À l'artiste, tout est-il permis ?
Extrait du document
«
L'artiste peut-il tout se permettre d'un point de vue artistique, social ? Son statut lui donne-t-il toutes les libertés ?
Ou sa pratique est-elle totalement libre ? Si l'artiste est l'individu capable de créer une oeuvre d'art ayant pour
finalité la beauté, alors celui-ci peut-il tout faire, faire n'importe quoi ou est-il contraint par des règles, des
techniques, contraint par une finalité ? À l'artiste rien d'impossible ? La liberté est-elle en définitive le critère de
définition de l'artiste ? Le génie serait précisément celui qui donne ses règles à l'art (si l'on suit la définition que
propose Kant du génie dans la Critique de la faculté de juger).
Mais en même temps l'expression "tout est permis"
peut laisser entendre que l'artiste serait aussi celui qui peut faire n'importe quoi.
Or cela ne témoigne-t-il pas une
incompréhension de l'activité artistique et de son travail, de ses contraintes ? L'artiste n'est pas celui qui fait
n'importe quoi.
Même sa marginalité, ses excès répondent à une vision précise de l'existence.
Ce qui apparaît comme
n'ayant aucun sens a pourtant une résonance intime pour lui : par exemple, les tableaux de Picasso, ou les objets
de Duchamp ont provoqué un scandale, alors qu'ils répondaient à une esthétique
très travaillée.
Les tableaux de Pollock peints avec les pieds peuvent paraître de
l'excentricité, alors que ce peintre américain cherchait à donner un mouvement
nouveau à la représentation.
Où s'arrêtent les limites de l'artiste ? Et ces limites ontelles un sens ?
Analyse du sujet :
Nous nous heurtons à plusieurs difficultés dès que nous tentons de définir la notion
d'art :
-
premièrement, les critères qui distinguent ce qui est de l'art de ce qui n'en est
pas varient dans l'histoire.
Aujourd'hui, on peut même dire qu'il n'y a plus de critère
admis.
-
L'absence de critère pose un second problème : personne n'a de légitimité à
dire ce qu'est l'art et ce qu'il n'est pas.
L'art ce réduit aujourd'hui le plus souvent à
ce qui me plait.
Il devient un concept d'appréciation quasiment vide.
On peut donc, en gardant à l'esprit les réserves ci-dessus, tenter quelques rapprochements et distinctions : on
pourrait dire de l'art qu'il est le plus souvent une technique ou un savoir-faire.
Il peut de ce fait être rapproché
de l'artisanat.
La pièce produite par un artisan peut elle-même acquérir le statut d'oeuvre d'art, bien qu'elle
soit prioritairement destinée à être utilisée.
L'art n'est cependant pas toujours une technique : en témoigne
certaines oeuvres contemporaines qui ne réclament aucune maîtrise (l'urinoir de Duchamp est un produit
industriel !).
L'expression « monde de l'art » souligne aussi le fait que l'art est largement institutionnalisé aujourd'hui : il est
lié à des processus commerciaux (échanges entre musées, expositions, performances, etc.), ce qui interdit de
parler d'une absolue gratuité de l'art.
L'art n'a pas toujours pour but de viser le beau, comme en témoignent des oeuvres comme les Papes
franchement morbides de Francis Bacon : art et beauté ne se confondent donc pas.
L'oeuvre d'art n'est pas nécessairement perceptuelle : une performance, un geste, peut être artistique.
L'art
contemporain manifeste largement cette tendance à la dématérialisation de l'art, au glissement du perceptuel
vers le conceptuel.
Demander si tout est permis à l'artiste, c'est poser la question des règles : y a-t-il des règles de l'art ou bien
l'artiste peut-il faire n'importe quoi ?
Problématisation :
Le premier problème est celui de la distinction entre ce qui est de l'art et ce qui n'en est pas : en effet, si tout est
permis, alors tout peut en droit devenir art.
Mais alors, l'art ne s'oppose plus à rien : si la notion d'art ne distingue
plus rien, elle est alors vide de sens.
I – Tout peut-il devenir art ?
Que tout puisse ou non devenir art, un point reste certain : tout n'est pas de fait d'emblée de l'art.
Il faut alors
demander :
II – Comment ce qui n'est pas de l'art en devient ?
Proposition de plan :
I – Tout peut-il devenir art ?
Marc Jimenez analyse dans La querelle de l'art contemporain l'évolution de l'art classique à l'art contemporain : il
note la tendance à la dématérialisation et le glissement corrélatif vers un art plus conceptuel que perceptuel.
Par
exemple, le morceau de musique contemporaine 4'33'' de John Cage est un silence de 4 minutes et 33 secondes.
Ce
qu'il y a d'artistique selon Jimenez, c'est alors le concept même du morceau, à savoir que ce sont les bruits
parasites émis par le public (sonneries de portable, toussotements, etc.) qui le constituent.
Ce morceau signifie
également contre les règles de l'art classique qu'un morceau de musique n'a pas besoin de contenir de notes.
De
même, l'urinoir de Duchamp montre que l'oeuvre d'art n'a pas besoin d'être une production originale mais peut être.
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