LES SOURCES, JAUGER DES ABÎMES

« RÉINVENTER LES SOURCES, JAUGER DES ABÎMES Quelles que soient la richesse et la confusion de cette période, il est commode de lui trouver un point de départ net et peu co�testable en la personne de Jacques Lefèvre, originaire d'Etaples en Picardie.

Né aux alentours de 1450, il vient étudier au collège du Cardinal-Lemoine, fondé pour les « écoliers de la Nation picarde », où il deviendra sans coupure enseignant pour la philosophie et les mathématiques jusqu'en 1508.

Son activité sera avant tout tournée vers l'édition et la traduction des textes essentiels, qui vont infléchir en France une pensée nouvelle avec un retard de plusieurs décennies sur l'Italie.

On s'accorde à voir dans l'helléniste Marsile Ficin l'instigateur à Florence de la redé­ couverte et de la diffusion d'un héritage grec longtemps occulté, qui allait bouleverser l'esprit européen.

Ce trésor, surgi au hasard de l'apparition de nouveaux manuscrits, allait être reçu avec l'auréole d'une nouvelle révélation, clés d'un savoir décisif jusqu'alors dérobé.

L'invention opportune de l'imprimerie se proposait à point nommé pour cette nouvelle disponibilité des textes. Jacques Lefèvre se rend à plusieurs reprises en Italie, où il fré­ quente la maison d'édition phare d'Alde Manuce à Venise.

En 1492, il rencontre ces deux ordonnateurs d'un monde nouveau que sont Ficin et le prodigieux Pic de la Mirandole, comme pour y prendre le relais d'une mission en terre de France.

Le génie de Lefèvre se manifestera dans l'extraordinaire sûreté d'intuition. »