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Qu'est-ce qui distingue l'oeuvre d'art d'un objet quelconque ?

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« Problématique: Qu'est-ce qui distingue une oeuvre d'art d'un objet quelconque ? Qu'est-ce qui fait qu'un objet quelconque passe au statut d'oeuvre d'art ? Le beau, élément substantiel des oeuvres d'art traditionnelles ? Il tend à être dévalorisé par l'art moderne, qui de ce fait rapproche l'oeuvre d'art de l'objet trivial.

La tension entre beauté et trivialité est intéressante à aborder.

Est-ce une question de goût, de culture, de sensibilité ? Deux grandes références à explorer : la Critique de la faculté de juger de Kant (au niveau du sensible), et La Distinction de Bourdieu (au niveau du social, de l'éducation, de la distinction).

Si, d'une part, il faut établir quels critères permettent la distinction, il faudra d'autre part se demander dans quelle mesure ces critères sont efficaces, légitimes, et même possibles parfois lorsque art et objet se confondent (comme chez Duchamp). Quelles sont les caractéristiques propres à un ensemble de signes et matériaux mis en forme par un esprit créateur, ensemble auquel on attribue une beauté procurant une satisfaction désintéressée, et ce lorsqu'on le compare à un type de réalité étranger à la beauté et à l'art ? Vous êtes interrogés ici sur le problème de la nature de l'oeuvre d'art et sur ce qui fait sa spécificité.

Ce sujet est tout à fait classique et il est traité normalement dans le cours sur l'art.

Si l'analyse des termes de l'intitulé vous conduit à l'essentiel des caractéristiques (création unique, beauté, satisfaction désintéressée), n'oubliez pas d'autres éléments, tels l'autosuffisance d'une oeuvre d'art, le fait qu'elle exprime une vision spirituelle, etc.

Le plan progressif s'impose ici. Il s'agit ici de se demander à partir de quel moment il y a art.

Un objet quelconque est un objet issu par exemple de la production industrielle, fabriqué en série, il ne se démarque en rien des autres objets de la série.

Il peut être quelconque car il est fabriqué en matériaux médiocres, il peut être mal fini, bâclé, purement utilitaire et construit sans soin.

Au contraire un objet d'art serait fabriqué avec attention, de manière soigneuse, en petite série ou même à exemplaire unique, il serait le résultat d'un travail créatif et original, et il aurait pour qualité d'avoir une certaine beauté, et de ressortir avec éclat des autres objets de la vie quotidienne.

Mais à l'heure du design, de l'art contemporain, il devient difficile de distinguer ces deux types d'objets.

Un objet issu d'un grand designer peut être produit en grande série, une œuvre d'art peut être reproduite avec minutie.

Cette distinction a-t-elle encore lieu d'être ? 1) Les procédés de l'art et sa beauté. On reconnaîtra l'art du reste des objets par les procédés qui ont été mis en place pour réaliser cet objet.

Il y a aura une création à l'origine de cet objet, une intention artistique visant à créer une émotion.

L'objet artistique sera bien souvent en dehors du circuit d'utilité des objets ordinaires.

On reconnaîtra une certaine facture, un savoir-faire, une certaine patine que ne possèdent pas les objets ordinaires.

L'art a une visée plus haute que la simple satisfaction des désirs, il a un but qui intéresse l'esprit.

Pour Hegel dans son Esthétique, L'art dégage la vérité des apparences et la doté d'une réalité plus haute crée par l'esprit lui-même.

L'objet existe pour lui-même.

La contemplation esthétique ne satisfait que des intérêts spirituels.

L'art est au milieu du sensible immédiat et de la pensée pure.

Le sensible de l'art n'intéresse que nos sens intellectuels.

Nos sens intellectualisés sont la vue et l'ouïe, tandis que le goût, le toucher, l'odorat s'occupent des choses plus matériels.

Donc dans l'art, le sensible est spiritualisé.

On reconnaîtra un objet d'art à ce qu'il ne sert pas à satisfaire les besoins humains.

L'objet artistique, culturel se démarque des autres objets dans la mesure où il a une signification qui dépasse le milieu parfois étroit qui l'a vu naître. 2) Des critères discriminants. L'œuvre d'art authentique, c'est celle qui est reconnue comme telle, et qui mérite à son créateur d'être reconnu comme artiste.

Reconnus, l'un et l'autre, par l'opinion générale, elle-même orientée par le jugement de ceux qu'Aristote appelait les experts, que la sociologie contemporaine désigne, dans le champ culturel, comme instance légitime de légitimation (P.

Bourdieu).

Il faudra du temps pour que ce jugement soit contesté en dehors même du champ culturel, et autrement que dans les disputes académiques auxquelles se complaisent les instances légitimantes.

On se demandera pourquoi une œuvre est reconnue comme œuvre d'art, et parfois même donnée en exemple.

Sans doute parce qu'elle a subi victorieusement l'épreuve de la critique : elle satisfait aux normes qui prévalent, et qui constituent les critères de la beauté, car l'idée de beauté est encore une idée normative.

Ces règles, ce sont les experts académiciens, chefs d'école, princes qui les instaurent du haut de leur fauteuil ou de leur trône.

Mais pas arbitrairement : ces experts qui orientent l'opinion du public sont eux-mêmes orientés par elle ; plus exactement, ils sont sensibles au système des valeurs qui règne dans leur société et qui spécifie sa vision du monde. Elle offre la possibilité d'un plaisir désintéressé comme le pense Kant. 3) Une distinction bien mince Les premières œuvres de Marcel Duchamp qui ont marqué ont été les ready-Made, véritable objet de la vie quotidienne récupérés, et simplement décontextualisés et élevées au rang d'œuvre d'art.

Un porte-bouteille, une roue de vélo, un bidet.

On peut imaginer que par là s'amorce une rupture avec toute définition traditionnelle de l'art, de l'art conçu comme un objet, un artefact conçu des mains de l'artiste, de l'art comme création.

La récupération amorcée par les Nouveaux Réalistes et dans un forme différente par le pop art laisse imaginer que tout peut rentrer dans le domaine de l'art, qu'il n'y plus de critère discriminant pour rejeter une œuvre hors de l'art.

Des artistes comme Arman, César reprend des éléments de la vie quotidienne dans des compressions, des réarrangements avec notamment des poubelles, des déchets, des voitures.

Le pop art par le biais de Wahrol fait rentrer des boites de conserve, d'emballage dans le domaine de l'art.

Aussi, c'est le regard de l'artiste qui fait d'un objet quelque chose d'artistique, qu'il lui donne une signification.

Ainsi n'importe quel objet vu par un photographe peut devenir artistique, comme chacun selon Wahrol peut avoir son quart d'heure de célébrité.

Tout est nivelé, il n'y a plus de supériorité de objets sur les autres au risque de l'insignifiance.

La distinction entre l'art et les objets quelconque semble bien mince.

Un simple changement de contexte suffit, mais sinon la différence peut être imperceptible. Conclusion. L'art contemporain a mis à mal les critères qui pouvaient déterminer ce qui distingue un objet quelconque d'un objet d'art.

Mais il y a encore une différence entre un simple objet et un objet d'art, ne serait-ce que son lieu d'exposition, l'entourage culturel qui lui inhérent, et que son auteur est reconnu comme artiste à part entière.

L'art intéresse l'esprit et non le désir et la simple utilité.

L'objet quelconque ne rentre pas dans le règne de la culture et reste dans le quotidien.. »

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