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Y a-t-il un progrès moral ?

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« I.

- L'observation des variations de la conscience morale a tenté les philosophes de tous les temps et la peinture de ces variations a été l'un des thèmes favoris des sceptiques.

Cette étude nous intéresse encore aujourd'hui, et nous devons nous demander, en particulier, quelle est la signification exacte de l'évolution incessante des données de la conscience. Peut-on parler d'un progrès de l'humanité, en morale ? Ou bien y a-t-il stagnation, ou même décadence ? En réalité, la question peut être résolue de façons différentes, selon le point de vue auquel on se place. II.

- S'il s'agit des idées morales, il est indéniable qu'il y a progrès.

L'histoire des institutions et de la littérature ellemême prouve que les consciences sont de mieux en mieux instruites de leurs devoirs.

D'après M.

G.

Richard (Manuel de morale, p.

5o-54), le progrès des idées morales se caractérise par « une spécification croissante des sentiments et des jugements, un progrès quantitatif et qualitatif de la connaissance morale, enfin une harmonie croissante entre les tendances morales de la nature humaine ». 1° Les données de la conscience morale, jugements et sentiments, d'abord subordonnées à la théologie et à la religion, tendent à s'en dégager de plus en plus et à acquérir une autonomie dont le terme dernier est la théorie kantienne de la morale indépendante. 2° La connaissance morale elle-même s'accroît en quantité et en qualité ; l'humanité s'élève chaque jour à des notions plus justes et plus étendues de ses droits et de ses devoirs : dans toutes les branches de la morale, morale familiale, sociale, civile et même internationale, on peut constater un progrès.

Entre autres exemples, la prohibition de l'esclavage, des tortures, de la vengeance privée, la guerre considérée comme une crise passagère et anormale destinée à ramener la paix, etc., prouvent que l'idéal conçu par l'humanité est plus élevé aujourd'hui qu'autrefois.

Ce progrès réside à la fois dans l'élimination des erreurs morales, et dans une meilleure conception des fins morales de l'action. 3° Enfin le progrès des idées morales réside dans une harmonie plus grande des éléments de la vie morale, et dans le nombre croissant des notions communes à toute l'humanité. III.

- Ce progrès évident que nous trouvons dans la conception de l'idéal moral est-il suivi d'un progrès dans les faits ? Autrement dit, les règles morales sont-elles de mieux en mieux observées ? Ici encore, on serait tenté de répondre tout de suite par l'affirmative, puisque, d'une façon générale, les actions semblent matériellement plus conformes au bien tel qu'il est d'ordinaire conçu ; et on en tirerait une prouve de l'utilité pratique de la morale en tant que science.

Sans aller jusqu'à dire avec Descartes "qu'il suffit de connaître le bien pour le faire", on semblerait fondé à admettre que la science de la morale nous facilite grandement l'accomplissement de nos obligations, en nous les faisant mieux connaître, et que par suite, le progrès dans les idées morales est suivi du progrès dans les actes humains. La conclusion serait prématurée, car si l'ordre extérieur est mieux observé, peut-être ne faut-il voir dans ce fait que le résultat d'une organisation sociale meilleure, d'une contrainte physique et morale plus grande de la société sur chacun de ses membres. Il semble donc impossible de résoudre ce second aspect du problème; c'est que la véritable moralité réside essentiellement dans l'intention, c'est-à-dire dans un facteur intime qui échappe aux investigations extérieures. Mais si ce problème est insoluble pour une large part, il ne faut pas conclure à son inutilité : c'est la notion d'un progrès possible qui donne à la morale son véritable rôle ; elle doit avoir pour but de nous pousser à réaliser ce progrès en nous-mêmes, et à le faire réaliser autour de nous dans la mesure de nos moyens.. »

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