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Rousseau et la morale

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Les coupables qui se disent forcés au crime sont aussi menteurs que méchants : comment ne voient-ils point que la faiblesse dont ils se plaignent est leur propre ouvrage ; que leur première dépravation vient de leur volonté ; qu'à force de vouloir céder à leurs tentations, ils leur cèdent enfin malgré eux et les rendent irrésistibles ? Sans doute il ne dépend plus d'eux de n'être pas méchants et faibles, mais il dépendit d'eux de ne pas le devenir. O que nous resterions aisément maîtres de nous et de nos passions, même durant cette vie, si, lorsque nos habitudes ne sont point encore acquises, lorsque notre esprit commence à s'ouvrir, nous savions l'occuper des objets qu'il doit connaître pour apprécier ceux qu'il ne connaît pas ; si nous voulions sincèrement nous éclairer, non pour briller aux yeux des autres, mais pour être bons et sages selon notre nature, pour nous rendre heureux en pratiquant nos devoirs ! Cette étude nous paraît ennuyeuse et pénible, parce que nous n'y songeons que déjà corrompus par le vice, déjà livrés à nos passions. Nous fixons nos jugements et notre estime avant de connaître le bien et le mal ; et puis, rapportant tout à cette fausse mesure, nous ne donnons à rien sa juste valeur.

« "Les coupables qui se disent forcés au crime sont aussi menteurs que méchants : comment ne voient-ils point que la faiblesse dont ils se plaignent est leur propre ouvrage ; que leur première dépravation vient de leur volonté ; qu'à force de vouloir céder à leurs tentations, ils leur cèdent enfin malgré eux et les rendent irrésistibles ? Sans doute il ne dépend plus d'eux de n'être pas méchants et faibles, mais il dépendit d'eux de ne pas le devenir.

O que nous resterions aisément maîtres de nous et de nos passions, même durant cette vie, si, lorsque nos habitudes ne sont point encore acquises, lorsque notre esprit commence à s'ouvrir, nous savions l'occuper des objets qu'il doit connaître pour apprécier ceux qu'il ne connaît pas ; si nous voulions sincèrement nous éclairer, non pour briller aux yeux des autres, mais pour être bons et sages selon notre nature, pour nous rendre heureux en pratiquant nos devoirs ! Cette étude nous paraît ennuyeuse et pénible, parce que nous n'y songeons que déjà corrompus par le vice, déjà livrés à nos passions.

Nous fixons nos jugements et notre estime avant de connaître le bien et le mal ; et puis, rapportant tout à cette fausse mesure, nous ne donnons à rien sa juste valeur." ROUSSEAU I - ANALYSE DU PROBLEME Ce texte de JEAN-JACQUES ROUSSEAU a pour thème les notions de passion et de volonté.

Son problème est le suivant : à quelles conditions l'homme peut-il se rendre maître de lui-même et par là même heureux ? La thèse du texte consiste à répondre à cette question en ces termes : L'homme peut devenir heureux et maître de soi par une éducation qui lui présente constamment les valeurs qui sont bonnes selon sa nature, et non celles que la société impose au nom de l'amour propre -le désir de "briller aux yeux des autres"-. L'enjeu en est le suivant : Existe-t-il une possibilité pour l'homme aliéné aux fausses valeurs de la vie sociale, pour retrouver la vérité des valeurs qui seules pourraient faire son bien au double sens du terme, c'est-à-dire le rendre moral et le rendre heureux. L'argument principal du texte repose sur la notion d'habitude : c'est l'habitude qui nous endurcit dans le mal, c'est grâce à elle qu'on endurcira l'homme dans le bien. II - LES GRANDES LIGNES DU TEXTE Trois parties charpentent le raisonnement de ROUSSEAU. Du début à "ne le pas devenir" : le vice, la tendance à l'action mauvaise ne peut pas se dédouaner par ce recours à des contraintes extérieures : il est, radicalement, du ressort de la volonté du sujet vicieux. De "O que nous..." jusqu'à "nos devoirs" : appel à une éducation fondée sur les bons "objets", incarnant le bien -et définition du bien par les valeurs qui se rattachent à "notre nature"-. De "cette étude" à la fin : ROUSSEAU étudie les conséquences de l'habitude prise au vice. III - UNE DEMARCHE POSSIBLE On pouvait mettre l'accent sur les points et termes suivants : 1 - Première partie du texte Les couples "force" et "faiblesse", et "être" et "devenir". Le coupable n'a pas été, fondamentalement, poussé au crime par une force extérieure : si une telle force mécanique a agi sur lui, c'est parce que, par un libre choix de sa "volonté", il l'a laissée agir ; il s'est volontairement, s'il l'on peut dire, laissé entraîner. "Etre" désigne un état fixe, voire figé ; "devenir" désigne le processus au cours duquel le sujet fait l'acquisition d'un. »

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