Un fait unique et qui ne se répète pas peut-il être l'objet d'une science ?
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Analyse du sujet: Un fait unique et qui ne se répète pas peut-il être l'objet d'une science?
Tout sujet relatif à la science doit nous rendre attentif à l'incertitude de l'existence d'un modèle unique de la science.
Il n'y a pas une
mais plusieurs sciences, on ne fait pas des sciences "dures" (mathématiques, physique) comme des sciences "m olles" (sociologie,
psychologie).
On ne fait pas des sciences expérimentales comme des sciences théoriques.
Ce qui détermine une science c'est son objet.
Or, il faut constater que presque tout fait l'objet d'une science, la méthode scientifique s'est considérablement étendue
La science trouve initialement son domaine privilégié dans un certain type d'objet: les objets abstraits.
La méthode la plus rigoureuse,
celle qui servira de modèle à toutes les sciences, c'est en premier lieu la géom étrie et plus généralement les mathématiques.
Descartes
dans son Discours sur la méthode a souhaité l'étendre à toutes les sciences, en en faisant le modèle par excellence de la pensée
déductive.
Or, dans ce sujet, il faut remarquer que l'objet dont il est question est un fait.
Le fait est employé surtout en histoire, néanmoins, un
fait est un évènement qui peut relever de mécanisme purement physique mais aussi d'une activité humaine.
Par exemple: le fait que le
soleil se lève est d'ordre physique.
Cependant, ici, le fait est "unique" c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'autre fait qui lui est identique et qu'il ne se répète pas, c'est-à-dire qu'il
a lieu pendant un moment fini et qu'il n'aura plus jamais lieu.
Il existe bien une différence entre les deux, qu'il faut repérer et expliciter.
Un sujet obéit toujours a un principe d'économie qui doit rendre les apparentes répétitions suspicieuses.
Je peux très bien avoir un fait
unique (le soleil se lève) qui se répète (le soleil se lèvera demain); et un fait qui se répète : la guerre mais qui n'est pas unique: il y a
des guerres très différentes mais un seul soleil.
Bien sûr cette distinction pourra être critiquer.
Le fait est valable en histoire, en sociologie mais aussi en physique et en biologie mais pas dans les mathématiques.
Dans les
mathématiques, on ne parle pas de faits mais d'objets.
Pourtant, c'est elle qui a pu servir de modèle aux autres sciences.
Un fait unique
et qui ne se répète pas semble plus particulièrement le propre de l'histoire.
Problématisation:
La science ne peut-elle s'occuper que de choses générales et répétives, selon la formule célèbre "il n'y a de science que du général"? Doitelle laisser les faits particuliers à une étude qui ne peut prétendre au titre de science? Cela signifierait qu'il existe dans le monde des
domaines, des actions qui ne peuvent avoir une explication scientifique.
Proposition de Plan:
1.
La répétition est nécessaire à la science
a) Nous avons écrit que le modèle de la science était les mathématiques.
Or, qu'est-ce que cela implique pour la science? Les
mathématiques ont une démarche axiomatique qui consiste à poser des prémisses ou axiomes et à déduire de ces axiomes un ensemble
de propriétés.
De sorte que les mathématiques évoluent dans un univers construit factice.
Or, comment cela pourrait-il être appliqué au
domaine du fait et donc de la réalité.
b) On oppose parfois la théorie et l'observation.
En réalité, toute science empirique, par exemple la physique, ne peut se passer de l'un et
de l'autre.
Par exemple, l'astronome observe le mouvement des planètes.
La terre tourne autour du soleil est un fait qu'il peut observer à
plusieurs reprises et donc étudier afin d'en trouver la loi de mouvement.
La répétition du fait à son identique est ce qui permet de penser
l'existence d'une loi générale.
Mais, qu'en est-il des sciences qui doivent prendre en compte des actions humaines et donc qui semblent
être confrontées à des faits qui sont uniques?
c) La sociologie qui est l'étude des faits sociaux n'est possible comme la physique que parce que certaines corrélations entre deux
phénomènes sociaux se répètent.
L'observation, par l'enquête, occupe dans cette science une importance particulièrement grande.
Or,
cette science n'est possible que par la répétition de plusieurs faits.
C'est parce qu'un fait social se trouve être plusieurs fois accom pagné
d'un autre que l'on peut soupçonné entre les deux un lien de causalité et dont on peut par suite découvrir le mécanisme.
Si un fait est
unique et ne se répète pas il ne peut être qu'enregistré et on ne peut qu'ignorer sa cause d'un point de vue scientifique.
Et pourtant l'histoire n'a-t-elle pas pour but d'expliquer l'enchaînements de faits uniques? César n'a beau franchir qu'une fois le Rubicond,
ne peut-on en pénétrer la cause? Cela relève-t-il d'une explication scientifique ou d'autre chose.
2.Il n'y a que des faits uniques.
a) Le travail historique a plusieurs dimensions complémentaires: il enregistre les faits, mais aussi, par la narration, en suggère le cours.
L'explication historique a beau n'être qu'une interprétation, certaines sont plus plausibles que d'autres.
Mais, les faits historiques sont-ils
tous si uniques? L'histoire nous présente un certain nombre d'évènements dont on trouve un lien de ressemblance.
Par exemple: le lien
entre l'économie et la guerre n'est il pas établi de par la répétition d'un même fait économique qui a été suivi à plusieurs reprises d'un
conflit.
Si les faits historiques étaient si uniques qu'ils seraient incomparables aucune histoire ne saurait possible.
Pourtant, il faut
reconnaître qu'il n'y a pas de fait qui se répète à l'exactitude dans l'histoire, il n'y a que des faits comparables.
b) Or, cela n'est-il vrai que pour l'histoire? Si son titre de science n'est pas unanimement reconnu, n'y a-t-il pas dans le monde que des
faits uniques et qui ne se répètent pas? En sociologie, on peut étudier deux faits sociaux équivalents alors qu'ils n'ont pas lieu au même
instant, qu'il ne sont pas accomplis par les mêmes individus, qu'ils ne sont objectivement pas les mêmes.
Si les actions humaines ne se
répètent jamais avec exactitude, les faits que les hommes peuvent observer sans y prendre part, les faits naturels et physiques peuventils se répéter? Le soleil ne tourne jamais avec exactitude de la même façon autour du soleil.
J'observe une répétition alors que celle-ci
n'est jamais exacte.
Héraclite écrit dans ses Fragments:" nous ne nous baignons jamais deux fois dans le même fleuve".
c) Cependant, il faut reconnaître qu'entre les répétitions les différences pèsent moins dans le domaine des faits physiques que dans le
domaine de l'histoire.
En histoire en effet, une différence de caractère d'un personnage important peut emporter le cours des chose en un
sens inattendu.
Il y a de la science dans l'histoire, mais plus que toute autre science l'inconstance des choses a de grands effets.
Conclusion:
Tous les faits peuvent faire l'objet d'une science à condition que la science admette qu'elle n'étudie qu'un équivalent pratique du fait, que
tout objet de la science a une dimension abstraite.
La science peut avoir tendance à étendre à tous les faits la constance qu'elle croit
observer dans certains dom aines où la particularité passe inaperçue et oublie qu'il lui faut à la fois observer pour préciser ses abstractions
et abstraire pour s'arracher du particulier..
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