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Tout désir est-il désir de reconnaissance ?

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Le désir est donc autre chose qu'une pure consommation de l'objet. L'homme ne peut se ressaisir que dans son rapport à une autre conscience de soi. Le désir ouvre donc sur l'intersubjectivité : « La conscience de soi atteint sa satisfaction seulement dans une autre conscience de soi.» Le désir prend ainsi une autre signification. Il n'est plus simplement rapport égoïste à soi, il est également position de l'autre. C'est seulement lorsque je pose l'Autre comme figure indépendante et libre que je peux me ressaisir. Je n'existe que moyennant mon rapport à l'autre et réciproquement. La reconnaissance est donc une opération à double sens « non pas seulement en tant qu'elle est aussi bien une opération sur soi que sur l'autre, mais aussi en tant qu'elle est, dans son indivisibilité, aussi bien l'opération de l'une des consciences de soi que de l'autre ». Ainsi la visée ultime du désir est la reconnaissance de soi à travers le désir de l'autre. Le désir ne prend son sens que dans la reconnaissance de l'autre par moi-même et de moi-même par l'autre : « Ils se reconnaissent comme se reconnaissant réciproquement. »

« A.

La conscience de soi est désir Pour Hegel, le désir n'est qu'un moment ou plus exactement une figure de la conscience de soi, laquelle n'est elle-même qu'une forme spécifique du devenir de l'esprit.

Mais que signifie la conscience de soi ? La conscience de soi signifie le moment où la conscience se ressaisit ellemême à travers l'objet.

Autrement dit, la conscience de soi n'existe ou ne peut se ressaisir dans son identité que moyennant le détour par un autre.

Le rapport à soi de la conscience, c'est-à-dire le moment où elle se saisit ellemême comme conscience, où elle est elle-même son propre objet, bref où elle est conscience de soi est toujours médiat.

Si un objet ne lui est pas donné, alors la conscience de soi n'est que l'identité vide du Je = Je, où aucune réalité n'est donnée.

En effet, dans le Je = Je, la conscience est immédiatement en rapport avec elle-même, mais comme aucun objet ne lui est présent ou bien comme elle n'est investie dans aucun objet, elle ne peut se ressaisir ; elle n'est qu'un contenu vide, une expression abstraite, une « tautologie 1 sans mouvement ». La conscience de soi est donc mouvement : elle est le retour à soi que la conscience opère, après s'être investie (par exemple sous la forme d'une connaissance) dans un objet extérieur ou étranger.

Elle est retour en soimême à partir de l'être-autre.

Elle est saisie de soi-même moyennant le détour par l'être-autre.

Ce qui signifie que l'identité de la conscience de soi n'est jamais immédiate, mais toujours médiate.

Cette identité n'est pas donnée, elle est ce qui doit advenir.

Quel donc je suis, moi qui connais ? Je ne peux le savoir qu'en me saisissant dans mon activité connaissante, c'est-à-dire quand je m'investis dans un autre. Pour Hegel, contrairement à Descartes, la conscience de soi n'est pas l'objet d'une saisie intuitive qui me mettrait de plain-pied au contact de mon être.

La conscience de soi est le produit d'une récognition. Avec la conscience de soi, s'ouvre la dimension fondamentale de l'Autre, et du rapport à cet Autre.

L'Autre désignant en dernière instance l'autre conscience de soi, l'autre homme.

Et si la conscience de soi est désir, le problème du désir ne peut être posé que dans le cadre général d'une problématique de l'altérité.

Le désir ne se réduit pas à une fonction de l'âme qu'il s'agirait de finaliser, après l'avoir analysée.

Penser le désir, c'est donc poser la question du rapport de l'homme au monde, du rapport de l'homme à l'autre homme. B.

La dialectique du désir Si la conscience de soi est mouvement et retour en soi-même à partir de l'autre, elle ne peut l'être que par la négation de l'être-autre.

Autrement dit, la conscience de soi pose bien l'être-autre mais elle ne s'arrête pas à lui. Elle ne s'abîme pas en lui.

Elle le pose uniquement dans la mesure où il assure le retour en soi-même, c'est-à-dire la médiation entre soi et soi.

L'être-autre est pour la conscience de soi un être destiné à s'évanouir.

Cette structure de la conscience de soi : position d'un être dans lequel on se projette et suppression de cet être, définit alors proprement le mouvement du désir.

Par le désir et la satisfaction du désir, je me saisis comme être vivant, figure indépendante.

Mais cette identité ne peut advenir que moyennant la destruction de l'autre.

A travers l'autre, je me cherche.

Mais si à travers le désir et la satisfaction du désir, c'est moi que je cherche, est-ce que le désir va me permettre de me retrouver ? « La conscience de soi, dit Hegel, est certaine de soi-même, seulement par la suppression de cet Autre qui se présente à elle comme vie indépendante ; elle est désir.» Il est donc de la nature du désir de détruire et de consommer l'objet.

Par là, la conscience de soi atteint bien à une certitude de soi-même.

Par le désir, je m'effectue et d'une certaine façon je me réalise.

La satisfaction prise à la consommation de l'objet signifie le moment des retrouvailles, de la complétion voire de la plénitude, et donc, d'une certaine façon, signifie également l'ouverture et l'accès à ma propre identité.

Toutefois, il ne faut pas oublier que cela n'est rendu possible que parce que l'autre est néant, nul.

L'autre n'est pour moi que le moyen de m'effectuer.

Il s'agit bien de consommation et non de reconnaissance.

Mais ce qui va se révéler dans cette expérience de la satisfaction, c'est précisément l'inverse de ce que pensait immédiatement la conscience de soi.

Parce que ce à quoi se confronte maintenant la conscience de soi, c'est l'indépendance de l'objet : « Dans cette satisfaction, la conscience de soi fait l'expérience de l'indépendance de son objet.

» En effet, loin d'être la nullité que posait la conscience, l'objet est bien plutôt l'essence du désir.

Sans cet objet, le désir ne peut être satisfait.

Le désir est donc dépendant de l'objet : « Le désir et la certitude de soi atteinte dans la satisfaction du désir sont conditionnés par l'objet ; en effet la satisfaction a lieu par la suppression de cet autre.

Pour que cette suppression soit, cet autre aussi doit être.

» Mais surtout, c'est exactement l'inverse de ce que je recherche qui se produit.

Alors que je pensais me ressaisir par la consommation de l'objet, cette consommation devient ma perte.

La satisfaction une fois obtenue, le désir renaît, marquant chaque fois mieux ma dépendance à l'égard de l'objet.

Me voilà pris dans le cercle infini et infernal du désir, c'est-à-dire « dans le retour alterné et monotone du désir et de sa satisfaction par laquelle le sujet retombe sans cesse en lui-même sans supprimer la contradiction » : « La conscience de soi ne peut donc pas supprimer l'objet par son rapport négatif à lui ; par là elle le reproduit plutôt comme elle reproduit le désir.

» Ainsi la conscience de soi ne peut atteindre sa vérité dans un monde dépourvu de soi, c'est-à-dire dans un monde où l'objet est posé comme nul.

Pour que la conscience de soi parvienne à un authentique savoir d'elle-même, il faut qu'elle cesse de se comporter comme une singularité égoïste et boulimique.

Autrement dit, dans l'indéfinité de son désir immédiat, ce que la conscience découvre, c'est qu'elle désire plus : elle désire se donner un objet égal à elle-même, se retrouver elle-même dans l'objet.

La conscience de soi est désir d'un autre désir.. »

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