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Y a-t-il des fondements naturels a l'ordre social ?

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« CORRIGÉ FORMULATION DES ENJEUX D'UNE QUESTION • EN RÉSUMÉ...

(analyse du sujet) L'expression y a-t-il situe la question posée au niveau du fait (= existe-t-il effectivement).

La notion de fondement recouvre, de façon générale, ce qui soutient (matériellement) ou justifie l'existence de quelque chose.

Le fondement peut donc s'entendre au sens propre (assise, origine effective) mais aussi au sens figuré (légitimité).

Quant à la notion d'ordre social, elle désigne soit l'aspect structuré de toute vie sociale (sens large : organisation sociale en général), soit la réalité particulière d'une certaine société, organisée et structurée d'une façon spécifique.

Cette ambivalence est d'importance pour la signification du sujet, puisqu'elle détermine en fait deux directions de réflexion. Quant à la distinction social/naturel proposée ici, elle prend une signification toute particulière dans le contexte de l'énoncé.

On a l'habitude de voir dans le naturel, en tant qu'il s'oppose au social, ce qui est premier, originaire, donné d'emblée dans la disposition et la constitution initiales du monde.

En ce sens, le naturel serait de l'ordre du présocial, du permanent et de l'originaire.

Se demander si un ordre social, ou l'ordre social en général, peut relever de « fondements naturels » c'est donc s'interroger tout à la fois sur sa pérennité et sa nécessité, son origine effective et sa légitimité.

Mais il faut noter qu'en raison de l'ambivalence de la notion d'ordre social, signalée plus haut, une telle interrogation donne lieu à deux recherches qui ne sont peut-être pas séparables (peut-on dissocier la conception de l'ordre social en général d'une étude différentielle des organisations sociales particulières ? Tout ordre social singulier ne se présente-t-il pas, dans l'idéologie qui s'efforce de le justifier, comme la seule réalisation possible de l'ordre social en général, comme l'Ordre social par excellence ?). • FORMULATION DE L'ENJEU DE LA QUESTION. Comme le montre l'analyse succincte de la question, ce qui est en cause, c'est en fait le fonctionnement idéologique du recours au « naturel ».

Couramment, l'entreprise de justification d'un ordre social donné consiste à le faire dériver de nécessités naturelles et, partant, à le présenter comme le seul ordre possible, les autres types d'ordre ayant existé ou existant recevant dès lors un statut d'ordres « ratés », incomplets, immatures, etc.

C'est d'ailleurs d'un même mouvement que l'on pose un ordre social comme le seul ordre possible (la seule façon rationnelle et logique d'organiser la société) et qu'on lui attribue des fondements naturels.

Une approche critique d'une telle justification est nécessaire pour tout citoyen qui se propose de réfléchir sur la société dans laquelle il vit, et notamment sur les différentes relations de pouvoir (rapports de force ou de domination, inégalités, etc.) qui déterminent son fonctionnement.

Les facteurs sociaux de l'inégalité (raciale, socio-économique, culturelle) sont-ils, par exemple, l'effet de déterminismes naturels ? Est-il légitime de fataliser les guerres, l'injustice, la misère, comme on semble le faire si souvent ? Redéfinir les rapports réels entre le naturel et le social, c'est dégager aussi clairement que possible le champ d'intervention des hommes eux-mêmes, et leur « rendre » la maîtrise d'un devenir social (ou d'un ordre social) qui trop souvent est pensé comme un enchaînement inéluctable, réglé de toute éternité par des déterminismes naturels (cf.

plus loin la rubrique « histoire »).

Montrer, par exemple, que les nécessités « naturelles » qui fondent la vie sociale (s'unir et se diviser le travail pour mieux vivre, gagner en loisirs et en sécurité, etc.) ne sauraient en aucun cas justifier une hiérarchisation des hommes, une exploitation de l'homme par l'homme (ou d'un peuple par un autre), c'est inciter à distinguer ce qu'on croit pouvoir « tirer de la nature » et ce qu'en tout état de cause il faut bien attribuer à un type particulier de devenir social (ou de société).

Cf.

sur ce point la démarche exemplaire de Jean-Jacques Rousseau dans le Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes.

Le racisme, l'idéologie des origines (le sang noble...) ou du don (l'intelligence innée) ou encore de l'inégalité naturelle des classes sociales (« l'incapacité des prolétaires » ou la « couardise des esclaves »...) seront dès lors dénoncés comme il convient, et l'enjeu de la question posée sera de définir les conditions d'une telle critique. • « Fondement : métaphore tirée de l'architecture : ce sur quoi repose un certain ordre ou un certain ensemble de connaissances.

Ce qui donne à quelque chose son existence ou sa raison d'être.

» Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie.

Étudier la réalité qui apparaît dans cette définition : d'une part « reposer sur », et d'autre part « raison d'être ». • Remarquer que « fondements naturels » est ici au pluriel. citations • Leroi-Gourhan, Le geste et la parole : « Il faut admettre qu'à ses stades les plus primitifs même, l'Anthropien est un être social » p.

205. « C'est pourquoi la locomotion sera ici considérée comme le fait déterminant de l'évolution biologique, exactement comme elle apparaîtra comme le fait déterminant de l'évolution sociale naturelle » p.

42. « Les Anthropiens partagent avec l'ensemble des Primates la possession d'une denture courte, aux molaires broyantes et d'un tube digestif à estomac simple, à l'intestin de longueur moyenne, dans lequel les fermentations assimilatrices des celluloses ne jouent pas de rôle notable.

Le terme le plus simple, fondamental, de l'économie humaine tient à ce dispositif de survie alimentaire...

» « Ce type d'alimentation pose une première condition de la: forme du groupe primitif...

L'homme aurait-il possédé une denture et un estomac de ruminant que les bases de la sociologie eussent été radicalement différentes » pp.

211-212. • Lévi-Strauss récuse la question posée ici : « Qu'avons-nous appris...

sur l'état de la société en général, et sur l'infinie diversité des moeurs et des coutumes, quand on nous laisse en tête à tête avec cette proposition ?. »

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