim pas être pensée d'une manière négative comme une aliénation de l'individu au social, mais comme le sous bassement sans lequel aucune vie organisée en groupe ne serait possible. 3° Les religions dynamiques servent à transmettre un élan spirituel dynamique à l'humanité Freud comme Durkheim pensent la fonction des religions comme ce qui garantit la cohérence de la société en permettant à l'individu de consentir des sacrifices pour la vie en communauté sans les ressentir comme tels.

Ne peut-on cependant penser également la fonction de la religion à partir de ce qui la différencie des autres types de communautés, à savoir son lien avec un principe spirituel ? Bergson, dans Les deux sources de la morale et de la religion , pense deux types de religions correspondant à deux fonctions : la religion statique sert à assurer la cohésion du groupe et à se prémunir contre l'angoisse de la mort.

La religion dynamique, à l'inverse, s'appuie sur l'élan spirituel de la mystique créative et sur l'amour : elle a pour résultat de transmettre à l'humanité un élan créateur, et de transmettre aux obligations morales un principe de spiritualité.

Elle introduit ainsi au sein du statique une vie qui amène l'homme à dépasser la matérialité et le domaine de la pure obligation, morale ou sociale.

Cette analyse montre que la fonction de la religion peut être pensée de manière multiple, chaque religion possédant à un moment donné dans des proportions variées une part statique et une part dynamique. Conclusion La fonction de la religion, en tant qu'elle est un système qui organise la pratique de la foi individuelle, peut tout d'abord être comprise comme une réponse sociale aux angoisses et aux désirs de l'individu qui éprouve le besoin de la foi.

La religion permet alors à l'individu de supporter les frustrations, peurs et sacrifices engendrés par le cours de sa vie en société.

Cependant, dans la mesure où la religion est un phénomène social, sa fonction peut être comprise comme étant d'emblée dédiée à la cohésion de la société, cette cohésion étant permise par le culte rendu par la religion à la société comme instance qui transcende l'individu.

On peut alors distinguer au sein des religions deux éléments correspondant à deux fonctions opposées mais non exclusives : un élément statique qui soutient la cohésion sociale en fondant le respect des obligations morales, et un élément dynamique qui introduit dans l'humanité un élan créateur et spirituel qui répond aux besoins de l'homme de dépasser la dimension matérielle de la vie sociale.. »

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