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Qu'est-ce qu'un objet de luxe ?

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« Il s'agit de définir ce qu'est un objet de luxe, ce qui le différencie d'un objet ordinaire et quotidien.

Un objet du quotidien ne vise que la pure utilité, il a une fonction définie et les hommes se le procure pour cela.

Un objet devient luxueux quand il contient plus que cela, quand le matériau utilisé est rare, quand il est décoré plus qu'il ne faut, quand sa beauté nous empêche de l'utiliser pour des tâches ordinaires, et que finalement son prix est élevé et marque la différence sociale de celui qui le possède.

L'objet de luxe est rare, il en vérité moins soumis au aléas du marché car il se situe au-dessus de lui. 1) Les objets de luxe sont ceux qui servent à marquer la différence sociale. Le goût pour le raffinement serait opposé à la naïveté originelle, à la fonctionnalité première des objets de l'environnement quotidien, à la simplicité et à l'univocité des gestes et des discours.

D'emblée, le luxe est considéré comme le péché de raffinement, entre le cossu et l'emprunté, entre le grossier et le voyant, entre l'ordinaire et le m'as-tu-vu.

Le luxe est ainsi la somme complexe d'activités sociales classant à la fois l'antérieur vertueux et le futur décadent, la représentation d'un pouvoir – fût-il politique ou économique –, la distinction entre la vulgarité du rien, d'une part, et, d'autre part, la valeur esthétique et son incarnation dans une série d'objets, de comportements, de produits sociaux sur lesquels, à un moment historique donné, des individus apposeraient une sorte de label intrinsèque.

Il s'agit d'une métamorphose essentialisant des configurations, des matériaux et des modes d'expression.

Une fraction de la population, négligeable démographiquement, préside à l'ordination des objets et des cultes luxueux ; elle dispose du pouvoir d'en régler les cérémonies, les avènements, les rites de passage et de métamorphoses.

c'est, dans une société inégalitaire, pour la classe élevée, marquer son prestige par l'acquisition, la destruction ou le don ostentatoire d'articles dispendieux prouvant la richesse de celui qui donne, de l'« homme de loisir ».

Les objets achetés, montrés, délaissés servent à marquer la position statutaire.

Le luxe est ainsi nécessaire à l'acceptation et à la stabilisation de l'univers des jugements de valeur et des normes du goût : « Le rang règle l'habit, l'architecture et les parures et en retour la dépense en somptuosité désigne le rang » produits de luxe, lesquels, destinés à une minorité, jouaient un rôle de marqueur social, montrant de manière ostentatoire la richesse.

Leur prix élevé était un élément important de leur contenu symbolique. 2) le rôle des esthètes dans la création des objets de luxe. Les artistes romantiques laissèrent peu à peu la place à un type nouveau d'individu qui est l'esthète.

L'esthète est un artiste infiniment plus raffiné, qui donne à l'art une place essentielle dans sa vie et dans sa conception du monde.

C'est bien plus qu'un praticien, au point qu'il peut se passer de toute pratique artistique, devenant lui-même pur « goûteur » des « choses de l'art ».

Le XIX e siècle a engendré des individus qui ne vivent que pour l'art et qui se sont coupés de la réalité.

Ils ont demandé dès lors à l'art d'être de plus en plus sophistiqué pour répondre à toutes leurs attentes qui sont restées dans le domaine de la rêverie.

Ce raffinement décadent de l'esthétisme, qui a trouvé son expression littéraire dans le personnage de Des Esseintes chez Huysmans (À rebours, 1884) n'a pas été sans influencer le mouvement même des arts.

En protégeant et en encourageant les recherches destinées à satisfaire les goûts les plus délicats et les plus blasés, l'esthétisme a favorisé l'éclosion des créations rares à la fin du siècle, notamment dans le domaine des arts du décor (mobilier, céramique, tissu, vitrail, etc.) .

Les principaux artisans de l'Art nouveau, Gallé notamment, que Montesquiou admirait, lui doivent beaucoup, de même que les plus ésotériques ou les plus précieux des peintres symbolistes.

Cette recherche continue d'un art toujours plus élaboré et original, a débouché sur le kitsch fin de siècle de l'éclectisme outrancier, sur un kitsch baroque et assez luxueux.

Le dandysme est une réponse à l'uniformité de la vie moderne en montrant l'éclat de ce qu'il reste d'héroïsme dans la décadence.

Il soulignera par là l'importance du maquillage chez la femme, de la toilette, et la volonté de rompre avec la monotonie au risque du mauvais goût.

Des dandys comme Oscar Wilde n'hésitent pas à mettre des costumes violets assez kitsch pour se faire remarquer tout en ne s'étonnant de rien.

Le refus de la médiocrité passera par la provocation et l'étrange.

Le dandysme sera une tentative désespérée de sauver les restes d'un passé glorieux où les aristocrates avaient une vie essentiellement faite de loisirs, de flâneries et de dîners mondains.

On comprend que l'objet de luxe est celui qui se refuse à être utilitaire, il contient en lui les signes distinctifs sociaux de celui qui le possède.

L'objet de luxe veut se démarquer des objets ordinaires par sa beauté, son excentricité, son originalité. 3) l'art comme luxe : la rareté. Le marché de l'art ancien est celui de la rareté et du jugement de l'histoire.

Chaque œuvre est singulière et irremplaçable : elle est bien, dans l'hypothèse idéale, le produit unique du travail indivis d'un créateur unique.

L'offre potentielle est fixée et la raréfaction croissante.

La rareté artistique comporte, évidemment, ses degrés d'excellence.

Au niveau le plus élevé du marché de l'art classé, le commerce est entre les mains de quelques négociants de rang international et des responsables des grandes ventes aux enchères.

Les prix atteints ne rendent accessibles les chefs- d'œuvres des grands maîtres qu'à une minorité d'acheteurs internationaux dotés d'un fort pouvoir d'achat (le nombre des achats effectués par des particuliers ayant tendance à diminuer tandis qu'augmentent les achats des collectivités publiques, des musées ou des fondations).

Qu'il s'agisse ou non d'une vente aux enchères, le vendeur d'un tableau est le vendeur unique d'un tableau unique.

Au sens étymologique du terme, le vendeur est « monopoleur » et le prix de l'œuvre d'art est le résultat de la concurrence qui s'instaure entre un nombre limité d'acheteurs.

Dans le marché de la peinture ancienne, où dominent les éléments monopolistiques, on atteint, dans le cas idéal – typique de la limitation absolue de l'offre –, des sortes de sommets économiques.

La rareté du chef-d'œuvre unique du génie unique est la rareté la plus rare, et la plus chère, parmi les raretés socialement désignées comme artistiques.

Elle est aussi la plus résistante aux aléas de la conjoncture.

La notion de valeur refuge l'emporte, dans le marché de l'art ancien, sur celle de valeur spéculative – même si la tenue des prix, dans les zones marginales, n'est pas indépendante de la révision périodique de la hiérarchie des valeurs artistiques et des caprices du goût. Conclusion. Un objet de luxe est rare, fait de matériaux nobles, il tend à montrer le rang social de celui qui le possède.

Il se place en dehors du circuit de l'utilité, du quotidien, par sa beauté il tranche avec les autres objets auxquels nous sommes habitués.

Les chefs- d'œuvres de l'art sont le luxe suprême car ils sont des objets uniques, leur valeur n'est pas indexée sur le marché.. »

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