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La division du travail permet-elle un progrès moral ?

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« On imagine aisément que la division du travail a permis à l'homme d'alléger sa charge de travail, qu'elle lui a simplifié le travail et que de surcroît l'accroissement de la productivité a permis une consommation de masse et plus de confort.

On pense aussi à la baisse du temps de travail qui a offert à l'homme plus de loisirs et de repos, liée à la division du travail.

Mais n'y-t-il pas des contreparties, cette division du travail ne risque-t-elle pas de diminuer les capacités créatives des individus, les entraîner dans des tâches répétitives et abrutissantes ? Aussi, il faut pour cela examiner l'histoire de la division du travail et les différentes réflexions des philosophes et sociologues sur ce sujet. 1) Une histoire de la division du travail. Dans la « République », Platon affirme que c'est « l'impuissance où se trouve chaque homme de se satisfaire à lui-même et le besoin qu'il éprouve d'une multitude de choses.

» (Livre II) qui donne naissance à une cité.

Il y a trois besoins fondamentaux : la nourriture, l'habitation, le vêtement.

A ces trois besoins correspondent trois travailleurs, « le laboureur, le maçon et le tisserand », auxquels « nous pouvons ajouter le cordonnier » par souci de symétrie puisqu'il s'agit d'une reconstruction intellectuelle et non historique.

A partir de là, Platon affirme que deux solutions sont possibles : • Soit ces quatre activités sont confiées à chaque travailleur qui partagera son temps de travail en quatre.

C'est ce qui se passe dans les communautés agraires « primitives ». • Soit chaque travailleurs se spécialise dans une des quatre activités et y consacre la totalité de son temps de travail.

C'est ce qui existe dans les sociétés actuelles.

C'est ce qu'on appelle la division sociale du travail . Platon est un des premiers philosophes à avoir remarqué qu'« on fait plus et mieux et plus aisément, lorsque chacun ne fait qu'une chose, celle à laquelle il est propre » (La République).

Sur ce point, philosophes, économistes, sociologues et anthropologues semblent s'accorder.

Il n'est guère de sociétés, aussi restreintes soient-elles, qui ne connaissent une division des tâches.

À commencer par les sociétés animales.

Chez les abeilles, par exemple, les ouvrières changent de travail à mesure qu'elles avancent en âge et elles participent ainsi à tous les travaux de la ruche (construction de rayons, nourrissage, nettoyage, récolte...). Dans les sociétés humaines, la division du travail adopte des formes différentes : il y a des tâches réservées à l'un ou à l'autre sexe d'abord (la femme élève les enfants, l'homme leur procure des moyens de subsistance), puis des fonctions qui peuvent être économiques, politiques, administratives, judiciaires, artistiques, scientifiques, chacune de ces sphères d'activité se trouvant à son tour divisée en de nombreuses autres spécialités.

Pour cette raison, ce qui était courant avant le XVIIIe siècle n'est plus possible aujourd'hui : un savant doit se spécialiser et restreindre ses recherches le plus souvent à un unique problème. 2) La division du travail au début du capitalisme. Adam Smith, le fondateur de la science économique, écrit en 1776 dans ses Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations : « Dans chaque art, la division du travail, aussi loin qu'elle peut y être portée, donne lieu à un accroissement proportionnel dans la puissance productive du travail.

» Il appuie sa démonstration sur l'exemple, devenu célèbre, de la manufacture d'épingles : si deux ouvriers employés à la fabrication des épingles travaillaient chacun de son côté, ils ne produiraient pas plus de vingt épingles par jour ; en se partageant les tâches, ils peuvent en fabriquer, dans le même temps, quarante-huit mille.

Cependant, si la parcellarisation des tâches augmente indéniablement la productivité d'une manufacture, elle présente pour l'ouvrier l'inconvénient de le soumettre à une « déculturation » technique.

Tandis que l'ouvrier de jadis créait véritablement un objet et y inscrivait sa propre empreinte, l'ouvrier qui travaille dans une manufacture est chargé d'un tronçon de la production et le produit fini lui échappe. A la fin du XVIII ième siècle, l'économiste Smith souligne l'accroissement de productivité apporté par la division du travail, telle qu'elle se développe dans les manufactures lors de la première révolution industrielle. « Prenons un exemple dans ne manufacture de la plus petite importance, mais où la division du travail s'est fait souvent remarquer : une manufacture d'épingles. Un homme qui ne serait pas façonné à ce genre d'ouvrage, dont la division du travail a fait un métier particulier, ni accoutumé à se servir des instruments qui y sont en usage, dont l'invention est probablement due encore à la division du travail –cet ouvrier, quelque adroit qu'il fût, pourrait peut-être à peine faire une épingle dans toute sa journée, et certainement il n'en ferait pas une vingtaine.

Mais de la manière dont cette industrie et maintenant conduite, non seulement l'ouvrage entier forme un métier particulier, mais même cet ouvrage est divisé en un grand nombre de branches, dont la plupart constituent autant de métiers particuliers.

Un ouvrier tire le fil à la bobine, un autre le dresse, un troisième coupe la dressée, un quatrième empointe, un cinquième est employé à émoudre le bout qui doit recevoir la tête.

Cette tête est elle-même l'objet de deux ou trois opérations séparées : la frapper est une besogne particulière ; blanchir les épingles en est une autre ; c'est même un métier distinct et séparé que de piquer les papiers et d'y bouter les épingles ; enfin l'important travail de faire une épingle est divisé en dix-huit opérations distinctes ou à peu près qui, dans certaines fabriques sont remplies par autant de mains différentes, quoique dans. »

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