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Raison et Idéologie

Publié le 28/03/2024

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« La citation de Jean-François Revel, "L'idéologie, c'est ce qui pense à votre place", met en lumière le danger de l'adhésion aveugle à des idéologies qui peuvent étouffer la pensée critique et la liberté individuelle. Cette notion contraste avec l'injonction de Horace, reprise par Emmanuel Kant comme devise des Lumières : "Aie le courage de te servir de ton propre entendement !" ou "Ose penser par toi-même".

Ainsi, Kant encourage les individus à se méfier des influences extérieures et à cultiver une pensée autonome et indépendante, contrairement à l'idéologie qui limite la capacité de réflexion individuelle en imposant des dogmes et des préjugés. Elle souligne alors qu’il ne faut pas être influencé par quelconque idéologie afin de pouvoir exercer un jugement critique et indépendant. Le terme "idéologie" tire ses origines des mots grecs "idea", signifiant "idée", et "logos", pouvant être traduit par "discours". Une idéologie représente un ensemble structuré d'idées, de croyances ou de valeurs, souvent utilisé pour interpréter le monde et guider les actions individuelles et collectives.

Ces systèmes peuvent toucher divers domaines tels que la politique, la société, l'économie, la religion ou la culture, influençant ainsi les attitudes, les comportements et les politiques. D'autre part, le concept de "raison" trouve ses racines dans le latin "ratio", évoquant l'idée de calcul, de raisonnement.

Étymologiquement liée au verbe "reri", signifiant "penser" , la raison est la faculté humaine permettant de penser, de comprendre, de juger et de déduire de manière logique et objective. La raison englobe la capacité à utiliser la logique, la rationalité et l'intellect pour former des opinions, prendre des décisions et résoudre des problèmes.

Associée à la clarté de pensée, à la cohérence et à la capacité à tirer des conclusions basées sur des preuves et des faits, elle s'oppose souvent aux émotions ou aux croyances irrationnelles.

Cette dernière est pour les lumières qualifiées comme une science. La science, de par sa nature, est alors un processus qui cherche à organiser les faits et les objets et établir des liens entre eux pour la formulation d'hypothèses et de théories qui, dans de nombreux cas, constituent un point de départ à la résolution de nombreux problèmes.

Elle a donc sa méthode qui se reflète à travers ses modes de raisonnement, d'observation et d'expérimentation.

Elle produit un savoir vérifiable par des procédés qui lui sont propres. L'idéologie, au contraire, est un système d'idées qui se présente comme neutre et objectif alors qu'il traduit des réalités sociales et sert les intérêts économiques, politiques….

d'un groupe social particulier (Josiane Schifres, Le lexique de philosophie).

Si l'idéologie produit un savoir pour l'homme, sur la société et ses institutions, ce savoir n'est pas vérifiable.

D'un point de vue de Karl Marx, le problème de l'idéologie n'est pas de savoir si son contenu est vrai ou faux, mais de veiller à ce qu'il soit cohérent, bien structuré et surtout efficace.

Il ajoute même en disant que c'est la justification d'une façon de vivre, d'un ordre social. Historiquement au cours de la Révolution française, Robespierre entendait remplacer le Dieu des chrétiens par la " Déesse Raison".

Symboliquement, cela signifiait que la seule autorité sur laquelle les hommes allaient se fonder ne serait plus ni religieuse, ni monarchie, ni superstition.

La raison devait l'emporter sur l'ignorance, les anciennes croyances, l'inégalité entre les hommes. Les lumières appuient alors cette pensée puisqu pour Kant, par exemple, la raison consiste à penser par soi-même, sans se soumettre à l'autorité d'autrui pouvant être une idéologie.

Ainsi, toute connaissance qui n'a pas été réfléchie individuellement perd de sa valeur, car elle va à l'encontre de la réflexion personnelle. Dans ces conditions, l'idéologie est loin d'être une science.

C'est plutôt une raison qui justifie l'existence de classes au sein de la société.

Est-elle alors compatible avec la raison propre de l’Homme ? Ainsi, il apparaît d'emblée que la raison a raison de se méfier de l'opinion inconstante (doxa) qui retient l'homme dans un monde illusoire et de se fier au savoir stable (épistémè) qui mène l'homme dans le monde des Idées sans progrès d’une pensée critique.

