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Rousseau et la politique

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C'est beaucoup que d'avoir fait régner l'ordre et la paix dans toutes les parties de la république ; c'est beaucoup que l'Etat soit tranquille et la loi respectée : mais si l'on ne fait rien de plus, il y aura dans tout cela plus d'apparence que de réalité, et le gouvernement se fera difficilement obéir s'il se borne à l'obéissance. S'il est bon de savoir employer les hommes tels qu'ils sont, il vaut beaucoup mieux encore les rendre tels qu'on a besoin qu'ils soient ; l'autorité la plus absolue est celle qui pénètre jusqu'à l'intérieur de l'homme, et ne s'exerce pas moins sur la volonté que sur les actions. Il est certain que les peuples sont à la longue ce que le gouvernement les fait être. Guerriers, citoyens, hommes, quand il le veut ; populace et canaille quand il lui plaît : et tout prince qui méprise ses sujets se déshonore lui-même en montrant qu'il n'a pas su les rendre estimables. Formez donc des hommes si vous voulez commander à des hommes : si vous voulez qu'on obéisse aux lois, faites qu'on les aime, et que pour faire ce qu'on doit, il suffise de songer qu'on le doit faire.

« C'est beaucoup que d'avoir fait régner l'ordre et la paix dans toutes les parties de la république ; c'est beaucoup que l'État soit tranquille et la loi respectée : mais si l'on ne fait rien de plus, il y aura dans tout cela plus d'apparence que de réalité, et le gouvernement se fera difficilement obéir s'il se borne à l'obéissance. S'il est bon de savoir employer les hommes tels qu'ils sont, il vaut beaucoup mieux encore les rendre tels qu'on a besoin qu'ils soient ; l'autorité la plus absolue est celle qui pénètre jusqu'à l'intérieur de l'homme, et ne s'exerce pas moins sur la volonté que sur les actions. Il est certain que les peuples sont à la longue ce que le gouvernement les fait être. Guerriers, citoyens, hommes, quand il le veut ; populace et canaille quand il lui plaît : et tout prince qui méprise ses sujets se déshonore lui-même en montrant qu'il n'a pas su les rendre estimables. Formez donc des hommes si vous voulez commander à des hommes : si vous voulez qu'on obéisse aux lois, faites qu'on les aime, et que pour faire ce qu'on doit, il suffise de songer qu'on le doit faire. ROUSSEAU QUELQUES DIRECTIONS DE RECHERCHE • En quoi, selon Rousseau, « si l'on ne fait rien de plus, il y aura dans tout cela plus d'apparence que de réalité »? — Rousseau dit-il qu'il n'y aura qu'apparence ? • Que pensez-vous de la phrase : « L'autorité la plus absolue est celle qui pénètre jusqu'à l'intérieur de l'homme, et ne s'exerce pas moins sur la volonté que sur les actions.

»? • Quel est ici ce « on » dont parle Rousseau ? • En quoi « Tout prince qui méprise ses sujets se déshonore lui-même »? • Que pensez-vous de la phrase: « II est certain que les peuples sont à la longue ce que le gouvernement les fait être »? • Le texte de Rousseau engage-t-il au totalitarisme ? - La voie qu'il préconise ne peut-elle, éventuellement mener au totalitarisme ? • Pouvez-vous préciser la position de Rousseau, notamment en référence à la dernière phrase du texte ? • Finalement, qu'est-ce qui est en jeu dans ce texte ? En quoi présente-t-il un intérêt proprement philosophique ? I - LES TERMES DU SUJET Ce texte subtil de ROUSSEAU s'emploie à construire les rapports entre "OBÉISSANCE" et "VOLONTÉ" au sein de l'État et plus généralement de la vie sociale. Au sens strict, l'obéissance n'a pas besoin de l'adhésion ou du consentement de celui qui obéit : il suffit que "l'autorité" politique influe sur les seules "actions" humaines. La thèse de ROUSSEAU est alors la suivante : pour que l'État soit vraiment stable et durable, il faut qu'il trouve le moyen d'influer sur la volonté des hommes, afin que ceux-ci obéissent aux lois sans la pression de la contrainte, toujours coûteuse à l'État, et aveu de faiblesse de sa part. II - ANALYSE DU PROBLÈME Ce texte contient deux phrases terribles, qui méritent d'être repérées et expliquées par le candidat. "Le gouvernement se fera difficilement obéir s'il se borne à l'obéissance". Cette phrase nous donne le niveau théorique auquel se situe ici ROUSSEAU : contrairement au Contrat social où il examine les conditions de possibilité de l'exercice de la souveraineté par le citoyen, il inverse ici le point de vue, et s'interroge sur les conditions de possibilité de la solidité de l'Etat. Son point de vue n'est plus idéaliste, mais réaliste : un Etat qui n'entretient avec ses administrés qu'un rapport extérieur d'obéissance en arrivera inévitablement à la force pour se maintenir. "L'autorité la plus absolue est celle qui pénètre jusqu'à l'intérieur de l'homme". Cette phrase, mise en face de la précédente, a une résonance non seulement réaliste, mais CYNIQUE en ce sens qu'elle donne de la théorie politique une dimension inattendue chez l'auteur du Discours sur l'inégalité : celle de la MANIPULATION EXTERIEURE, PAR LA PUISSANCE PUBLIQUE, DE LA VOLONTÉ DES CITOYENS.. »

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