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Rôle et place de la femme dans la littérature ?

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« «Tout chef-d'oeuvre nécessite un brouillon préalable, c'est pourquoi Dieu créa l'homme avant la femme», déclame-ton plaisamment.

Cependant le problème de la condition féminine suscite actuellement de nombreuses mesures et de multiples discours.

Parallèlement à ces devises, on peut s'interroger sur la place réservée à la compagne de l'homme dans le contexte littéraire.

Quelle image de la femme nous apportent donc le livre et ses antécédents ? Selon les époques, selon les auteurs, la femme change de visage.

Elle est en quelque sorte un miroir à faces multiples et variées.

Cependant sa place dans la littérature est, souvent, il faut le reconnaître, le reflet de celle que la société a daigné lui accorder. La Bible nous la présente comme un être insignifiant et faible, dérisoire.

Elle interprète la réplique de Jésus lors des Noces de Cana comme une rebuffade et déclare en fait que les femmes n'ont pas à s'occuper des affaires publiques ; la Vierge Marie, symbole de la pureté, mère de Jésus, essuya cette réponse sèche et froide de son fils : « Femme, de quoi te mêles-tu ? » Voltaire, lui aussi, anti-féministe convaincu, ne manqua jamais de railler la femme et son insensibilité, son inconstance.

Sémire, la belle promise du sage Zadig, n'est ni plus ni moins qu'une jolie fleur frivole et peu raisonnable.

Or le philosophe froid et lucide, amoureux de la raison, resta un célibataire heureux et conseilla au sage de ne jamais prendre femme.

Le récit de la prise de Jéricho, tel que Victor Hugo le transpose dans Les Châtiments, insiste sur la présence des femmes qui filent leur quenouille. La femme semble donc ne rien représenter ; elle est véritablement insignifiante quand on ne l'accable pas de défauts.

Elle sait être méchante ou jalouse à plaisir, comme la reine Cléopâtre ou la belle-mère de Blanche neige. Elle est infidèle et trompeuse, habile à manier l'homme, comme la Célimène de Molière, hypocrite et fausse prude comme Arsinoé.

Or son sort est bien médiocre. On la voit toujours travaillant et s'affairant à son ménage ou à sa cuisine, soucieuse du menu à préparer et menant les enfants en classe ; les premiers manuels scolaires nous présentent cette image de la maman de Rémi et Colette, et c'est bien souvent la conception de la femme que les bambins se font.

La femme est-elle aussi évoquée sous cet angle dans la littérature — disons : plus évoluée ? Henriette, héroïne de Balzac, n'a rien à envier à la douce maman de Rémi et Colette.

Elle est la femme cajolant ses enfants et dévouée à leurs soins.

Elle veille et les console, se montre attentive au moindre de leurs troubles ; sa vie est monotone, son amour se perd dans l'abîme de l'habitude et sa sensibilité souffre.

Être faible et malheureux, mère accomplie, telle est la place d'Henriette dans cette société. Comme la jeune veuve Célimène, création de Molière, elle a sans doute fait un mariage de convenance ou d'intérêt, et le sort des femmes de ces siècles anciens, même si Molière était du XVIIe siècle et Balzac du XIXe, était de réaliser un mariage capable de leur procurer une vie matérielle satisfaisante.

Comme quoi la littérature est parfois le reflet de la réalité et a pu faire dire à Stendhal : «On ne peut plus atteindre au vrai que dans le roman»... Souvent la divine créature est intimement liée à l'amour, qui passe aux yeux de certains comme le sentiment suprême.

Il semble qu'elle ne fût créée que pour satisfaire un besoin d'amour et que mis à part la cuisine et l'amour, elle n'ait qu'une vie bien pauvre.

Pagnol, académicien et auteur, nous décrit Angèle ou la fille du puisatier prise au jeu de l'amour ; enceintes, elles n'attendent plus rien de la vie que le mariage, la vie de mère et le pardon presque impossible du père, la 75 mère n'ayant rien à dire.

C'est donc cela, la vie de femme ? De leur côté, Blanche-Neige et Cendrillon, après d'âpres épreuves, découvrent le bonheur dans le mariage de leur rêve avec le Prince Charmant, mystérieux et riche ; et ils auront beaucoup d'enfants que la mère devra élever dans l'honneur et la dignité, ô femme, rêve d'amour, qui bientôt se transforme en mère accomplie ! Lamartine et Nerval t'ont pleurée et fait de toi leur unique raison de vivre.

Baudelaire a toujours regretté la mère qu'il n'a pour ainsi dire jamais eue et Verlaine, obsédé par les femmes et l'amour, voyait en la créature de Dieu un être délicat, triste, mélancolique, compréhensif et tendre, et recherchait avant tout l'amour maternel. Femme souvent synonyme de sensibilité, de fragilité, comparée à une rose pour laquelle le moindre vent frisquet entraîne la chute d'un pétale ; femme, être soumis et faible, éploré et maladif, incapable de prendre une décision : telle est l'image de la femme dans une certaine littérature ; que sont donc Eugénie Grandet et sa mère ? Deux êtres exécutant les ordres du père, deux femmes renfermées et moroses, coulant une vie plus ou moins paisible, mais n'agissant jamais sans l'avis ou l'ordre de l'homme, du père.

Le théâtre grec n'a-t-il pas dans les temps antiques condamné cette faiblesse de la femme ? Les rôles féminins n'étaient-ils pas tenus et interprétés par des hommes ? Le roman à son début ne fut-il pas destiné à distraire et amuser les femmes qui se languissaient ? La femme ne vitelle pas de ses charmes, que Célimène ou la Dame aux Camélias savent si bien mettre en valeur ? Pourtant Émile Zola a décrit en Gervaise une femme forte et réaliste, courageuse et méritante, lucide et clairvoyante, mais qui effectue un travail ménager. Les femmes entreprenantes, directrices de magasins ou de banques, les femmes responsables d'un ministère d'une grande entreprise, qui nous les a évoquées ? Personne, pour la bonne raison que ces postes ne leur ont été conférés que récemment et que la littérature, même si elle invente et imagine des personnages, reste dans un contexte pour le moins réel et réaliste. Or les femmes écrivains, aussi méritantes que les hommes d'ailleurs, n'essayent guère de remédier à ces carences ou insuffisances ; pensons à Françoise Sagan ou Flora Groult par exemple; cette inertie signifie-t-elle que la femme s'accommode du rôle que la vie et la création littéraire lui réservent ? Pourtant notre monde ne manque pas de femmes fortes, réalistes, pleines d'initiatives personnelles et de bon sens, sans être pour cela désagréables et malveillantes. Une certaine littérature a en effet tendance à penser que la femme belle, élancée et gracieuse ne peut réussir qu'en amour, et que la femme plutôt rébarbative, intelligente et pratique, ayant le sens des affaires, se doit de s'intéresser à une brillante carrière, mais ne doit rien attendre du coeur et des sentiments.

La femme ne peut-elle pas être à la fois sensible et réaliste malgré tout, belle et sage ? Telle est la question qu'une telle constatation peut. »

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