Pour autant, la raison a-t-elle raison de se défier de l’idéologie ? De ce fait, une problématique apparaît ; les interférences entre la raison et les idéologies exercent-elles une influence sur la construction de notre vision du monde, sur la modulation de nos conduites, et sur la détermination de nos décisions tant individuelles que collectives ? Nous verrons dans une première partie les dangers de donner raison aux idéologies, puis les bienfaits de l’idéologie pour construire une société et nous terminerons par voir si finalement les Lumières et les penseurs de la raison ont-ils raison de se méfier des pensées idéologiques. Dans un monde qui fait face à la montée de régime totalitaire, d’idéologie dominatrice ou bien même de mouvement sectaire, la raison doit se méfier des croyances irrationnelles comme les idéologies pour ne pas déstabiliser les individus . La recherche d’autorité est convoitée par beaucoup et cette quête de pouvoir dans certaines idéologies peut compromettre les valeurs humanistes fondamentales, entraînant la domination et l'exploitation des autres. Dans les régimes autoritaires, les dirigeants cherchent à consolider leur pouvoir en écrasant l'opposition et en contrôlant la pensée de sa population par le biais d’une instauration idéologique comme le nazisme. Il est alors rationnel que la raison défie l’idéologie qui est irrationnelle. En effet, les idéologies créent des adeptes, des membres, or la raison doit se défier de l'idolâtrie pour garder cette réflexion critique que chaque individu possède.

Bayle, dans Pensées diverse sur la Comète, dénonce la croyance facile à l'extraordinaire : la comète, phénomène naturel prétendu miraculeux, est jugée comme un signe de mauvais présage.

Il condamne surtout l'imposture de charlatans qui exploitent ces idéologies infondées pour manipuler et soumettre les esprits crédules.

De même, Fontenelle montre, à travers l'anecdote de la dent d'or, que la croyance au surnaturel par exemple est absurde car elle est le produit de l'ignorance, de l'impuissance pratique et d'affects.

L'observation des phénomènes et la perception rationnelle permettent, au-delà d'une connaissance rationnelle de la nature, de se débarrasser de croyances absurdes, comme l'explication religieuse: la dent d'or est «envoyée de Dieu pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs».

. De plus, la raison a raison de remettre en cause l'adhésion irraisonnée, précipitée et dangereuse à certaines croyances idéologiques.

Les Lumières refusent le principe d'autorité, le respect de la tradition et l'adhésion à une idée dominante; cette croyance facile, irréfléchie, passive, manifeste le conformisme et la paresse intellectuelle du vulgaire qui adhère crédulement à un prêt à penser et donc l'abdication involontaire ou délibérée de la raison.

Par conséquent, il est légitime que la raison se défie de l'opinion commune, de la rumeur vulgaire, de la croyance-opinion de la foule, du jugement sans preuve.

Ainsi, Diderot, dans son article Agnus Scythicus, propose une méthode rationnelle d'investigation pour vérifier l'authenticité d'un fait: la classification, l'observation expérimentale, l'analyse des motivations des témoins.

L'homme a raison et même a le devoir de se servir de son entendement pour combattre le préjugé. Enfin, il est raisonnable que la raison se défie de l’idéologie.

La raison a raison de discréditer certains mouvements idéologiques générateurs de peur et de souffrance.

L'homme est en effet tenu dans l'angoisse de la mort et de la crainte face à un régime totalitaire comme celui de Staline.

En effet, dans de tels régimes totalitaires, la manipulation idéologique est utilisée comme un outil de contrôle massif.

Les citoyens sont conditionnés à adhérer à une vision du monde déformée, où la critique est réprimée et la dissidence sévèrement punie.

La raison, en tant que contrepoids à cette manipulation, cherche à démystifier ces idéologies toxiques en exposant leurs failles logiques, leurs incohérences et leurs conséquences destructrices. En résumé, la raison constitue la meilleure défense contre les abus idéologiques qui menacent la liberté et la dignité humaines..... »

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