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TOUT HOMME A-T-IL DROIT AU RESPECT ?

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« Quels sont les critères qui inclinent au respect ? Comment discriminer parmi les hommes ceux qui en sont indignes ? De quel droit s'autorise t-on à ne pas leur accorder notre respect ? Est-ce une question de bon sens ? Ne nous objecteras ton pas que le respect est de droit pour tout homme ? Autant de questions soulevées par celle-ci : tout homme a-t-il le droit au respect ? La tension court entre la tentation de légiférer en partageant les hommes selon leurs qualités supposées et celle de souscrire à un humanisme universalisant qui accorderait de droit le respect à tout homme quel qu'il soit, même au criminel. I-Tout homme a le droit au respect. Respecter autrui c'est reconnaître en lui l'humanité qu'il partage avec tout homme.

Le fait d'être homme se distribue indifféremment en tout un chacun ; suivant l'article premier des droits de l'homme nous « naissons libres et égaux en droit », distinguer a priori des hommes comme indignes de respect est une aberration, véhiculée par certaines traditions institutionnalisées par exemple en Chine, Inde ou au Japon où des catégories de population sont automatiquement discriminées.

Cette discrimination raciste a des motifs historiques et culturels, elle n'en demeure pas moins injustifiable aux yeux de la raison. Dans la Généalogie de la morale Nietzsche remarque que plus un pays se développe plus les peines qu'il inflige sont atténuées (c'est une vérité générale qui peut rencontrer bien sûr des cas contradictoires), on peut remarquer que l'évolution politique s'accompagne effectivement de réformes pénales.

L'atténuation de la dureté des peines (cf.

Surveiller et punir de Michel Foucault) est signe que l'institution reconnaît la personne humaine dans le criminel, reconnaissance qui interdit le châtiment barbare. Les luttes contre la peine de mort vont dans ce sens : passer d'une loi du talion à une loi humanisée ; on le sait, la fonction de la peine plus que de venger les victimes est censée être de protéger la société.

Toucher l'homme dans sa chair signifie qu'on lui refuse toute dignité puisqu'en le réduisant à sa personne physique on passe outre sa dimension d'étant moral, existant comme personne ; or la tentation barbare a toujours été grande pour la justice, dans la Généalogie de la morale Nietzsche écrit que la douleur est certainement la plus ancienne monnaie : celle prélevée pour recouvrir les dettes. II-Le respect ne s'accorde pas de droit mais de fait. Si les efforts de la loi doivent aller dans le sens du respect de l'individu (on en est loin lorsqu'on condamne un malade mental à la prison), la loi n'est pas pour autant la propriétaire exclusive du respect.

Chacun est libre d'accorder ou non son respect.

Généralement nous ne réfléchissons pas avant d'accorder ou non notre respect à autrui, le non respect est d'ordre affectif, survenant de fait. Quel sens y a-t-il à se demander si un criminel de guerre a le droit au respect ? Quand bien même il y aurait droit en droit il ne l'obtiendrait pas de fait.

Le respect ne se commande pas, ce n'est pas une simple formule de politesse mais un affect, un sentiment. Il semble donc paradoxal de demander si tout homme a le droit au respect, les réserves faites sur les discours humanistes à visée universelle ne datent pas d'hier, ce n'est pas tant l'intention que l'efficacité, l'utilité de tels discours qui appelle la critique.

Déjà Auguste Comte dénonçait l'universalisme de façade des droits de l'homme, en effet selon lui l'Homme en général n'existe pas, postuler une idée d'Homme universel c'est nier la dimension historique et culturel de chaque nation.

Dans son Abécédaire Deleuze déclare que les droits de l'homme ne sont d'aucune efficacité contre les exactions et génocides qui sont commis, seul le droit, la jurisprudence et donc l'intervention réelle ont une valeur, les discours ne sauvant personne. III-Une société de contractants ? La question posée est caractéristique de notre société contemporaine, la notion de respect est « à la mode ».

Elle s'inscrit dans une tendance générale de la société occidentale actuelle : celle de devenir une société de contractants. Cette remarque est défendue par Alain Badiou, désormais nous faisons des contrats pour tout (de mariage, entre maître et élève, entre citoyen et gouvernants, entre médecin et patients…).

Il y a une clientélisation des rapports humains. Cette tendance est manifeste également dans l'évolution de l'argumentation publicitaire : le produit vendu est désormais tenu d'être garanti et son efficacité doit absolument être prouvée et quantifiée par des études sous contrôle d'huissier. Or, évidemment et fort heureusement tout ne peut être garanti, sans quoi on ne ferait plus l'épreuve du réel ; la récurrence de la notion de respect plus que l'idée d'une perte de valeurs trahit l'émergence de nouvelles valeurs : désormais il faudrait que même les sentiments, les affects soient garantis.

Or le respect, s'il peut s'accorder de droit, il n'a de sens que de fait et ne saurait être établi par l'établissement d'un impératif, ce n'est pas parce que les femmes sont en droit respectables qu'elles obtiennent le respect de fait ; le problème réel du respect appelle davantage une réflexion sociologique plus que juridique, une éthique appliquée plutôt qu'une pensée morale universelle détachée des circonstances. Conclusion : Que tout homme a le droit au respect c'est une certitude apodictique, cependant cette réponse n'épuise en rien la complexité des rapports humains.

Que des réformes pénales ou sociales aillent dans le sens d'un plus grand respect de la personne est important, davantage certainement que des réflexions abstraites : le respect n'a de sens que de fait, ce n'est pas un mot mais un sentiment.

Les problèmes liés au respect relèvent de l'éducation plus que de la philosophie.. »

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