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Sciences & Techniques: Anthropologie et étude des races

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Face à la diversité humaine, le XIXe siècle classe et, pour classer scientifiquement, mesure des angles crâniens. L'étude des races passionna de nombreux anthropologues, qui pensaient être utiles à leur gouvernement. La grande diffusion du concept de "race" en anthropologie est liée à l'essor des techniques de classification, après 1800. La classification est souvent considérée comme une démarche scientifique, née d'un besoin de clarifier des données empiriques. Classer, ce serait donc manifester la diversité humaine, l'objectiver selon des procédures rigoureuses et l'ordonner pour en rendre raison. La systématique des races au XIXe siècle engage pourtant des choix discutables, qui peuvent se résoudre en plusieurs questions préalables : Pourquoi classer les hommes ? Comment classer ? Selon quels critères pertinents ? La taxinomie des races présente une ambivalence remarquable. La plupart des anthropologues n'en critiquent pas la légitimité. C'est en effet un geste technique, la marque d'un savoir expert, professionnel. Toutefois, les systèmes varient grandement selon les auteurs. Bien sûr, il y a les Blancs, les jaunes, les Noirs. Thèse classique, codifiée par Cuvier, en 1817, sous une appellation géographique : les Caucasiens, les Mongols, les Éthiopiens.

« Sciences & Techniques: Anthropologie et étude des races Face à la diversité humaine, le XIXe siècle classe et, pour classer scientifiquement, mesure des angles crâniens.

L'étude des races passionna de nombreux anthropologues, qui pensaient être utiles à leur gouvernement. La grande diffusion du concept de "race" en anthropologie est liée à l'essor des techniques de classification, après 1800.

La classification est souvent considérée comme une démarche scientifique, née d'un besoin de clarifier des données empiriques.

Classer, ce serait donc manifester la diversité humaine, l'objectiver selon des procédures rigoureuses et l'ordonner pour en rendre raison.

La systématique des races au XIXe siècle engage pourtant des choix discutables, qui peuvent se résoudre en plusieurs questions préalables : Pourquoi classer les hommes ? Comment classer ? Selon quels critères pertinents ? La taxinomie des races présente une ambivalence remarquable.

La plupart des anthropologues n'en critiquent pas la légitimité.

C'est en effet un geste technique, la marque d'un savoir expert, professionnel.

Toutefois, les systèmes varient grandement selon les auteurs.

Bien sûr, il y a les Blancs, les jaunes, les Noirs.

Thèse classique, codifiée par Cuvier, en 1817, sous une appellation géographique : les Caucasiens, les Mongols, les Éthiopiens. Au-delà, aucun accord ne s'est fait sur le recensement des grandes familles humaines.

Tout au long du siècle, l'incertitude s'accroît avec le savoir.

Les Australiens, au faciès négroïde, sont-ils des Éthiopiens ? Les Hottentots d'Afrique australe, à peau bistre, sont-ils des Mongols venus d'Asie ? Et où placer les Américains, tour à tour affectés au groupe des hommes blancs, à celui des Mongols ou à une race sui generis, aborigène du Nouveau Monde.

L'arbitraire perce dans les discours. Au XVIIIe siècle, Buffon attaquait Linné et sa "manie de faire des classes" ; un siècle plus tard, le dilemme demeure.

Principe d'ordre, la classification se révèle, à l'usage, facteur de désordre.

Elle donne accès à un tableau synoptique qui totaliserait toutes les variables phénoménales de l'humanité par l'analyse de ses composantes, c'est-à-dire par la division en groupes distincts.

Ainsi, et curieusement, pour manifester l'universalité et le cosmopolitisme de l'homme, on doit distinguer ses familles, rendre évidentes, saillantes, leurs différences constantes.

Séparer l'homme de l'homme.

Trop de races, pas assez. L'un des premiers partisans du système des races, le naturaliste Julien-Joseph Virey, divisa l'humanité en deux grandes espèces fondées sur la mesure angulaire de l'avancement de la mâchoire.

Il rompait l'unité sacrée du genre humain.

"Deux espèces humaines ! Le nombre est petit, mais l'erreur est grande", rétorqueront les adversaires.

Virey était esclavagiste.

Il semblait, selon le jugement du philanthrope Victor Schoelcher, "animé d'une sorte de haine anatomique contre le nègre". Le projet taxinomique appliqué à l'homme n'est donc pas neutre.

Pour que la catégorie de race soit soumise à une investigation scientifique, statistiquement construite par poids, longueurs et volumes, il fallait qu'elle soit appréhendée comme un fait global, réifié.

A partir de ce moment, les anthropologues cessent d'étayer leurs expertises sur l'idée d'une nature humaine homogène. C'est dans ce sens philosophique qu'Arthur de Gobineau écrira, vers 1850, que l'Homme, l'Homme en soi, n'existe pas.

Entendons, il n'existe que des races humaines, dotées de traits différentiels, et associées, dans l'esprit des savants, à une sorte d'âme collective : le "génie" de la race, constant, comme l'instinct.

L'homme est toujours et naturellement "enraciné". Les types de l'humanité Les partisans du système des races pensaient que les grands groupes humains représentent de véritables espèces linnéennes ayant une origine radicalement séparée.

Considérant que la race se caractérise par l'hérédité fatale, ils chercheront à définir divers "types" de l'humanité coexistant dans l'espace et le temps.

Ceux-ci se verront assignés, par leur " valeur propre ", aux différents niveaux d'une échelle anatomique, les Noirs confinant à l'animalité brutale du singe, les Blancs élevés à la plus haute puissance. Pour les biologistes, la race devient le principe ultime pour l'analyse des progrès de la civilisation.

"La race est tout", écrit Robert Knox, en 1850.

Dès lors, l'inventaire des peuples lointains ou proches conclut à leurs différences tranchées, primitives.

A l'heure des patriotismes, l'atlas des races blanches s'enrichit d'une multitude de produits nationaux : races gauloise, prussienne ou ibérique ! Le nombre des races semble croître sans fin avec le savoir. Cette révélation donnera carrière à des arts de mesurer inédits, qui se développent dès après 1860, notamment en matière craniologique et psychométrique. Paul Broca donne le ton.

Grâce à l'anthropométrie, il ambitionne d'élever l'analyse des races à la hauteur d'une science exacte.

"Nous avons pour objet de constituer une science de l'homme, en tant que l'homme est un objet distinct, observable et mesurable", enchérit Paul de Jouvencel, en 1861. Entre 1860 et 1880 est mis en place le "manuel opératoire" de la raciologie.

Celui-ci est destiné à uniformiser les techniques de mensurations du crâne, des membres et de toute l'ossature du corps.

On poursuit ainsi une géométrie de formes, pour laquelle on invente toute une panoplie d'indices, d'angles mesurés sur le vivant ou le squelette.

Enfin, Broca introduit en anthropologie l'application de la méthode des moyennes, laquelle vise à plus d'objectivité et de détachement.

Elle sert surtout à donner une apparence de scientificité aux idéologies les mieux acceptées sur l'inégalité des races. Broca maintenait l'idéal d'un savoir indépendant de toute récupération politique.

Mais de nombreux anthropologues espéraient que l'anthropométrie devînt utile aux arts de gouvernement. On discuta gravement de la ségrégation des races locales et des dangers présumés des métissages entre races "inférieures" et "supérieures".

En Europe comme aux colonies, la doctrine des races donna une caution scientifique à des phobies identitaires tenaces. La mesure de l'homme sert d'abord à mesurer l'intensité de nos préjugés.

En 1842, V.Schoelcher remarquait finement que la couleur ne fait pas l'homme.

Il posa une question simple, scientifique : "Les souris blanches sont-elles moins souris que les grises ?".

Bonne question !. »

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